PLAn 2006-6 - Ordre des ingénieurs du Québec

FUTURES ÉTUDIANTES EN GÉNIE : RÉPONDRE À LEURS ATTENTES
Par Jeanne Morazain
Elles aiment les sciences, plus particulièrement
la physique et les mathématiques.
Elles cherchent à relever des défis et à
régler des problèmes concrets. Les activités
où elles peuvent mettre à profit leurs
connaissances les attirent. Elles participent
aux Expo-sciences, au concours scientifique
et technique Science, on tourne!,
au jeu-questionnaire Génies en herbe.
Elles, ce sont des collégiennes qui ont
participé au programme Futures ingénieures
2006. Ces traits communs rassortent
des entrevues réalisées avec six
d'entre elles. Sans surprise, leur profil
correspond à celui de la dizaine d'étudiantes
en génie également interviewées.
Sollicitez les jeunes femmes présentant
ce profil et la courbe des inscriptions
féminines dans les facultés de génie, qui
est en baisse depuis 2000, remontera,
serait-on tenté de dire. L'équation n'est
pas si simple. Encore faut-il que ces jeunes
qui envisagent de faire carrière comme
ingénieures perçoivent que l'enseignement
et la pratique du génie pourront répondre
à leurs valeurs et à leurs attentes.
La présence des jeunes femmes s'accroît
Si elles choisissent d'étudier en génie
plutôt qu'en mathématiques ou en physique
par exemple, c'est parce que le
génie est une science appliquée. La
théorie pour la théorie, très peu pour
elles. Elles ont besoin de travailler sur
des projets concrets - pour certaines,
cela implique d'effectuer surtout du travail
de terrain - et de faire profiter la
société de leur savoir. Ainsi, elles auront le
sentiment d'être utiles et cela leur importe,
car la notion de service à la population
est primordiale dans leur esprit.
L'environnement est au centre de
leurs préoccupations. D'ailleurs, elles
n'envisagent la pratique du génie que
dans une perspective de développement
durable. Dès lors, la technologie devient
un moyen d'atteindre cet objectif.
Elles ne s'imaginent pas évoluant en
vase clos. La pratique du génie doit être
l'occasion de multiplier les contacts
humains, de nouer de solides collaborations
et de travailler en équipes multidisciplinaires
avec des ingénieurs d'autres
champs de spécialisation que le leur, des
scientifiques de plusieurs disciplines, des
gestionnaires et professionnels de tout
horizon.
Elles n'ont pas peur des responsabilités
et espèrent qu'on leur en confiera
relativement tôt dans leur carrière. Elles
souhaitent disposer d'une bonne marge
d'autonomie, être en mesure d'aménager
elles-mêmes leurs tâches et leurs
horaires, être en situation de prendre
des décisions. Bien sûr, elles savent qu'il
faut travailler fort pour faire sa marque,
mais elles sont décidées à y mettre tous
les efforts requis.
Cela dit, la carrière n'est pas tout.
Elles accordent une grande importance
à la qualité de vie. Elles veulent
avoir du temps pour exercer diverses
activités sportives ou culturelles et réaliser
d'autres ambitions, pour entretenir
des liens d'amitié et voyager, au moyen
de leur travail ou non. La possibilité de
concilier travail et famille fait aussi partie
des attentes qu'elles entretiennent à
l'égard de leurs futurs employeurs.
Ont-elles des craintes liées au fait
qu'elles sont des femmes? Comme tout
le monde, elles ont entendu des histoires
malheureuses de discrimination et de
sexisme, mais elles croient que le milieu
de l'ingénierie a évolué et qu'il est prêt à
accueillir des ingénieures en plus grand
nombre. Même que cela pourrait s'avérer
avantageux auprès des entreprises soucieuses
de leur image. Ce qu'elles craignent
bien davantage, c'est la précarité
Il n'y a aucun doute, elles rêvent d'être
ingénieures, et ce rêve est bien ancré.
Alors que le pourcentage des inscriptions féminines au baccalauréat
en génie est passé de 19,1 % en 2000-2001 à 16,4 % en 2005-2006,
la proportion de filles qui affichent leur goût pour les sciences s'élargit.
Elles sont en effet de plus en plus nombreuses à s'inscrire aux
compétitions scientifiques. Depuis 2004, la participation féminine au
concours Science, on tourne! se maintient au-dessus de 20 %. En
2005, plus de 40 % des personnes ayant pris part aux Expo-sciences
étaient des exposantes ; en 2006, la finale québécoise accueillait une
majorité de filles, soit 92 sur un total de 151 participants.
d'emploi qui semble fréquente dans
plusieurs milieux de travail. Il faut une
certaine stabilité, croient-elles, pour réaliser
ses ambitions professionnelles et se donner
une qualité de vie.
Il n'y a aucun doute, elles rêvent d'être
ingénieures, et ce rêve est bien ancré.
Mais présentez-leur le génie comme une
pratique peu stimulante, répétitive, une
profession qui s'exerce en solitaire avec
pour seul compagnon un ordinateur, où
les tâches administratives éloignent de
la science et où la compétition l'emporte
sur la collaboration, une pratique sans
retombées sociales et environnementales
positives, et elles s'en éloigneront. À bon
entendeur, salut!
Merci aux étudiantes en génie qui ont
contribué à dresser ce portrait par leurs témoignages
: Emilie Berrouard (génie civil, Université
Laval), Karine Dionne (génie électrique, Université
de Sherbrooke), Anita Douyon (génie logiciel,
Polytechnique), Claudine Fortin (génie géologique,
Université Laval), Véronique Fournier
(génie mécanique, Université de Sherbrooke),
Lyne juneau (production automatisée, ETS),
Émilie Langlois (génie mécanique, Polytechnique),
Ahlem Masmoudi (génie logiciel, Polytechnique),
Simone Renaud-Boivin (génie mécanique,
Université de Sherbrooke), Safaa Sebak (génie
électrique, Université Concordia). Merci également
à Alexandra Duron, Geneviève Gariépy,
Marie-Eve Isabel, Jennifer Lemieux, Emilie Monette
et Amélie Therrien, participantes au programme
Futures ingénieures 2006.
' Ce programme est une initiative du Comité
national Femmes en ingénierie réalisée en
partenariat avec la Chaire Marianne-
Mareschal de l'École Polytechnique de
Montréal. Voir la chronique « Femmes et
génie» de l'édition de janvier-février 2006
de PLAN.
40 • PLAN Août-septembre 2006 Cette page est produite par le Comité Femmes en ingénierie.