Consulter l'étude (PDF - 338Ko) - Parc de la Villette

En ce qui concerne les supports écrits, leur pratique est tout à fait significative. De façon
générale, les visiteurs ont tous lu, de façon plus ou moins attentive, plus ou moins exhaustive,
les "tirettes" (bornes métalliques) qui guident leur cheminement dans l'exposition, et "les
panneaux du début et de la fin" (panneaux de présentation des personnages, au départ du
parcours, panneaux de la fin de leur histoire, avant de sortir). Ils ont également tous utilisé et
manifesté de l'intérêt pour les documents-jeux : passeport, au premier chef, formulaire de
demande d'asile, mais aussi la lettre du pays d'origine qui a énormément ému certains visiteurs
et a parfaitement rempli la fonction qui lui était assignée (rappel de ce que le réfugié a laissé
derrière lui en quittant son pays).
- Autre point très bien : les lettres, le frère de Luis qui lui raconte ce qui se passe sur place et que le
général le recherche toujours. Elle fout les boules ; je me disais à quel point Luis devait être angoissée à
l'idée de sa famille restée là-bas. C'est impressionnant aussi parce c'est le seul contact qui nous ramène au
pays d'origine : son passé est toujours présent, il ne peut pas oublier, il est replongé dans l'horreur de son
pays (femme, 25 ans, psychologue du travail )
- Par contre, après, j'ai trouvé une lettre magnifique d'un médecin qui a connu Vesna. J'ai trouvé que c'était
spontané, intime, poétique ; elle est très belle et très bien écrite, Il y a des sentiments, c'est en opposition
avec le bureau et ce qui s'y passe. Elle est magnifique, cette lettre ! ((femme, 34 ans, animatrice pour
adolescents)
Par contre, les quelques cinquante panneaux didactiques d'informations factuelles sur la
question des réfugiés jalonnant le parcours de visite n'ont, en général, pas été lus. De façon
symptomatique, un grand nombre de personnes expliquent pourtant qu'elles ont lu tous les
textes présents dans l'exposition : "j'ai tout lu : les tirettes, les écrans d'ordinateur et les
affiches des personnages du début et de la fin. Les autres panneaux ? Où ça ? Ils ne sont pas
visibles…" ; ceux-là n'ont tout simplement pas vus les panneaux didactiques ou, du moins, les
ont regardés sans les voir. D'autres visiteurs les ont remarqués mais les ont ignorés "parce
qu'on n'a pas le temps ou, plutôt, on canalise l'énergie sur le parcours", "parce que j'avais peur
de me faire arrêter par le garde…", "parce qu'il faut se repérer, savoir ce qu'on va faire,
chercher ce qui est utile pour s'en sortir… on ne peut pas à la fois être acteur et spectateur".
D'autres encore les ont lus ou, plutôt, ont tenté de le les lire mais n'ont pas pu accorder
d'attention au contenu : "j'ai eu un vrai choc émotionnel parce que je voulais lire les affiches et
j'ai tout lu mais j'ai rien retenu, j'étais pas là…".
Ainsi, les panneaux didactiques ont manqué leur objectif parce que celui-ci supposait que le
visiteur se situe simultanément dans deux registres antinomiques, deux attitudes
inconciliables : la raison / l'émotion, la distance / l'engagement ; que tout à la fois il ait la tête
suffisamment froide et claire, la disponibilité mentale nécessaire à la compréhension et
l'assimilation de données objectives et rationnelles, et qu'il soit suffisamment ému, touché
dans son affect pour s'impliquer personnellement et agir pour son personnage. De façon
logique, ceux qui ont pu exploiter ces apports informatifs avaient une certaine distance par
rapport à l'exposition ou, du moins, une participation plus distanciée : c'est le cas, par
exemple, de parents qui expliquaient à leurs enfants un certain nombre de notions au cours de
la visite, ou encore des personnes qui, au terme de leur visite, sont retournés dans l'exposition,
mais avec un badge d'observateur international cette fois-ci, pour pouvoir se concentrer
exclusivement sur la lecture de ces panneaux. Pour en terminer avec la question, on doit noter
qu'un document intitulé "recueil de textes" regroupant l'ensemble des textes des panneaux
avait été conçu par les organisateurs ; mais il semble que peu de visiteurs se le soient procuré.
Mis à part le cas particulier des panneaux didactiques, l'ensemble des éléments de la
scénographie de l'exposition créent donc les conditions d'une véritable immersion du visiteur :
à la différence de dispositifs plus restreints comme la lecture d'un livre, le spectacle d'un film,
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