Revue internationale d'écologie méditerranéenne Mediterranean ...
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Conséquences de l’arrêt d’un pâturage séculaire sur les communautés de coléoptères terricoles de pelouses sèches<br />
Conséquences de l’arrêt du pâturage<br />
sur les communautés<br />
Dès 5 ans (Termes Blancs), l’arrêt du pâturage<br />
entraîne une chute significative de la<br />
richesse spécifique de la végétation, et cette<br />
richesse diminue encore en fonction du temps<br />
(Henry 2005). Ce résultat ne s’observe pas<br />
avec les communautés de coléoptères où il n’y<br />
a aucune différence significative de richesse<br />
entre les zones pâturées et les zones d’exclos<br />
même après 23 ans d’abandon. On observe<br />
cependant, dans un premier temps, une augmentation<br />
significative de la richesse dès 4 ans<br />
après l’abandon à Nègreiron où la pression de<br />
pâturage est la plus forte. Sous des pressions<br />
de pâturages trop importantes, la richesse spécifique<br />
des communautés de coléoptères est<br />
généralement diminuée (Kruess & Tscharntke<br />
2002 ; Samways 2005) et une relâche de cette<br />
pression provoque alors une augmentation de<br />
cette richesse (Gardner et al. 1996 ; Di Giulio<br />
et al. 2001), comme cela est observé sur notre<br />
site de Nègreiron. Cette augmentation de<br />
richesse se traduit par l’apparition de nouvelles<br />
espèces prédatrices et saprophages.<br />
L’augmentation du nombre d’espèces saprophages<br />
dans les exclos s’explique par l’augmentation<br />
de production de nécromasse<br />
(litière) lorsqu’on retire le pâturage. Les prédateurs<br />
(dont les Carabidae et les Staphylinidae),<br />
sont quant à eux, plus sensibles aux<br />
modifications micro-locales de l’humidité ou<br />
de la température induites par le changement<br />
de structure de la végétation (Dennis 2003 ;<br />
Perner & Malt 2003).<br />
Après 16 ans et 23 ans, compte tenu de la<br />
diminution nette de la richesse spécifique de<br />
la végétation, le maintien de la richesse spécifique<br />
des coléoptères, notamment celle des<br />
phytophages, peut sembler surprenante. En<br />
effet, d’une manière générale, on observe une<br />
relation positive entre la richesse végétale et<br />
la richesse d’espèces phytophages (Buse<br />
1988). Cependant, la composition spécifique<br />
de la végétation peut dans certains cas maintenir<br />
une richesse spécifique des coléoptères<br />
plus élevée (Fadda et al. 2007). Dans l’exclos<br />
du Merle, une espèce végétale bénéficie particulièrement<br />
de l’arrêt du pâturage, Galactites<br />
tomentosa Moench (fréquence d’occurrence<br />
moyenne 33 fois plus élevée dans<br />
l’exclos ; Henry 2005). La présence exclusive<br />
de certaines espèces de coléoptères dans l’exclos<br />
peut très probablement être attribuée à<br />
cette seule espèce végétale (exemple : le<br />
Cerambycidae Agapanthia cardui, le Chryso-<br />
ecologia mediterranea – Vol. 33 – 2007<br />
melidae Cassida deflorata, les Curculionidae<br />
Hadroplontus trimaculatus et Lixus filiformis).<br />
Par ailleurs, les espèces végétales des<br />
exclos voient leurs inflorescences protégées<br />
du pâturage ce qui favorise l’apparition d’espèces<br />
de Coléoptères floricoles (exemple :<br />
Tropinota squalida ou Meligethes sp.) contribuant<br />
à la richesse spécifique. Ainsi, si une<br />
plus grande richesse végétale de la zone pâturée<br />
peut contribuer à sa richesse en coléoptères,<br />
la diminution de la richesse végétale<br />
dans la zone non pâturée est compensée dans<br />
notre cas par une modification de sa composition,<br />
de sa structure, mais aussi de sa phénologie<br />
(floraison) générant un plus grand<br />
nombre d’habitats favorables à l’apparition et<br />
au maintien d’un plus grand nombre d’espèces<br />
de coléoptères phytophages (Morris<br />
1967).<br />
Conséquences de l’arrêt du pâturage<br />
sur les populations<br />
En considérant les espèces les plus abondantes,<br />
l’arrêt du pâturage ne semble provoquer<br />
aucune apparition ou disparition totale<br />
de l’une d’entre elles, même après 23 ans<br />
d’abandon. Comme l’indique l’écart entre les<br />
indices de similarités de Sørensen (présence/absence)<br />
et de Steinhaus (densité), les<br />
espèces se retrouvent à la fois dans la zone<br />
pâturée et la zone d’exclos, mais voient leurs<br />
densités modifiées.<br />
Parmi celles-ci se trouvent deux espèces<br />
typiques de la steppe de Crau Asida sericea<br />
et Coniocleonus nigrosuturatus (Fadda et al.<br />
2007). Ces deux espèces prédominent la communauté<br />
de la zone pâturée de Nègreiron, et<br />
voient leurs densités fortement diminuer dans<br />
la zone d’exclos, et ce dès 4 ans. Cette tendance,<br />
même avec des densités moindres en<br />
zones pâturées, se retrouve sur les trois autres<br />
sites. Après 23 ans d’abandon, seuls un exemplaire<br />
d’Asida et trois de Coniocleonus ont<br />
encore été retrouvés dans l’exclos du Merle.<br />
Les abondances de ces deux espèces sont corrélées<br />
positivement avec une hauteur de végétation<br />
rase et le recouvrement de sol nu, mais<br />
aussi à la richesse de la végétation. Toutefois,<br />
cette relation est vraisemblablement indirecte<br />
et artificielle du fait de la relation positive<br />
existant entre ces trois variables environnementales<br />
(Henry 2005). Il est évident que ces<br />
deux espèces peuvent être considérées comme<br />
indicatrices d’habitats très ouverts et, dans<br />
notre cas, surpâturés.<br />
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