LE CINÉMA À L’ÉPREUVE DES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION
1sMRmrx
1sMRmrx
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
182. La monopolisation des catalogues de films par les groupes verticalement intégrés constitue<br />
le point d’orgue d’une concurrence faussée par l’intégration verticale. Les groupes disposant à<br />
la fois du catalogue et de la fenêtre d’exposition (télévisée ou en salle), ils sont libres de rentabiliser<br />
leur patrimoine en l’exposant de manière optimisée.<br />
183. Vis-à-vis des producteurs, les distributeurs intégrés peuvent financer des MG plus importants<br />
et donc ont un avantage concurrentiel vis-à-vis des distributeurs indépendants pour obtenir les<br />
meilleurs films. Par ailleurs, ils représentent un effet de levier pour la valeur du préfinancement TV<br />
des films car ils rassurent les chaînes de télévision sur l’exposition qu’aura le film dans sa première<br />
exploitation en salles, créant ainsi une double concurrence déloyale vis-à-vis des distributeurs<br />
indépendants.<br />
184. Progressivement, les circuits remontent la filière en produisant les films qu’ils distribuent. Les<br />
producteurs ont donc peu de chance de pouvoir constituer un catalogue et de pérenniser des<br />
rentrées. Si le film est un succès, le producteur privé des mandats passe à côté des bénéfices<br />
du succès. La concurrence entre les producteurs indépendants et les producteurs verticalement<br />
intégrés dans un groupe est faussée car les seconds détiennent le nerf de la guerre : l’accès au<br />
public (télévisé ou en salles). Mais aussi, du fait de la mutualisation de leur risque, leur capacité<br />
d’investissement sur les films est plus forte et leur permet de surenchérir par rapport aux producteurs<br />
indépendants pour attirer les talents et leurs agents, créant ainsi une situation de concurrence<br />
déloyale. Cette surenchère participe également à l’augmentation des cachets des artistes (pour<br />
mémoire, la polémique Maraval en décembre 2014) en spéculant sur la notoriété des comédiens<br />
pour augmenter l’attractivité des films en salles et leur valeur télévisuelle en préfinancement. Ainsi,<br />
les circuits ont atteint une position extrêmement favorable en amont de la filière : en 2015, sur le top 5<br />
des films français, 4 sont produits et distribués par des groupes.<br />
Conclusion<br />
185. En France, l’exploitation, du fait du poids de la grande exploitation, bénéficie globalement d’un<br />
rapport de force favorable sur la distribution.<br />
186. Les tensions dans l’exploitation sont fortes. Les nouvelles stratégies de marketing des multiplexes<br />
ont changé l’équilibre des recettes des salles. La billetterie ne représente plus que 71% du chiffre<br />
d’affaires total des trois circuits, suivie de la confiserie pour 13%, des subventions et divers pour<br />
8,86% et de la publicité pour 7,5%. Du côté des dépenses, les circuits ont réussi à imputer de<br />
nouveaux coûts aux distributeurs et donc à s’octroyer de nouvelles recettes. Les exploitants<br />
indépendants doivent donc tenter de survivre sans disposer des mêmes capacités à dégager de<br />
nouvelles sources de recettes et en étant contraints de maintenir un prix du billet moins élevé que<br />
celui des multiplexes, soit pour compenser la différence de qualité des écrans, soit pour attirer la<br />
clientèle, soit les deux.<br />
187. Depuis la création des cartes illimitées, les exploitants indépendants implantés dans des marchés<br />
dominés par les multiplexes sont perdants à de nombreux égards.<br />
• Premièrement, ils sont obligés d’adhérer à la carte pour conserver leur clientèle principale, les<br />
assidus. Par là même, ils perdent leur relation directe avec eux.<br />
• Deuxièmement, ils se voient facturer, par les circuits auxquels ils s’affilient, des frais<br />
supplémentaires (frais de gestion des abonnés) qu’ils ne peuvent pas compenser par un prix<br />
suffisant, puisque ce n’est pas eux qui le fixent.<br />
• Troisièmement, un billet vendu au même prix par un exploitant indépendant ou par un affilié<br />
rapporte deux fois plus à celui qui est resté indépendant.<br />
66