LE CINÉMA À L’ÉPREUVE DES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION
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C3/ Marchés bifaces et déséquilibre dans les relations<br />
entre distributeurs intégrés et exploitants indépendants<br />
244. La concentration sur un marché biface peut engendrer des effets anticoncurrentiels. Cet effet<br />
a notamment été discuté lors de l’examen de l’opération TF1/NT1/TMC (2010) 135 . L’Autorité de la<br />
concurrence était préoccupée par le fait que l’opération était susceptible de renforcer le pouvoir<br />
de négociation du nouveau groupe vis-à-vis des annonceurs et de lui permettre d’augmenter<br />
ses recettes publicitaires. Le groupe aurait pu investir ce supplément de recettes dans l’achat de<br />
nouveaux contenus audiovisuels, afin d’attirer davantage de téléspectateurs. L’augmentation de<br />
l’audience aurait ensuite permis d’attirer un plus grand nombre d’annonceurs et de bénéficier de<br />
recettes supérieures encore une fois réinvesties en contenus, etc... L’Autorité indique ainsi dans sa<br />
décision que :<br />
«(...) dans un tel contexte, le renforcement du pouvoir de marché d’un acteur sur le marché de la publicité<br />
télévisuelle est susceptible de se transmettre sur les marchés des droits, dans la mesure où l’accroissement<br />
de ses recettes publicitaires lui donne les moyens d’obtenir des programmes plus attractifs, puis à nouveau<br />
sur le marché de la publicité, l’attractivité des programmes soutenant l’audience et donc la demande des<br />
annonceurs».<br />
245. Face à ces risques, la prise de contrôle exclusif des chaînes TMC et NT1 par le groupe TF1 n’a été<br />
acceptée qu’avec des engagements visant à y remédier. La question de savoir dans quelle mesure<br />
l’analyse du régulateur, dans le cas d’espèce TF1/NT1/TMC, est transposable à la filière du cinéma,<br />
mérite d’être posée.<br />
246. Les firmes verticalement intégrées sont d’autant plus bénéficiaires de la structure biface du marché<br />
car elles maîtrisent les trois leviers essentiels : le prix des places, le prix de l’espace publicitaire et le<br />
prix de location des films aux salles (taux de location).<br />
247. En imputant aux distributeurs des coûts pour la promotion des films mis en exploitation, les réseaux<br />
de salles se sont créés une nouvelle source de profit (la vente de l’espace publicitaire) et bénéficient<br />
désormais à plein des externalités de plateforme propres aux marchés bifaces. Les réseaux de salles<br />
peuvent optimaliser le couple prix de l’espace publicitaire et prix de la place de spectacle. C’est<br />
donc la concurrence dans l’accès au marché publicitaire entre les groupes verticaux et les autres<br />
exploitants qui est faussée par le caractère biface du marché, engendré par l’intégration verticale.<br />
248. La septième configuration de concurrence faussée concerne la production indépendante,<br />
qui subit de plein fouet des pratiques discriminatoires de la part des groupes intégrés et se<br />
trouve placée dans une situation de dépendance économique. La production indépendante<br />
et les créateurs qui œuvrent en dehors des grands groupes sont pénalisés, puisqu’ils doivent<br />
s’appuyer sur des intermédiaires (distributeurs non indépendants et chaînes de télévision) qui sont<br />
à la fois leurs partenaires mais également leurs concurrents.<br />
249. Les interlocuteurs verticalement intégrés sont en position de force vis-à-vis des producteurs<br />
indépendants et tendent à exiger tous les mandats. La concurrence entre les producteurs<br />
indépendants et les producteurs verticalement intégrés dans un groupe est faussée car les seconds<br />
détiennent le nerf de la guerre, l’accès au public (télévisé ou en salles), et peuvent ne pas accorder<br />
les mêmes conditions d’exposition à leurs films et aux films indépendants.<br />
250. A l’issue de cette analyse des pratiques qui faussent la concurrence, il apparait que, loin d’être<br />
isolées et de devoir être traitées au cas par cas, on observe un ensemble de pratiques par lesquelles<br />
des entreprises abusent de leur position de marché.<br />
135<br />
http://www.autoritedelaconcurrence.fr/user/standard.php?id_rub=367&id_article=1328<br />
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