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No. 12 / Avril 2010 (PDF) - ALBA

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Mgr Georges Khodr<br />

«Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur et<br />

si nous mourons nous mourons pour le Seigneur»<br />

(Romains, 14.8)<br />

J’ai lu I’épître aux Romains un nombre incalculable<br />

de fois, mais c’est la première fois que I’affirmation<br />

de Paul : «Si nous mourons, nous mourons pour le<br />

Seigneur», m’interpelle autant. Elle est d’ailleurs<br />

d’une absolue nouveauté pour nous tous.<br />

Georges Haddad a essayé, sa vie durant, depuis son<br />

plus jeune âge, d’appartenir à son Seigneur. Élève<br />

de Sa Béatitude le Patriarche Ignace, à Beyrouth,<br />

au collège de l’Annonciation, il s’est habitué à la<br />

lecture de la Parole de Dieu avec les jeunes de<br />

sa génération, et il a osé affirmer sa volonté de se<br />

donner à cette Parole, pour qu’elle demeure en lui.<br />

<strong>No</strong>us ne faisions pas de différence en lui entre son<br />

existence matérielle, faite de poussière que nous<br />

voyions, et I’être divin auquel il aspirait. En lui, la<br />

divinité s’est mêlée à la poussière, le poussant à se<br />

consacrer aux sciences de la beauté, aux Arts, à une<br />

institution de beaux-arts. Je ne sais s’il était conscient,<br />

dans son approche de la beauté sous toutes ses<br />

formes, qu’elle n’était qu’un tâtonnement vers la<br />

beauté de Dieu, un balbutiement de la sublime<br />

splendeur du Jour Dernier, qu’il n’imaginait pas, et<br />

nous de même, rejoindre si tôt. Mais, il essayait d’y<br />

tendre par la pratique d’une beauté qui dépasse<br />

toute autre, celle de son amour exemplaire des<br />

autres. J’ai été toujours émerveillé par son amour<br />

envers les professeurs et les élèves, qui à ses yeux,<br />

dépassaient en beauté toute beauté.<br />

Celui qui a connu I’Académie peut témoigner,<br />

avec pudeur et humilité, que ceux qui y travaillent,<br />

Dr. Elie Salem<br />

Président de l’Université de Balamand<br />

à ses divers niveaux, sont tendus vers un horizon<br />

rempli d’une splendeur que la pierre et les couleurs<br />

sont incapables d’exprimer.<br />

Ayant été proche de cette institution, je peux<br />

confirmer que notre cheminement n’était pas une<br />

aventure simplement horizontale, au ras des choses,<br />

mais un voyage vers le soleil, vers les hauteurs. Cela<br />

était surtout dû à Georges Haddad. II avait le don<br />

d’exiger beaucoup des professeurs et des élèves,<br />

d’ailleurs à la mesure de son infatigable effort de<br />

travail personnel.<br />

Quand on vit dans un tel milieu, comment ne pas se<br />

prendre au sérieux, rester critique envers soi-même<br />

et humble devant Jésus et les frères, Jésus et les<br />

frères unis dans une même ivresse du divin?<br />

Vous devez probablement savoir que nos Pères ont<br />

affirmé que les fidèles dans notre Eglise doivent vivre<br />

une ivresse lucide. Car si nous ne nous enivrons de<br />

la Coupe de Jésus, nous ne pouvons guère devenir<br />

vraiment lucides.<br />

<strong>No</strong>us avons aimé Georges parce qu’il incarnait tout<br />

cela. S’il m’était donné de le cerner davantage, je<br />

dirais qu’il m’émerveillait aussi, au sein même de son<br />

humilité, par sa rigueur quand il n’y avait pas lieu de<br />

plier. J’étais heureux quand il me faisait face, qu’il<br />

s’opposait à une de mes rares demandes, car je<br />

me refuse d’habitude à confronter les tenants de<br />

la vérité que sont censés être les académiciens.<br />

Je suis intervenu, une fois, en faveur d’un étudiant<br />

auquel manquait un demi-point sur vingt. L’ajouter<br />

ne me semblait pas une grande dérogation à la<br />

vérité académique. Georges me dit: «Jamais, cela<br />

ne peut se faire». L’humilité peut respecter la vérité.<br />

A nos chers élèves de l’Alba,<br />

Il m’est tout aussi difficile d’écrire ces lignes sur<br />

Georges Haddad, que ça l’est pour vous de me<br />

lire. Car écrire ces lignes, en parlant de Georges<br />

au passé, est un exercice extrêmement pénible.<br />

Comment le faire en effet sans se rappeler son<br />

sourire, son humour, son attention et son amour pour<br />

chacun d’entre vous ! Les élèves étaient sa Vie.<br />

Je n’ai jamais rencontré, durant ma longue<br />

carrière académique menée sur deux continents,<br />

une personne aussi passionnée pour l’institution<br />

qu’il présidait, et pour tout ce qui s’y rattachait.<br />

Le leadership répond en général à des critères<br />

spécifiques : dans le cas de Georges, ces critères<br />

étaient totalement inopérants. Ainsi, alors qu’un jour<br />

je lui racontais que j’avais rencontré un étudiant<br />

qui avait été diplômé de l’Alba dans les années<br />

50, il me répondit tout de suite que celui-ci n’avait<br />

même pas suivi de cours à l’Académie. « Comment<br />

te rappelles-tu? » lui avais-je demandé. Et lui<br />

de répondre : « Oh, je connais tous les élèves<br />

0 2<br />

Toutes deux sont le produit d’un même esprit de<br />

probité.<br />

Maintenant, je veux m’adresser à vous, les parents<br />

du défunt ici présents. Le dire de Paul que «celui qui<br />

meurt meure pour le Seigneur», me pousse à vous<br />

dire: Si Georges est mort pour rejoindre le Seigneur<br />

Jésus, là-bas, dans I’ivresse de la beauté céleste,<br />

comment vouloir le garder sur terre? Allons-nous I’<br />

emprisonner dans nos regards et nos cœurs? Ou<br />

alors, allons-nous, dans la prière, le laisser aller pour<br />

qu’il s’élève encore plus et que son front frôle le<br />

trône, divin? Vous avez voulu, avec la bénédiction<br />

de Mgr Elias, célébrer un office complet ou presque<br />

complet pour affirmer que nous voulons que notre<br />

Georges habite les cieux.<br />

II y sera mieux qu’ici, car celui qui a<br />

vécu dans la charité sur cette terre, sera<br />

rempli d’un plus grand amour encore,<br />

quand il sera parmi les anges.<br />

Laissez-le partir. II a quitté votre terre. II a quitté vos<br />

parents. Sa passion de la beauté du beau, son<br />

amour de la beauté qu’il voulait inculquer à ses<br />

élèves, se fixe maintenant sur cette beauté non<br />

faite de main d’homme, que seul le Seigneur peut<br />

donner à qui iI veut. Votre Seigneur a rempli Georges<br />

de cette beauté. Laissez-le voler là-haut avec les<br />

anges et réaliser que ce dont il parlait avec ses<br />

collègues et ses élèves, n’était qu’un balbutiement<br />

sur cette beauté dont on ne peut parler.<br />

Amen.<br />

qui ont été diplômés de l’Alba. De plus, non<br />

seulement je sais tout de nos élèves actuels, mais<br />

j’ai même mémorisé les numéros de leurs plaques<br />

minéralogiques! ».<br />

Ce genre de personnes, rarissime, n’existe plus. Ainsi,<br />

il n’y aura plus jamais un autre Georges Haddad !<br />

Il occupera dans notre histoire une place singulière.<br />

<strong>No</strong>us l’honorerons toujours comme le<br />

seul et l’unique qui était l’Alba, tout<br />

comme l’Alba, c’était lui.<br />

Le fait de toujours nous souvenir de lui, et de le<br />

placer sur un piédestal comme un modèle à suivre,<br />

le rendra immortel, comme ceux qui, dans la Grèce<br />

antique, appartenaient à l’Olympe. Que son esprit<br />

repose en paix, et que ses élèves se souviennent<br />

toujours de lui, comme lui se souvenait des moindres<br />

détails concernant chacun d’entre eux.

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