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Désolé j'ai ciné #7

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28<br />

drive<br />

Pour bien des personnes, “Drive” fût<br />

le film de la révélation. Tout d’abord,<br />

la révélation d’un réalisateur phare de<br />

notre génération qui, bien qu’ayant<br />

débuté sa fascinante carrière 15 ans de<br />

cela, connaît là une visibilité critique<br />

et surtout publique inattendue, pour<br />

lui le premier. Mais surtout, “Drive” est<br />

la révélation d’un acteur, d’une figure<br />

désormais incontournable du <strong>ciné</strong>ma<br />

moderne américain.<br />

Pourtant, rien ne laissait présager un<br />

tel succès retentissant pour les deux<br />

artistes. Adapté du roman noir de James<br />

Sallis, “Drive” semble ne jamais vouloir<br />

aller là où on s’y attend. Entre ses cadres<br />

extrêmement (presque excessivement)<br />

stylisés, son rythme contemplatif et<br />

surtout son atmosphère glaciale, le<br />

long-métrage a su déconcerter une<br />

grande partie de son public, s’attendant<br />

à coup sûr à un film d’action dans tout<br />

ce qu’il y a de plus classique. Alors<br />

qu’en vérité, “Drive” est très justement<br />

un film sur le calme avant la rage, la<br />

violence intériorisée prête à exploser au<br />

grand jour, à l’image de son personnage<br />

principal.<br />

Loup solitaire au départ pantin puis<br />

bourreau par la suite, Ryan Gosling<br />

livre ici une prestation tout simplement<br />

mémorable, à la froideur monolithique<br />

dont on peut facilement se moquer<br />

mais qui dégage une puissance de jeu<br />

remarquable, éclipsant totalement le<br />

casting pourtant de haute volée qui<br />

l’entoure (Carey Mulligan, Oscar Isaac,<br />

Bryan Cranston, Ron Perlman…).<br />

Porté en plus de cela par la bandeson<br />

hypnotique et nocturne de Clint<br />

Mansell, “Drive” sait cacher son jeu.<br />

Débutant d’abord comme un polar,<br />

c’est une véritable descente aux enfers<br />

qui s’offre à nous, dans une deuxième<br />

partie accumulant les éclats gores à<br />

une cadence presque indécente, voire<br />

même malsaine.<br />

Tous ces éléments aussi singuliers que<br />

marquants ont fortement contribué<br />

à la réussite publique et critique<br />

de ce projet vu au départ comme «<br />

mineur » dans la tête de beaucoup<br />

de producteurs de l’époque. Si l’on<br />

peut visualiser le film suivant du<br />

tandem Gosling/Winding Refn, “Only<br />

God Forgives”, comme un anti-Drive<br />

complètement revendiqué, réponse à<br />

un succès presque trop important pour<br />

le réalisateur danois, il est indéniable<br />

que ce premier alignement de planètes<br />

est celui qui restera profondément et<br />

sur le long terme dans l’imaginaire du<br />

<strong>ciné</strong>ma indépendant.<br />

Un chef-d’œuvre ? Oui, on peut le dire.<br />

Tanguy Renault

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