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164_(12U<br />

Josseline Bidard<br />

un lien étroit entre la personnalité de certains conteurs et le langage<br />

qu'ils utilisaient dans leur conte. Le clerc ou l'homme de loi, par<br />

exemple, emploient de termes savants, voire techniques, révélant ainsi<br />

l'importance de leur formation intellectuelle ou de leur profession.<br />

D'autres personnages, au contraire, émaillent leur récit d'expressions<br />

familières, parfois même vulgaires, qui trahissent la médiocrité de leur<br />

origine. C'est le cas, entre autres, de Harry Bailey ou de la commère<br />

de Bath. Parfois, encore, Chaucer s'est amusé à glisser quelques traits<br />

dialectaux qui lui permettent de différencier les personnages et de<br />

créer une impression de réalisme. Ce procédé apparaît clairement dans<br />

«The Reeve's Tale », par exemple.<br />

Dans ces conditions, on pouvait s'attendre à retrouver la même<br />

richesse et la même variété dans le lexique de la parole. Or, il n'en est<br />

rien, bien au contraire. Chaucer utilise presque toujours les mêmes<br />

mots et choisit de préférence les termes les plus courants et les plus<br />

génériques. On trouve essentiellement des verbes comme to say, to<br />

tell, to speak ou bien, pour introduire les citations, la forme quod,<br />

forme aujourd'hui disparue. 3 Uniformité et monotonie semblent la<br />

règle. Nous nous proposons donc, dans cette communication, de<br />

chercher les raisons d'une telle sobriété de moyens. Fallait-il pour cela<br />

étudier tous les contes ou bien n'en choisir qu'un, parmi les plus<br />

significatifs? Nous avons opté pour la seconde solution et notre choix<br />

s'est porté sur le prologue et le conte de la commère de Bath. Deux<br />

raisons surtout justifient cette démarche : d'une part la personnalité de<br />

la conteuse, d'autre part le nombre impressionnant d'occurrences des<br />

verbes mentionnés ci-dessus. La commère de Bath sait se servir de la<br />

parole mieux que quiconque ; une fois lancée, c'est un véritable torrent<br />

verbal que rien ne peut arrêter. Elle en est tout à fait consciente et<br />

l'avoue sans détour ni complaisance. Evoquant ses démêlés avec son<br />

3 . La ponctuation étant encore très aléatoire dans les manuscrits du XIV e siècle,<br />

lorsque les auteurs employaient le style direct, ils introduisaient les paroles de<br />

leurs personnages par des formules du type quod he ou quod she sans que cet<br />

emploi soit véritablement significatif.

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