QUI EST VRAIMENT ANGELA MERKEL? - La Tribune
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L’ENQUÊTE<br />
LES FAITS Mal bâti, l’ancien<br />
pôle vinylique d’Arkema est<br />
tombé dans les mains d’un<br />
repreneur peu fiable qui n’a pas<br />
mis un euro dans l’aaire. Les<br />
candidats à la reprise doivent<br />
remettre leur ore le 14 juin.<br />
LES ENJEUX <strong>La</strong> chute de Kem<br />
One serait dramatique, car elle<br />
pourrait provoquer un eet<br />
domino susceptible d’entraîner<br />
toute la filière chimique<br />
française vers la débâcle. Un<br />
scénario qui inquiète aussi bien<br />
les syndicats que Bercy.<br />
MARIE-ANNICK DEPAGNEUX<br />
ET ODILE ESPOSITO<br />
«<br />
Gary Klesch,<br />
escroc. » Une<br />
photo à l’appui,<br />
les salariés<br />
de Kem One<br />
ne s’embarrassent pas de nuances<br />
ce mardi 9 avril 2013, fustigeant à<br />
nouveau leur actionnaire devant le<br />
palais de justice de Lyon où se tient<br />
une audience au tribunal de commerce.<br />
À l’ordre du jour, le financement<br />
de la période d’observation<br />
après le placement en redressement<br />
judiciaire, le 27 mars dernier, de la<br />
partie amont de l’ancien pôle vinylique<br />
d’Arkema concernant sept<br />
usines et 1 300 employés. Ceux-ci<br />
en veulent aussi au groupe présidé<br />
par Thierry Le Héna de les avoir<br />
vendus à cet homme d’aaires américain,<br />
installé à Genève. « C’est une<br />
machine à fermer des boîtes », martèle<br />
Grégory Benedetti, délégué<br />
syndical central FO à <strong>La</strong>vera, l’un<br />
des sites de Kem One.<br />
De fait, ce financier né en 1947<br />
dans l’Ohio s’est spécialisé peu à<br />
peu dans l’achat et le retournement<br />
d’entreprises ou d’activités en dicultés,<br />
un exercice forcément<br />
délicat auquel il s’essaiera aux<br />
États-Unis, à la fin des années 1970,<br />
en restructurant, pour le compte du<br />
Trésor américain, plusieurs compagnies<br />
ferroviaires. Puis, au début de<br />
la décennie 1990, il se tourne vers<br />
l’Europe. Comme actionnaire<br />
minoritaire, il joue les agitateurs<br />
dans les dossiers Eurotunnel ou<br />
Eurodisney.<br />
UN REPRENEUR PEU<br />
APPRÉCIÉ DES SYNDICATS<br />
En 1998 il met la main sur les<br />
chaussures Myrys et les collants<br />
Gerbe, avec une conviction : « Le<br />
label France est sous-évalué au<br />
regard de la qualité, de la création et<br />
des coûts de fabrication par rapport<br />
à ceux pratiqués en Allemagne ou<br />
aux États-Unis », explique-t-il à <strong>La</strong><br />
<strong>Tribune</strong>. Du Montebourg<br />
avant l’heure !<br />
<strong>La</strong>s, Klesch jettera<br />
l’éponge deux ans plus<br />
tard. Peu à peu, il<br />
s’oriente vers la<br />
reprise d’activités<br />
dont les grands<br />
groupes veulent se<br />
débarrasser : en 2007,<br />
le géant canadien de<br />
l’aluminium Alcan lui cède son<br />
usine néerlandaise de Vlissingen<br />
(700 salariés), héritée de Pechiney<br />
et pénalisée par la flambée des<br />
coûts de l’électricité. En 2009,<br />
Klesch persévère dans ce secteur en<br />
achetant à l’indien Tata Steel deux<br />
anciennes usines du Britannique<br />
Corus. Il jette aussi son dévolu sur<br />
des raneries et reprend en 2010 à<br />
Shell son unité de Heide, en Allemagne.<br />
Avant de s’intéresser, début<br />
2012, à… la ranerie Petroplus de<br />
Petit-Couronne, en Normandie.<br />
« Lorsque Gary Klesch est venu<br />
nous voir, fin 2010, pour s’informer<br />
sur notre pôle vinylique, il s’est présenté<br />
comme un spécialiste des<br />
grandes commodités, indique Gilles<br />
Galinier, directeur de la communication<br />
externe d’Arkema. Il avait<br />
fait des deals sérieux avec Alcan,<br />
Shell et Corus et n’était pas un<br />
inconnu des milieux d’aaires. » Les<br />
syndicats, eux, sont méfiants. D’autant<br />
qu’en décembre 2011, en pleine<br />
négociation avec Arkema, Klesch<br />
dépose le bilan de l’usine d’alumi-<br />
nium de Vlissingen, rebaptisée<br />
Zalco. « Cela nous a gênés dans le<br />
processus social », reconnaît Gilles<br />
Galinier. « <strong>La</strong> raison invoquée par<br />
Klesch est une taxation inattendue,<br />
imposée par le pays ou la région, sur<br />
le coût de transport de l’électricité »,<br />
a expliqué Bernard Boyer, le directeur<br />
de la stratégie d’Arkema,<br />
devant la Commission des aaires<br />
économiques de l’Assemblée nationale,<br />
le 3 avril dernier. Pas de quoi<br />
rassurer les salariés. Dans son<br />
rapport remis en mars 2012 au<br />
comité d’entreprise, le cabinet<br />
Secafi Alpha constate ainsi que,<br />
« malgré une présence affirmée<br />
depuis les années 1990 dans la<br />
reprise d’entreprises, Klesch n’est<br />
pas parvenu à s’imposer comme<br />
redresseur d’entreprises en diculté<br />
comme Butler Capital ou Caravelle,<br />
LA TRIBUNE VENDREDI 17 MAI 2013<br />
DÉSINDUSTRIALISATION Après la sidérurgie, c’est au tour de la filière chim<br />
KEM ONE, UN DÉSASTR<br />
Après les aaires<br />
Mittal et Dailymotion,<br />
le cas de Kem One<br />
relance le débat sur la<br />
fiabilité d’actionnaires<br />
sans aectio societatis.<br />
© DR<br />
Né en 1947 dans l’Ohio, le financier Gary Klesch, repreneur du pôle vinylique d’Arkema,<br />
s’est spécialisé dans le rachat d’entreprises en diculté. [ DENIS BALIBOUSE / REUTERS]<br />
«Gary Klesch<br />
[le repreneur<br />
de Kem One] est<br />
une machine à<br />
fermer des boîtes. »<br />
GRÉGORY BENEDETTI,<br />
DÉLÉGUÉ SYNDICAL<br />
CENTRAL FO À LAVERA<br />
«Gary Klesch<br />
n’était<br />
pas un inconnu<br />
des milieux<br />
d’aaires. »<br />
GILLES GALINIER, DIRECTEUR<br />
DE LA COMMUNICATION EXTERNE<br />
D’ARKEMA<br />
ni à constituer un petit groupe composé<br />
de sociétés qu’il aurait souhaité<br />
conserver plusieurs années ».<br />
Malgré ces réserves, Arkema<br />
boucle la cession en juillet 2012. Le<br />
pôle, rebaptisé Kem One, se compose<br />
de deux entités juridiques,<br />
l’une regroupant l’activité amont de<br />
fabrication de chlore, de soude et de<br />
PVC, et l’autre la production de profilés,<br />
tubes et mélanges (compounds),<br />
à destination surtout du<br />
bâtiment et de l’automobile. Très<br />
vite, toutefois, l’amont connaît des<br />
dicultés, jusqu’au dépôt de bilan<br />
de la fin de mars. Les deux camps se<br />
rejettent mutuellement la responsabilité<br />
de la débâcle.<br />
Gary Klesch « a acheté cette<br />
branche sur la base d’un budget<br />
prévisionnel non conforme à la réalité<br />
», assure Alain Ribeyre, avocat<br />
© HEXIMAGE/ARKEMA