Numéro 60--- ÉTÉ 2007 - Vho

GAZETTE DU GOLFE ET DES BANLIEUES / 60 / ÉTÉ 2007
il demanda d’abord s’il y avait des Juifs parmi eux ; la rencontre ne se poursuivit qu’après qu’il
eut reçu l’assurance qu’aucun des officiers n’était juif. Avant la venue des trois officiers, l’imam
Mahdi Al-Jumeili avait déclaré que « le judaïsme et la franc-maçonnerie sont en guerre
contre l’islam ».
Les Juifs (« al-yahoud ») sont, rapporte Asia Times, invoqués « partout » en Irak. « Pour
un journaliste, il ne se passe pas un jour sans qu’il ait entendu parler des Juifs et d’Israël.
Même les chauffeurs de taxi parlent des Juifs lorsqu’ils se plaignent de l’occupation. » Un
chauffeur de taxi déclare : « Nous sommes des Musulmans, et des Juifs viennent dans notre
pays. Ce sont tous des Juifs. Les Américains sont tous des Juifs et des mercenaires. Nous
connaissons leur religion. » Un autre chauffeur : « L’Amérique et les Juifs, c’est la même
chose… Ils ont les mêmes objectifs et la même religion. » Un troisième chauffeur de taxi
explique que si l’ambassade de Jordanie a été la cible d’un attentat, c’est parce qu’elle
organisait l’immigration de Juifs en Irak.
« tuez les Juifs »
Sur un marché d’Abu Ghraib, une ville à l’ouest de Bagdad, un homme déclare à
l’envoyé spécial d’Asia Times : « Au moins Saddam était un Musulman. Est-ce que ce n’est
pas mieux que les Juifs ’ Les Américains sont des Juifs, ce qu’ils font est juif. » Le chef de la
prière à la mosquée locale surenchérit : « Ces occupants, ce sont tous des Juifs et des
Chrétiens. »
Des inscriptions sur les murs de la mosquée Abu Hanifa mettent en garde les Irakiens :
des Juifs sont installés à l’hôtel Ekal, et ils se préparent à acheter des terres, comme ils l’ont
fait en Palestine, afin d’expulser les Irakiens de leur pays. Le journaliste se rend à l’hôtel Ekal :
il est fermé pour travaux, personne n’y habite. Mais les étudiants de l’université locale
continuent à distribuer des tracts mettant en garde les Irakiens contre les agents juifs qui
viennent acheter des terres.
Sur les murs de la mosquée de Maalef, à Bagdad, on lit en grosses lettres : « Tuez les
Juifs ». Également à Bagdad, dans la mosquée Rahman située dans le quartier Mansour, le
cheikh Ali Al-Ibrahimi dénonce devant ses ouailles une récente décision des autorités
irakiennes sur l’obtention de la nationalité. « Si les Juifs s’installent en Irak, ils deviendront des
citoyens irakiens, ils prendront le contrôle de l’Irak et nous serons leurs invités », déclare-t-il. Il
explique que les fondateurs des États-Unis craignaient de laisser entrer chez eux « les
détenteurs d’argent », mais que « c’est ce qui s’est produit lorsque les Juifs sont venus : les
Américains et les autres sont devenus leurs invités ».
les « protocoles »
À Sadr City, le chef de la mosquée Musin, Seyid Hassan Naji Al-Musawi, annonce que
le Mahdi (équivalent du Messie) viendra bientôt, « et quand il viendra il tuera les chefs juifs ».
Qui sont ces chefs ’ Les Américains d’abord, dit le leader chiite, mais pas seulement : Jules
César était juif, dit-il, et les Romains aussi. Et il cite un verset du Coran sur la défaite finale
des Juifs.
Le journaliste retrouve chez les Irakiens la croyance, répandue dans l’ensemble du
monde musulman [y compris sur les sites islamistes francophones –Arche] selon laquelle le
logo Coca-Cola devient dans un miroir « Non à La Mecque, Non à Mahomet » – preuve que
Coca-Cola appartient à des Juifs. Quant aux Protocoles des Sages de Sion, ils sont, dit-il, «
omniprésents » sous la forme d’une traduction arabe en deux volumes.
Autres ouvrages vendus dans les rues de Bagdad : le livre Les crimes des Juifs, et un
livre intitulé Les drogues et les Fils du Diable (les « Fils du Diable » dont il est question ici
sont les Juifs). On peut aussi acheter un livre en langue kurde, Dans les mâchoires des Juifs,
illustré d’une étoile de David et d’un monstre dégoulinant de sang. Le Conseil suprême de la
Révolution islamique, qui est l’une des composantes de l’Autorité provisoire mise en place par
les Américains, distribue un livre intitulé Nuits juives, consacré à la réfutation de diverses
affirmations des Juifs concernant leur propre histoire. Dans la ville de Najaf, on peut acheter
dans les bureaux du dirigeant religieux Seyid Muqtada Sadr un livre consacré à Ali et les
Juifs.
La presse irakienne semble, elle aussi, obsédée par les Juifs. Une des croyances les plus
répandues est que les Juifs s’apprêtent à revenir en masse [et peut-être à réclamer les biens
dont ils ont été dépouillés lors de leur départ forcé – Arche]. Le quotidien Al-Yawm Al-Aakher
écrit que « la campagne frénétique pour réinstaller les Juifs a suscité le mécontentement des
Irakiens, particulièrement les hommes de religion ». Un journal nommé Al-Adala, qui
appartient au Conseil suprême de la Révolution islamique, met en garde contre « un certain
nombre de Juifs qui essaient d’acheter des usines à Bagdad ».
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