Un ange ne vaut pas un radis - Je me livre ... Eric Vincent

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Un ange ne vaut pas un radis
Saint Marc, après ses écrits sur la vie de Jésus, le fils turbulent de Dieu, administrait le centre
de la communication télépathique. Les âmes défuntes, les anges, les saints et tous les
personnels paradisiaques communiquaient avec la parole en utilisant un langage unique,
compris de tous : le langage de l'âme. Par contre, lorsque les communications distantes
étaient nécessaires (le paradis était une vaste étendue), tout ce beau monde utilisait la liaison
télépathique. Il suffisait de se concentrer pour appeler le centre de la communication
télépathique. Une fois la connexion établie, un ange vous branchait en direct avec l'esprit
demandé. C'était simple comme bonjour.
Etant donné le nombre d'habitants au paradis, le département de la communication
télépathique était l'un des plus importants rouages du paradis. Son importance nécessitait
donc un homme à l'aura (et l'auréole) renommée et pure pour le diriger. Le rôle était dévolu à
saint Marc, l'illustre écrivain.
Ce matin, il était d'humeur joyeuse, comme d'habitude. La gaieté régnait dans le service,
malgré la récession économique guettant leur activité. Eh oui ! Le paradis connaissait la crise,
la faute au faible nombre d'entrants. La nature humaine, terrestre ou extraterrestre, se
détériorait chaque jour davantage. Les rangs des pourris ne cessaient d'enfler.
Saint Innocent, quant à lui, consultait ses tables de correspondance et appliquait les règles
textuellement. Résultat, le paradis connaissait une chute des entrées. La situation
passablement mauvaise s'aggravait d'autant plus qu'un phénomène vieux comme le monde
l'amplifiait : les âmes défuntes les plus méritantes, les plus expérimentées, étaient
régulièrement promues ange gardien. Comme ces andouilles d'humains ne cessaient de se
reproduire comme des lapins, il fallait toujours plus d'anges gardiens. Le paradis se vidait de
ses meilleurs éléments. Enfin, comme les anges gardiens, de part leur fonction, passaient plus
de temps auprès de leurs protégés, ils n'utilisaient pas beaucoup les liaisons télépathiques,
sauf pour recevoir des conseils avisés de saint Juste, leur grand patron. Voilà exposées, en
quelques mots, les raisons pour lesquelles le centre de communication télépathique
connaissait une chute continuelle de son activité.
Les difficultés importaient peu, saint Marc demeurait d'humeur égale. De plus, il devisait
joyeusement avec saint Thomas, le spécialiste des vérifications en tous genres, l'unique
personnage à qui Dieu le père en personne confiait ses missions de confiance. Justement,
Dieu, en tournée dans l'univers depuis une bonne année, à la recherche du peuple élu (une
fois de plus !), l'avait chargé de vérifier la baisse de l'activité du secteur tenu par saint Marc,
ne croyant pas que la situation soit si alarmante. Saint Thomas avait reçu un message de Dieu
ce matin même, l'ange Ournal (l'apporteur de nouvelles) ayant chevauché une comète toute la
nuit dans l'espace pour apporter le pli aux aurores.
- Examine les comptes de près. Je ne te raconte pas de blagues. Nous sommes en régression
par rapport à l'année passée. Tu vois, là ? La chute ? Tu sais ce que c'est ?
- Non, admit Thomas. Qu'est-ce que c'est ?
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