20.01.2015 Views

cites texte.pdf - IFEA

cites texte.pdf - IFEA

cites texte.pdf - IFEA

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

déjà. 85. Donc, avant les 90, ça a commencé à changer très fort.<br />

Dans le discours de M. Umut, se repetent les notions opposées de « maintenant » et « avant ». Son<br />

« avant », ce qu'il précise à notre demande, concerne surtout la période des années 60-70, alors la<br />

période de sa jeunesse scolaire et étudiante. Une certaine coupure sur l'axe de temps constitue aussi<br />

l'année 80 – la date du coup d'Etat en Turquie et au même temps d'une douloureuse expérience<br />

personnelle (histoire d'agression dans la rue de Tarabya).<br />

Notre conversation concerne surtout cet espace des souvenirs, ayant pour but de déterminer la<br />

présence de la ville idéale dans la mémoire et l'imaginaire de l'interviewé. Nous apprenons que pour<br />

M. Umut, cet Istanbul idéal prend la forme du quartier asiatique 19 de Moda aux années 60 – vivante,<br />

habité par les gens ouverts et directs, et – ce qui est très importante de point de vue de comparaison<br />

avec le discours publicitaire – non pollué: On se baignait dans la mer d'Istanbul, au Marmara, au<br />

Bosphore, la chose qui n'est pas possible maintenant, avec toute la pollution... justement, il y a<br />

quelque chose qui est très... on doit parler aussi de ça, donc – la ville était beaucoup plus propre.<br />

Bon, on polluait, mais comme il y avait beaucoup moins de gens, on polluait beaucoup moins.<br />

D'ailleurs, on voit que le fait de la pollution est associé avec le fait d'immigration en ville (opinion<br />

fréquente selon Ayse Öncü 20 , qui ajoute que dans le cas d'Istanbul on considére non seulement la<br />

pollution environnementale, mais aussi sociale et culturelle... )M. Umut admet d'ailleurs que cette<br />

notion de « pureté » et « propreté » juxtaposée à l'obsession d'éviter la « pollution » est surtout le<br />

produit culturel, et surtout effet d'éducation (Il y avait aussi un petit poulailler dans notre jardin, je<br />

jouais beaucoup aussi avec des poules, à ce moment-là il n'y avait pas de grippe aviaire (rires), donc<br />

on pouvait jouer avec les animaux domestiques, avec des poules comme ça, plus facilement, plus à<br />

l'aise. Et puis, j'allais chercher des oeufs que la poule avait pondue et sans les cuire,je buvais ça par<br />

exemple... (rires) des choses qu'on ne fait plus maintenant, c'est incroyable maintenant, vous vous<br />

imaginez que... bon, une de nos filles qui fasse ça, même plus petites elles ne l'auraient jamais fait<br />

parce que l'éducation a beaucoup changé maintenant: fais pas ça, touche pas ça, je ne sais pas<br />

quoi...). Néanmoins, cette « propreté » de la ville d' »avant » a permis de vivre à M. Umut et ses amis<br />

de vivre une enfance « en contact avec la nature » (par « nature » ayant compris les jardins privés, la<br />

plage de la ville etc. - donc toujours les formes « urbanisées » de la nature): On était.. je trouve qu'on<br />

était plus en contact avec la nature, en tant qu'enfants. Et nous avons eu la chance d'être comme ça,<br />

d'ailleurs. Cette notion de la vie « saine » entraîne celle de la « liberté » - en opposition de la vie<br />

« non-libre » d'aujourd'hui (en tant que limitée d'un côté par les contraintes d'origine<br />

environnementale, comme la pollution – de l'autre, celles d'origine sociale, comme le séparatisme ou<br />

l'éclatement de la vie communautaire): Parce que, bon: la vie était plus facile aussi, la vie était plus<br />

saine. Il n'y avait pas autant de contraintes autour de nous, on était plus libre comme enfant que<br />

maintenant.<br />

On aborde à plusieures reprises le problématique du voisinage. M.Umut et sa fille repetent les mêmes<br />

opinions qu'ont déjà partagé avec nous Mme et M. Aytürk: le voisinage est presque inexistant. (Le<br />

contact de voisinage a beaucoup diminué maintenant. Surtout dans les cités comme ça, des grands<br />

bâtiments, où il y a vingt étages, où il y a quatre appartements par l'étage, ce sont des immeubles<br />

immenses, les gens se voient à peine, ils en se connaissent même pas entre eux. - Donc ici vous n'avez<br />

pas de voisins avec lesquels vous maintiendriez des contacts - Pas beaucoup quand même, ça a<br />

changé; avant il n'en avait pas beaucoup, c'est un peu mieux maintenant. Mais c'est pas comme<br />

avant, c'est pas... si on se voit une fois tous les trois mois, c'est déjà... c'est déjà bien, quoi (rires).<br />

Mais c'est pas beaucoup, quoi. - Donc normalement, quand les gens se croisent, ils se disent juste<br />

bonjour...- A peine. - S'il y a quelqu'un par exemple que vous ne connaissez pas, qui marche, qui<br />

descend alors que nous montons, ils en se regardent même pas, ils en se disent même pas bonjour.<br />

Tandis qu'avant...) M. Umut y oppose la situation dans le passé: Avant, comme on se parlait, on se<br />

comprenait beaucoup plus. Beaucoup plus. Bon, c'est pas comme ça qu'on aimait tout le monde, il y<br />

avait des gens qu'on... que le courant ne passait pas, qu'on aimait beaucoup moins, mais il n'y avait<br />

19 Autre notion caractéristique pour Istanbul pour désigner l'espace: “en face” veut dire le côté asiatique, si l'on se trouve<br />

au côté européen, et vice versa.<br />

20 ÖNCU, A., WEYLAND, P., Space, Culture and Power: New Identities in Globalizing Cities<br />

21

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!