QUI EST VRAIMENT ANGELA MERKEL? - La Tribune
QUI EST VRAIMENT ANGELA MERKEL? - La Tribune
QUI EST VRAIMENT ANGELA MERKEL? - La Tribune
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
8<br />
LE BUZZ<br />
IL A OSÉ LE DIRE<br />
LA TRIBUNE VENDREDI 17 MAI 2013<br />
« J’ai dirigé Bercy par le passé et c’est vrai que Bercy a besoin d’un patron.<br />
Là, vous [en] avez plusieurs et quelle que soit la qualité des hommes et des femmes et leur degré<br />
d’entente, je pense qu’une coordination plus forte serait utile. » LAURENT FABIUS, SUR RTL, LE 14 MAI 2013<br />
L’ŒIL DE PHILIPPE MABILLE<br />
DIRECTEUR ADJOINT DE LA RÉDACTION<br />
France de jeunes et Allemagne de vieux<br />
C ’est<br />
la nouvelle thèse à la mode au sein du<br />
parti socialiste qui inspire le discours antiallemand<br />
et anti-Merkel. Entre l’Allemagne<br />
et la France, on pourrait même dire entre<br />
l’Europe du Nord et l’Europe du Sud, les<br />
intérêts divergeraient de plus en plus parce que la démographie<br />
européenne est coupée en deux.<br />
En gros, comme l’a expliqué récemment<br />
Arnaud Montebourg devant une assemblée<br />
choisie – le dîner du Cercle de la<br />
Revue des deux mondes, présidé par<br />
Marc <strong>La</strong>dreit de <strong>La</strong>charrière, le 25 avril<br />
dernier –, un nouveau mur serait en<br />
train de s’ériger en Europe, entre les<br />
pays jeunes et les pays vieux.<br />
LE DIVORCE CROISSANT que l’on<br />
constate entre une Allemagne vieillissante<br />
tétanisée par la crainte d’une inflation,<br />
qui a besoin de taux d’intérêt élevés<br />
et d’une monnaie forte pour ses rentiers,<br />
et une France à la tête des pays « jeunes » du Sud, qui a besoin<br />
de taux bas et d’une monnaie « faible » pour relever son<br />
industrie, serait le nouvel horizon irréconciliable de la politique<br />
européenne. Cela va bien plus loin encore que la critique<br />
de l’austérité, réelle en Grèce, au Portugal, en Espagne<br />
et en Italie, encore largement supposée en France où, à part<br />
sur le plan fiscal, on cherche encore quelles mesures dures<br />
ont bien pu être prises par François Hollande depuis un an.<br />
Ce nouveau discours, dont les arguments démographiques<br />
sont fondés – l’Allemagne elle-même reconnaît que la politique<br />
familiale est la seule vraie réussite du modèle français<br />
«Les déficits, ce<br />
sont d’abord et<br />
avant tout des déficits<br />
d’emplois. Remporter<br />
cette bataille, comme<br />
l’Allemagne a su<br />
le faire, est le seul<br />
combat qui compte. »<br />
et constitue son principal échec – est intéressant. Mais il n’est<br />
guère opérant, sauf à en conclure un divorce inévitable à<br />
terme entre les deux pays, c’est-à-dire l’éclatement de l’euro<br />
par la sortie de l’un ou de l’autre des partenaires. Or, ni la<br />
France, ni l’Allemagne, qui fêtent cette année le cinquantième<br />
anniversaire du traité de l’Élysée, ne le souhaitent.<br />
L’avenir est plus constitué de ce qui nous<br />
rapproche que de ce qui nous divise.<br />
François Hollande, qui a rencontré mercredi<br />
15 mai toute la Commission européenne,<br />
avant de revenir à Paris défendre<br />
ses choix devant des parlementaires<br />
socialistes au bord de la rupture avec son<br />
gouvernement et de tenir sa deuxième<br />
conférence de presse à l’Élysée, va devoir<br />
lutter contre cette nouvelle doxa antiallemande,<br />
qui ne change rien à la réalité<br />
française. Avec ou sans l’Allemagne, avec<br />
ou sans l’euro, la France a une dette qui<br />
dépassera, avant le milieu de la décennie,<br />
les 100 % de sa richesse nationale, et des<br />
déficits qu’il faudra bien combler.<br />
Plutôt qu’à un divorce avec l’Allemagne, c’est plutôt à une<br />
explication de texte avec sa propre majorité que le chef de<br />
l’État est condamné pour les mois qui viennent. À moins qu’il<br />
ne soit d’accord avec Arnaud Montebourg, mais alors il va<br />
falloir qu’il le dise à Jean-Marc Ayrault ! Dans son combat<br />
pour réorienter l’Europe, François Hollande a pourtant déjà<br />
remporté une victoire inattendue puisque Bruxelles vient<br />
de donner deux ans à la France pour revenir sous les 3 % du<br />
PIB de déficit. Un cadeau inespéré qui montre que la commission<br />
de Bruxelles n’est pas aussi stupide et bornée qu’on<br />
WEB TV / LA TRIBUNE DES DÉCIDEURS en partenariat avec<br />
Le Premier ministre doit présenter<br />
un plan d’investissement pour la<br />
santé. Qu’en attendez-vous ?<br />
Il faut absolument que soit pris en compte<br />
le secteur du dispositif médical. <strong>La</strong> santé,<br />
ce n’est pas que les médicaments. Les pansements,<br />
la radioscopie, la visite à domicile…<br />
Toutes ces activités connaissent une<br />
croissance importante, et méritent l’attention<br />
des pouvoirs publics. De plus, en<br />
France l’innovation dans la santé est difficile<br />
: quand en Allemagne on peut lancer<br />
un produit innovant en un jour, en France,<br />
cela peut prendre jusqu’à deux ans, à cause<br />
d’une législation compliquée, parfois<br />
même contradictoire. Il faudrait mettre<br />
un grand coup de pied là-dedans, pour que<br />
les entreprises françaises puissent jouir<br />
de leur propre marché pour mieux exporter.<br />
Et mettre fin à ce que j’appelle les<br />
droits de douane à l’envers. De plus, nous<br />
avons en France la main-d’œuvre la plus<br />
chère du monde. Il faut donc faire les produits<br />
les plus innovants et les plus chers<br />
du monde.<br />
Comment faire des économies ?<br />
On travaille sur des solutions de télémédecine,<br />
adaptées au besoin croissant des patients<br />
à domicile. C’est un gisement d’économies<br />
énorme au regard du coût de<br />
l’hospitalisation. Cela peut également pas-<br />
ser par la création d’« aiguilleurs médicaux<br />
» qui éviteraient les erreurs de service,<br />
les transferts coûteux. Une autre voie serait<br />
la démocratisation de l’automédication<br />
pour les « petits risques » – rhumes, allergies…<br />
– car le pharmacien est compétent<br />
pour conseiller les patients sur ces pathologies.<br />
Cela éviterait le triple coût d’une<br />
visite chez le médecin, du soin et de l’absentéisme.<br />
On peut générer 1 milliard d’euros<br />
d’économies grâce à cette médication responsable.<br />
Comment voyez-vous l’avenir pour<br />
l’industrie pharmaceutique ?<br />
Il y a un réel potentiel de croissance en<br />
a bien voulu le dire, et que l’Allemagne de Merkel n’est ni<br />
intransigeante, ni égoïste. Elle est juste inquiète des retards<br />
français. Avec ce délai, le gouvernement Ayrault, même<br />
remanié avec enfin un vrai (et nouveau ?) patron à Bercy, a<br />
tout le temps nécessaire pour prendre les mesures internes<br />
susceptibles de ranimer une croissance défaillante.<br />
PRENONS LE DOSSIER DES RETRAITES, qui fait si peur<br />
qu’on semble s’orienter vers une simple réforme financière<br />
destinée à reboucher un trou de 20 milliards d’euros à<br />
l’horizon 2020. Redonner aux Français de la visibilité à<br />
long terme sur ce sujet clé est pourtant le meilleur moyen<br />
de ramener la confiance qui fait défaut à un pays en grande<br />
dépression. Les entreprises se plaignent de manquer de<br />
prévisibilité du fait d’une politique fiscale et sociale qui<br />
change tout le temps. Mais pour les ménages, c’est la même<br />
chose. Qui peut dire sérieusement qu’une réforme des<br />
retraites est une contrainte imposée par le grand méchant<br />
marché, le grand méchant Bruxelles et la grande méchante<br />
Merkel, dont nous racontons la vie dans ce numéro.<br />
C’est bien au contraire une opportunité pour remettre à<br />
plat un problème que nous sommes l’un des rares pays à<br />
devoir remettre sur la table tous les cinq ans, voire moins<br />
(2003, 2008, 2010). Pourtant, comme on l’a évoqué plus<br />
haut, la France bénéficie dans ce domaine d’une démographie<br />
bien plus favorable que celle de l’Allemagne. Mais<br />
une telle réforme n’est possible que si la France résout<br />
en même temps son problème d’emploi. Tout est lié. Les<br />
déficits, ce sont d’abord et avant tout des déficits d’emplois.<br />
Remporter cette bataille, comme l’Allemagne a su<br />
le faire avant nous, est le seul combat qui compte. Reste<br />
à s’en donner vraiment les moyens. <br />
« L’automédication, c’est 1 milliard d’euros d’économies »<br />
Pierre Moustial, DG des opérations de VivaSanté, et directeur des laboratoires Urgo,<br />
a répondu aux questions des internautes dans le cadre de l’émission de latribune.fr.<br />
France sur le secteur du dispositif médical.<br />
Les solutions techniques de start-up qui<br />
révolutionnent la biopsie par exemple, ou<br />
qui reconstituent des os avec des biomatériaux<br />
représentent, un levier incroyable.<br />
Il faut préserver les atouts de la France, ces<br />
PME, ces start-up qui sont bons et complémentaires<br />
en physique, en chimie, en<br />
biologie, en électronique. C’est cette<br />
alliance qui fait la diérence. Si on montre<br />
que l’on peut augmenter l’espérance de vie<br />
en gardant les gens en bonne santé, on<br />
réussira à changer l’image de l’industrie<br />
pharmaceutique. <br />
Interview réalisée par<br />
Thomas Blard et Philippe Mabille<br />
© DR<br />
© VIVASANTE