LE CINÉMA À L’ÉPREUVE DES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION
1sMRmrx
1sMRmrx
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
68. Les films commerciaux se font concurrence entre eux, les films Art et Essai aussi, et les uns font<br />
concurrence aux autres. Parmi les films figurant dans le « line up » du distributeur, seuls quelquesuns<br />
arriveront à trouver leur public grâce à une campagne promotionnelle massive en amont, une<br />
exposition dans la durée dans des salles porteuses et/ou un bouche-à-oreille favorable. Cette offre<br />
abondante de films s’est accompagnée d’une augmentation encore plus forte proportionnellement<br />
du nombre de « copies » en circulation 28 . Cela se révèle être un facteur de concentration des entrées<br />
sur quelques titres.<br />
69. Depuis cinq ans, les cinq premiers films (qui représentent 1,5% à 2% du total des sorties) engrangent<br />
15% du total des entrées. Bien que le nombre de films américains sur le podium soit largement plus<br />
élevé que le nombre de films français (16 contre 7 entre 2010 et 2014), le nombre d’entrées est assez<br />
équilibré (59,6 millions pour les cinq premiers films américains entre 2010 et 2014, et 62,1 millions<br />
pour les films français). Face au grand nombre de films et à la concentration de la programmation<br />
autour de quelques titres, le public se rabat sur les titres dont il a le plus entendu parler 29 . Alors que<br />
seuls 8% des films sortis en 2014 réalisent plus d’un million d’entrée, la majorité, 56%, en totalise<br />
moins de 50 000.<br />
70. Les chiffres réalisés par les plus gros succès français de l’année 2014 témoignent de cette concentration.<br />
Ainsi, les 19 films français à plus d’un million d’entrées cumulent les deux tiers des entrées réalisées<br />
par des films français. A l’inverse, 149 films français (soit 63% de la production nationale) ont réalisé<br />
moins de 100 000 entrées France et 91 films (soit 38% de la production des films français) moins de<br />
20 000 entrées France. La compilation des données du Box Office indique que les 10 premiers films<br />
font 23 % des entrées, les 20 premiers films font 35 % des entrées, les 100 premiers films font 75 %<br />
des entrées.<br />
71. Le producteur confie au distributeur la commercialisation des films sur un territoire donné pour une<br />
durée déterminée, généralement dix ans. Le distributeur dispose de l’exclusivité du film. Il agit comme<br />
un mandataire et se rémunère par une commission de 15% à 25% 30 sur le montant de la recette<br />
brute distributeur 31 . Lorsqu’il concède un minimum garanti (MG) 32 , le distributeur verse les recettes<br />
une fois le MG amorti et prélève une commission plus élevée sur ces recettes (25% à 35%), ce qui<br />
correspond à la compensation de l’avance faite en liquidité. En contrepartie de sa rémunération, le<br />
distributeur avance les frais d’édition et de promotion, qui lui seront remboursés si le film couvre ces<br />
frais. L’architecture complexe de ce système de rémunération repose, d’une part, sur la transparence<br />
de la billetterie qui doit imputer clairement des recettes à des films et, d’autre part, sur la transparence<br />
des comptes des distributeurs qui ne doivent imputer aux producteurs que des coûts effectivement<br />
exposés 33 .<br />
28<br />
Jean-Pierre <br />
<strong>LE</strong>C<strong>LE</strong>RC, « Mission de médiation et d’expertise relative aux conditions actuelles des sorties de films en salles », mai<br />
2006. <br />
29 <br />
René BONNELL « La 25ème image : une économie de l’audiovisuel », Gallimard, 2006.<br />
30<br />
La majorité des contrats stipule qu’en « rémunération de la charge d’exploitation du film, le mandataire percevra, à compter du 1er<br />
euro de recette brut distributeur, une commission proportionnelle à ces recettes, qu’il prélèvera sur celles-ci au fur et à mesure de<br />
leur réalisation ». Dans le Protocole d’accord relatif à la transparence dans la filière cinématographique, signé le 16 décembre 2010<br />
entre les auteurs et les producteurs, il est précisé que cette « commission ne saurait excéder 25% des recettes brutes distributeur en<br />
l’absence de minimum garanti, ni excéder 35% dans le cas où le distributeur aurait versé un minimum garanti ».<br />
31<br />
On remarquera que cet accord n’a pas été signé par les organisations de distributeurs et n’a sur ce point aucun caractère normatif,<br />
sauf pour déterminer ce qui est opposable aux auteurs par les producteurs. On comprend que la définition de la recette brute<br />
distributeur soit un enjeu. Ce protocole la précise : ce sont « toutes les sommes hors taxes facturées aux exploitants des salles et,<br />
d’une façon générale, aux tiers commerçants ou non commerçants, au titre de l’exploitation du film et effectivement encaissées par<br />
le mandataire. Si le film est complété par un complément de programme, il est entendu que les recettes brutes distributeur incluent<br />
sans distinction celles du film et de son complément de programme ».<br />
32<br />
Le <br />
distributeur peut verser au producteur, à titre d’à-valoir sur les recettes provenant de l’exploitation du film pour les modes et les<br />
territoires visés par le contrat, un montant payable selon un échéancier négocié entre les parties, le plus souvent 10% à la signature<br />
du contrat. Le solde est versé soit lors de l’acceptation du matériel, soit le jour de la sortie en salles.<br />
33<br />
L’article <br />
L-441-6 du Code de Commerce dispose que « les délais convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut<br />
dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture ». La remontée des recettes vers les producteurs<br />
doit respecter ces délais légaux.<br />
26