Bordeaux culture

FOCUS
Sésame ouvre-toi
Dans leurs murs, dans leur
fonctionnement quotidien, toujours
plus automatisé et dématérialisé,
les bibliothèques sont appelées à se
libérer, leurs métiers, à se réinventer.
La diversité des espaces et des
activités proposées vont rassembler
amateurs, curieux et spécialistes,
de toutes générations. Le bibliothécaire,
lui-même, ne sera plus seulement
opérateur ou agent : à l’instar
d’un libraire, il deviendra conseiller,
s’investissant davantage dans la
mise en espace de ses collections et
de leur médiation envers le public.
Ecouté et à l’écoute, il va s’impliquer
dans un contact et un échange
tangible avec le visiteur en face à
face ou à distance, via Facebook,
des blogs ou le portail documentaire
sur Internet, véritable bibliothèque
bis, accessible de jour comme de
nuit. Le bibliothécaire instaure
ainsi un dialogue sur l’œuvre, incite
aux commentaires, sans finalité
marchande, se remet en question.
Quant au document et à l’œuvre,
rendus plus accessibles, ils seront
désacralisés, accoutumant chacun
à une nouvelle proximité devenue
indispensable.
Cette ouverture induit une implication
des bibliothèques dans leur
force d’incitation et de proposition
culturelle. Par une plus grande
souplesse des modes de consultation
et de prêts, par la création
d’atmosphères propres à chaque
type d’activité, par l’ouverture
d’espaces éphémères au plus près
des Bordelais, les bibliothèques
offriront à chacun le choix de son
plaisir et de sa découverte. Ouvertes
à des activités nouvelles, dotées
d’une programmation vivante, avec
ses récurrences et ses impromptus,
elles seront un rendez-vous où
l’inattendu sert une approche dynamique
des outils de connaissances
qu’elles portent en elles.
Une légèreté de l’être
Aussi, dans la rue et sur les quais,
les bibliothèques bordelaises ont
déjà commencé à lancer un message
ludique, festif et souvent espiègle
au travers des opérations Bibliobato
ou Biblio-sport. Dernière née,
Bi.Bo (Bibliothèque de Bordeaux)
est un blog interactif auquel on
peut accéder directement de son
profil Facebook. En clin d’œil à la
presse féminine, il s’inspire des
psycho-tests proposés l’été dans
les magazines, à consommer de
préférence sur un transat, lunettes
noires sur le front. Ici les questions
renvoient, sur le mode du jeu et de
la découverte de soi, à des connaissances
partagées. Détournement du
langage et titillement de curiosité
tracent un chemin de traverse vers
les livres et les œuvres. Cette
proposition, qui joue du superficiel
à contre-emploi, vise, comme
toutes les initiatives ponctuelles
ou impromptues menées par les
bibliothèques municipales à réduire
la distance entre lecture et lecteurs,
effectifs ou potentiels, à favoriser
une approche spontanée, inscrite
dans une mission, en profondeur,
de sensibilisation, une relation
de confiance et d’échange. Cette
souplesse renforcée n’abroge en
aucun cas l’application et le respect
d’un règlement nécessaire. Mais elle
souligne l’évolution voulue par la
ville dans la qualité des liens entre
bibliothèques et usagers.
In fine, au travers du vaste
programme engagé, c’est bien par
l’imagination et la surprise, que la
Ville cherche à solliciter les appétits
de connaissance, instruments
souverains de cohésion. Ne perdant
jamais de vue la valeur sociale de
cette entreprise, elle apporte les
livres là où ils ne sont pas. Pour
divertir, informer et former, elle
multiplie leurs portages à domicile,
auprès notamment des personnes
âgées. Bordeaux, avec l’appui d’associations,
a également constitué
un réseau de « boîtes à livres », dans
son espace urbain, sans règlement
ni pré-usage, utilisant pour cela des
ouvrages déclassifiés et ceux que
déposent les lecteurs.
Ainsi, du Nord au Sud et d’une
rive à l’autre, la ville émaille son
réseau de bibliothèques, pallie ici
une carence, invente là une nouvelle
forme pour un nouvel usage. Plus
visibles, ces établissements viendront
insuffler, au cœur de quartiers
en mutation, une proposition culturelle
active et permanente, hors des
anciennes frontières de voisinage.
Par cette restructuration coordonnée,
Bordeaux fait vibrer sa
fibre culturelle. Elle souligne ainsi,
sur l’ensemble de son territoire, sa
volonté civique de faire du bien-être
et des plaisirs culturels des moteurs
de la vie bordelaise. Embrassant
les attitudes, les comportements
et accompagnant les appétences
de chacun, elle dessine pour tous,
à mesure humaine, une carte
citoyenne de la curiosité, des savoirs
et de l’imagination, qui n’a rien
d’imaginaire.
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