11.07.2015 Views

La motivation en débat - Site auxiliaire de l'IUFM de l'académie de ...

La motivation en débat - Site auxiliaire de l'IUFM de l'académie de ...

La motivation en débat - Site auxiliaire de l'IUFM de l'académie de ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> pour la LVE <strong>en</strong> débatFrançoise RABY<strong>La</strong>boratoire <strong>de</strong> linguistique et didactique <strong>de</strong>s langues étrangères et maternelles (LIDILEM)Université St<strong>en</strong>dhal Gr<strong>en</strong>oble3IUFM <strong>de</strong> Gr<strong>en</strong>oble-Université Joseph FourrierI have no spurTo prick the si<strong>de</strong>s of my int<strong>en</strong>t, but onlyVaulting ambition, which o’erleaps itself,And falls on th’other. . . .[Macbeth Act 1, Sc<strong>en</strong>e 7, pp. 25–28]IntroductionLorsque j’ai annoncé à certains collègues <strong>de</strong> mon anci<strong>en</strong> laboratoire, <strong>en</strong> 2002, que j’allaism’attaquer à la question <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> classe <strong>de</strong> langue, j’ai suscité une réaction qui n’ari<strong>en</strong>, à mes yeux, d’anecdotique, c’est pourquoi je me permets <strong>de</strong> les rapporter ici. <strong>La</strong> premièrefut <strong>de</strong> s’étonner que je change tout à coup d’objet d’étu<strong>de</strong> : « Ah, bon, mais tu ne t’intéresseplus à l’appr<strong>en</strong>tissage, alors ? ». Comme je <strong>de</strong>mandais à mon interlocuteur pourquoi il tirait unetelle conclusion <strong>de</strong> mon int<strong>en</strong>tion, il me répondit : « Mais parce que ça n’a ri<strong>en</strong> à voir ! ». Jecompris que, pour ce chercheur, le domaine <strong>de</strong> l’activité cognitive se limitait à celui <strong>de</strong>sconnaissances et que les autres dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’activité ne saurai<strong>en</strong>t participer à l’analyse. Or,j’ai toujours eu une vision large <strong>de</strong> la psychologie cognitive comme d’une sci<strong>en</strong>ce qui chercheà modéliser le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> notre cerveau pour nous ai<strong>de</strong>r à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t lesidées nous vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t, comm<strong>en</strong>t nous compr<strong>en</strong>ons le mon<strong>de</strong>, quel rôle jou<strong>en</strong>t nos croyances et1


nos affects dans nos relations au savoir et aux autres et surtout, comm<strong>en</strong>t tout cela interagit. Àpartir <strong>de</strong> là, après avoir cherché à savoir comm<strong>en</strong>t les professeurs et les élèves travaillai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>classe d’anglais ou <strong>de</strong> langue, il me semblait tout à fait normal d’intégrer à mes analyses <strong>de</strong>l’activité le pourquoi travaillai<strong>en</strong>t-ils (ou non !). 1 J’ai beaucoup réfléchi à ces critiques <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> comme sujet <strong>de</strong> recherche, critiques auxquelles je suis d’ailleurs <strong>en</strong>corequotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t confrontée. Paradoxalem<strong>en</strong>t, elles ont eu un effet positif sur mon travail carelles m’ont obligée à clarifier et à affirmer mon positionnem<strong>en</strong>t. Tout d’abord, <strong>en</strong> tant quedidactici<strong>en</strong>ne, j’ai besoin <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser que mes efforts sci<strong>en</strong>tifiques ne sont pas dénués d’unecertaine utilité sociale. Or, mon travail <strong>de</strong> formatrice à l’IUFM m’a convaincue qu’aujourd’hui,plus que jamais, cette question ne peut être laissée <strong>de</strong> côté. Je remarque d’ailleurs que lepremier numéro <strong>de</strong>s <strong>La</strong>ngues Mo<strong>de</strong>rnes était consacré à ce sujet, <strong>de</strong> même que le tout premiernuméro <strong>de</strong>s Étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>La</strong>ngues Étrangères Appliquées 2 …. Preuve que la <strong>motivation</strong> a toujourspréoccupé les <strong>en</strong>seignants sur le terrain et aujourd’hui, plus que jamais. En ce qui concerne mesinvestigations, j’ai m<strong>en</strong>é <strong>de</strong>ux recherches longitudinales dans lesquelles je cherchais à cernerl’impact <strong>de</strong>s TICE sur la <strong>motivation</strong>. Ces recherches ont impliqué <strong>de</strong>s populations variées : <strong>de</strong>sétudiants spécialistes <strong>de</strong>s <strong>La</strong>ngues pour d’autres Disciplines (LSP) qui étudi<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>tesLVE, <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> lycée qui étudi<strong>en</strong>t l’anglais LVE, <strong>de</strong>s professeurs <strong>de</strong>s écoles stagiaires et<strong>de</strong>s membres du personnel <strong>de</strong> l’IUFM <strong>de</strong> Gr<strong>en</strong>oble qui étudi<strong>en</strong>t aux-aussi l’anglais LVE. Enfin,au cours <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux recherches, j’ai étudié le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s « <strong>en</strong>seignants » sur les dispositifsinstrum<strong>en</strong>tés, <strong>en</strong> t<strong>en</strong>tant <strong>de</strong> savoir <strong>en</strong> quoi les TICE modifiai<strong>en</strong>t leur manière <strong>de</strong> travailler puis<strong>en</strong> quoi les TICE modifiai<strong>en</strong>t leur <strong>motivation</strong> pour l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la LVE.<strong>La</strong> première partie <strong>de</strong> ma confér<strong>en</strong>ce sera consacrée à une prés<strong>en</strong>tation/discussion <strong>de</strong>certaines questions vives qui préoccup<strong>en</strong>t les chercheurs <strong>en</strong> <strong>motivation</strong> aujourd’hui. <strong>La</strong><strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> mon exposé sera c<strong>en</strong>trée sur la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> situation académique ouinstitutionnelle qui fait l’objet <strong>de</strong> mes propres recherches. Je prés<strong>en</strong>terai un exemple <strong>de</strong>1 <strong>La</strong> <strong>de</strong>uxième remarque, plus fréqu<strong>en</strong>te, fut du type : « Oui, bi<strong>en</strong> sûr, c’est important, mais on ne sait pas faire,c’est trop compliqué, c’est un concept mou, tu vas te casser la F….. ». (Je laisse le lecteur compléter ces propos).2 Je remercie Heather Hilton pour avoir attiré mon att<strong>en</strong>tion sur ce fait.2


echerche m<strong>en</strong>é sur l’effet motivant <strong>de</strong>s TICE et je montrerai comm<strong>en</strong>t cette démarche <strong>de</strong>recherche a nourri et modifié ma vision du débat. Je conclurai par quelques réflexions liées authème général du colloque.L’épineuse question <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>Un parcours <strong>de</strong> la littérature sci<strong>en</strong>tifique laisse toujours un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’imperfection etd’insatisfaction tant les modèles et théories sont nombreuses ! Songeons, par exemple, que ri<strong>en</strong>que sur le thème <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> intrinsèque, plus <strong>de</strong> mille articles ont été écrits :Depuis les premières recherches contemporaines sur la<strong>motivation</strong> intrinsèque [pour une rec<strong>en</strong>sion, voir Vallerand etHalliwell, 1983], plus d’un millier d’étu<strong>de</strong>s ont été réalisées.Reflétant, <strong>en</strong>tre autres, l’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la psychologie sociale et <strong>de</strong>la personnalité, ces recherches ont respectivem<strong>en</strong>t cherché àmieux cerner les diverses influ<strong>en</strong>ces sociales et personnellespouvant influer sur le comportem<strong>en</strong>t motivé [Voir Deci etRyan, 1985, 2000 ; Vallerand, 1997, pour <strong>de</strong>s rec<strong>en</strong>sions.Or, les théories <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> ne se limit<strong>en</strong>t pas au seul modèle <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>intrinsèque/extrinsèque, comme nous allons le voir. Dès lors, comm<strong>en</strong>t choisir ? C’est <strong>en</strong>partant <strong>de</strong> mon objet <strong>de</strong> recherche (Comm<strong>en</strong>t compr<strong>en</strong>dre les fluctuations <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>chez les appr<strong>en</strong>ants et les <strong>en</strong>seignants <strong>en</strong> classe <strong>de</strong> langues) que j’ai sélectionné les théories etles modèles qui ont servi à ma propre théorisation.<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> dans l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong>s langues secon<strong>de</strong>sDans les pays anglo-saxons, la <strong>motivation</strong> pour la LVE <strong>en</strong> SLA constitue <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>sdéc<strong>en</strong>nies un champ <strong>de</strong> recherche important, <strong>en</strong> réalité <strong>de</strong>puis les travaux du canadi<strong>en</strong> RobertGardner [pour une revue <strong>de</strong> la question, voir Dörnyei, 2001, 2003, 2009 ; Oxford, 1999]. Dansla littérature francophone, <strong>en</strong> revanche, son développem<strong>en</strong>t est beaucoup plus réc<strong>en</strong>t. Il a été<strong>en</strong>couragé <strong>en</strong> psychologie par les travaux fondateurs <strong>de</strong> Nuttin [op.cit., 1980] et parallèlem<strong>en</strong>t,il s’est développé <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’éducation [Viau, 1999 ; F<strong>en</strong>ouillet, 2003 ; Cury & Sarrazin,2001 ; Leroy, 2009 ; Vallerand & Miquelon, 2008] grâce, notamm<strong>en</strong>t, à l’apport <strong>de</strong> lapsychologie sociale et au r<strong>en</strong>ouvellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s approches sociologiques dans ce domaine. Ilsemblait inévitable que la didactique <strong>de</strong>s langues ne reste pas étrangère à ces évolutions, car la3


question <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> se posait, <strong>de</strong> manière quotidi<strong>en</strong>ne et cruciale, <strong>en</strong> classe <strong>de</strong> langue. Or,si dans la littérature francophone, la <strong>motivation</strong> pour la LVE à l’école est un domainesci<strong>en</strong>tifique <strong>en</strong>core relativem<strong>en</strong>t jeune, il semble <strong>en</strong> pleine expansion : <strong>en</strong> 2004, l’Association<strong>de</strong>s Professeurs <strong>de</strong> <strong>La</strong>ngues <strong>de</strong>s IUT (APLIUT) lui a consacré son congrès <strong>de</strong> 2004 3 et Les<strong>La</strong>ngues Mo<strong>de</strong>rnes, un numéro spécial <strong>en</strong> 2008 4 . Les travaux sur la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> LVE àl’école primaire ont vu le jour [White, 2009]. Enfin, un numéro sous presse <strong>de</strong> LIDIL 5 réunira<strong>de</strong>s points <strong>de</strong> vue théoriques et pratiques qui illustr<strong>en</strong>t la diversité, pour ne pas dire lefoisonnem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> ce champ théorique dans les recherches francophones <strong>en</strong> LVE. Pourtant, untel déploiem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> recherches et <strong>de</strong> théories ne semble pas pour le mom<strong>en</strong>t avoir pacifié lesdébats. Il reste <strong>de</strong>s théories assez différ<strong>en</strong>tes et <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> désaccord que nous allonsexaminer plus loin et il est <strong>en</strong>core bi<strong>en</strong> difficile <strong>de</strong> s’y retrouver.Les racines du débat !<strong>La</strong> <strong>motivation</strong>, c’est la chose du mon<strong>de</strong> la mieux partagée mais là s’arrête le cons<strong>en</strong>sus !C’est le paradoxe <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>. Nous savons tous que cela existe mais nous ne savons pasexactem<strong>en</strong>t ce que ce concept recouvre.C’est qu’il <strong>en</strong> va <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> classe <strong>de</strong> LVE comme <strong>de</strong> tous les processus cognitifs :elle n’est pas perceptible, elle n’est pas visible, elle n’est même pas extrayable <strong>de</strong>scomportem<strong>en</strong>ts (comme un génie, caché <strong>de</strong>rrière le ri<strong>de</strong>au rouge du théâtre <strong>de</strong> nos p<strong>en</strong>sées, prêtà <strong>en</strong>trer sur scène si le chercheur savait s’y pr<strong>en</strong>dre !). Selon moi, la <strong>motivation</strong> est un construitdu chercheur qui s’<strong>en</strong> sert, comme <strong>de</strong> tout modèle, pour t<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> décrire et <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre lecomportem<strong>en</strong>t humain. <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> ne rési<strong>de</strong> pas dans la tête du sujet que nous étudions, elle3 Les Cahiers <strong>de</strong> l’APLIUT, Volume XXIV, n°2, juin 2005, Éditorial4 Les <strong>La</strong>ngues Mo<strong>de</strong>rnes, n°3, 2008, coordonné par F. Raby5 Entre dispositif et concept, la <strong>motivation</strong> pour l’appr<strong>en</strong>tissage d’une LVE. LIDIL, n°40. Coordonné par J. - P.Narcy-Combes et F. Raby4


ési<strong>de</strong> dans la tête <strong>de</strong> celui ou <strong>de</strong> celle qui observe le comportem<strong>en</strong>t d’un sujet et t<strong>en</strong>te <strong>de</strong> lecompr<strong>en</strong>dre. Il est rare, <strong>en</strong> effet, qu’un élève qui refuse d’écouter le cours parce qu’il converseavec son voisin se dise <strong>en</strong> même temps « ti<strong>en</strong>s, je ne suis pas motivé aujourd’hui ». Pour qu’ilpr<strong>en</strong>ne consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cet état, il faut que la situation l’exige, soit <strong>en</strong> amont (« vais-je ou non memettre à écouter ? Pourquoi ? Qu’est ce que cela va me coûter ? Qu’est ce que cela vam’apporter ? »), soit <strong>en</strong> aval (« Oh là là, non, là, je n’ai vraim<strong>en</strong>t pas bi<strong>en</strong> écouté mais ça me‘gonflait’ ce film »). Certes, l’appr<strong>en</strong>ant peut pr<strong>en</strong>dre consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ce problème et y réfléchir.Mais il ne p<strong>en</strong>sera pas <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>motivation</strong> intrinsèque ou extrinsèque ! <strong>La</strong> réflexion sur lesthéories <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> reste le domaine du chercheur.Je p<strong>en</strong>se donc que la <strong>motivation</strong>, tout comme le schème piagéti<strong>en</strong>, pour pr<strong>en</strong>dre un autreexemple, n’a pas <strong>de</strong> réalité phénoménologique dans le cerveau <strong>de</strong> l’ag<strong>en</strong>t, qu’il s’agit d’uneconstruction dont le chercheur se sert pour décrire et interpréter <strong>de</strong>s comportem<strong>en</strong>ts. Une foisposée cette assertion qui peut choquer certains par son côté radicalem<strong>en</strong>t relativiste (mais jep<strong>en</strong>se, à la manière <strong>de</strong> Putnam [1983], que les mon<strong>de</strong>s sont plus faits que trouvés), on nes’étonnera plus que les sci<strong>en</strong>tifiques ai<strong>en</strong>t tant <strong>de</strong> mal à définir un état <strong>motivation</strong>nel et que cetétat puisse être décrit <strong>en</strong> <strong>de</strong>s formalismes très différ<strong>en</strong>ts. Dans son livre Théorie <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> humaine [1980], Nuttin va dans ce s<strong>en</strong>s quand il relate ce que fur<strong>en</strong>t les péripéties<strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> [pp. 25-33] avant que le cognitivisme ne s’empare du sujet. <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> futdéfinie comme stimulus et charge d’énergie par les psychanalystes [Freud, 1900] mais aussi parles éthologistes [Lor<strong>en</strong>z, 1937], comme une association apprise chez les behavioristes [Skinner,1967], et chacune <strong>de</strong> ces définitions portait la marque <strong>de</strong> la discipline ou du champ sci<strong>en</strong>tifiquedans lequel le chercheur évoluait. À la manière <strong>de</strong> l’esprit chez Sternberg [1994], la <strong>motivation</strong>ressemblait finalem<strong>en</strong>t plus à une métaphore qu’à un concept. Mais aujourd’hui <strong>en</strong>core :L’accord est loin d’être réalisé <strong>en</strong>tre psychologues au sujet <strong>de</strong> laplace qu’il convi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> réserver à la <strong>motivation</strong> dans l’étu<strong>de</strong> etl’explication du comportem<strong>en</strong>t. Considérée par certains commeune notion floue <strong>de</strong>stinée à disparaître du vocabulaire <strong>de</strong> lapsychologie expérim<strong>en</strong>tale, la <strong>motivation</strong> se prés<strong>en</strong>te à d’autrescomme le thème principal <strong>de</strong> la psychologie et la clé même <strong>de</strong> lacompréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la conduite. On constate à la base <strong>de</strong> cedésaccord une diversité <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue qui font <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>une notion très confuse. [Nuttin, 1980, p. 25]Au vu <strong>de</strong>s difficultés que nous r<strong>en</strong>controns à définir la <strong>motivation</strong>, ses indicateurs et sesfacteurs [Raby, 2008a], il n’est guère étonnant que la <strong>motivation</strong> ait suscité et suscite <strong>en</strong>core5


quelque méfiance. Qu’<strong>en</strong> est-il <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> SLA ? C’est vers Zoltan Dörnyei, auteur <strong>de</strong>plusieurs ouvrages sur la question [2001, 2003, 2005, 2009], que je me suis tournée pourasseoir mes propres réflexions.1. Quelles sont les propriétés que recouvre ce concept ? le quoi2. Comm<strong>en</strong>t sait-on que quelqu’un est motivé ? les indicateurs3. Quels sont les facteurs qui agiss<strong>en</strong>t sur la <strong>motivation</strong> et comm<strong>en</strong>t ? le pourquoiC’est sur cette question que le débat est le plus vif.Il ne s’agit pas ici, pour moi, <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à un état <strong>de</strong> l’art mais plutôt <strong>de</strong> retracer unparcours <strong>de</strong> lecture et d’exposer à quoi il a abouti : j’ai constaté, <strong>en</strong> effet, que la diversité <strong>de</strong>sauteurs, <strong>de</strong>s écoles et <strong>de</strong>s signifiants révélait à la fois <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques réelles mais<strong>de</strong>s concordances/analogies. J’ai donc cherché, dans un premier temps, pour moi-même et pourmes étudiants, à clarifier ce qui unissait et ce qui différ<strong>en</strong>ciait les théories <strong>en</strong> me conc<strong>en</strong>trantsur celles qui avai<strong>en</strong>t un pouvoir explicatif assez exhaustif et qui avai<strong>en</strong>t été appliquées auxsituations scolaires ou académiques, à savoir :‣ <strong>La</strong> théorie socio-educative [Gardner, 1985].‣ <strong>La</strong> théorie <strong>de</strong> l’autodétermination [Deci, 1975 ; Deci & Ryan, 1982] et le modèlehiérarchique <strong>de</strong> Vallerand [1997].‣ <strong>La</strong> théorie <strong>de</strong>s buts d’accomplissem<strong>en</strong>t [Dweck, 1989, 1996 ; Maehr & Braskamp,1986 ; Nicholson, 1984].‣ <strong>La</strong> théorie <strong>de</strong> l’autorégulation [Bandura, 1980, 1993, 2003].‣ <strong>La</strong> théorie <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> au travail [Francès, 1995].‣ <strong>La</strong> théorie <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> scolaire [Viau, 1999].6


Les points d’accord <strong>en</strong>tre ces diverses théories<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est un métaconcept qui fait appel à d’autres concepts relevant <strong>de</strong> diversesdisciplines sci<strong>en</strong>tifiques.‣ De la psychologie clinique, comme Eros, le besoin d’affirmation, l’importance duregard <strong>de</strong>s autres, la confiance <strong>en</strong> soi, le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> soi, l’estime <strong>de</strong> soi, bref, toutce qui se rapporte au concept <strong>de</strong> soi ;‣ Mais les concepts du soi se retrouv<strong>en</strong>t aussi dans la psychologie cognitive, comme lacompét<strong>en</strong>ce, la question du contrôle <strong>de</strong> l’action ou la question <strong>de</strong> outils cognitifs :conc<strong>en</strong>tration, att<strong>en</strong>tion et mémoire sont considérées, <strong>en</strong> partie, comme <strong>de</strong>sconséqu<strong>en</strong>ces cognitives <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> (aujourd’hui, on fait même <strong>en</strong>trer, à justetitre, l’affordance comme facteur <strong>motivation</strong>nel !).‣ <strong>La</strong> psychologie sociale apporte les concepts d’internalité et d’externalité,l’appr<strong>en</strong>tissage vicariant, l’attribution causale, le lieu <strong>de</strong> contrôle, etc.Toutes les théories tourn<strong>en</strong>t, d’une manière ou d’une autre, autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux notionsclefs : l’interne et l’externe.(Je choisis <strong>de</strong> nominaliser ces <strong>de</strong>ux adjectifs afin d’éviter l’emploi <strong>de</strong> signifiants déjà utilisésdans telle ou telle théorie, comme la théorie <strong>de</strong> l’internalité <strong>en</strong> psychologie sociale).‣ <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est un état psychologique, donc interne au sujet, mais qui se développedans l’interaction <strong>en</strong>tre le sujet et son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ou son milieu.‣ <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est influ<strong>en</strong>cée par <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> facteurs : les facteurs internes, liésaux caractéristiques cognitives, affectives et sociales du sujet, et les facteurs externesau sujet, qui sont, dans le cas qui nous occupe, l’établissem<strong>en</strong>t, le professeur, lesoutils, les tâches, les copains, etc.‣ Plus la <strong>motivation</strong> s’ancre <strong>de</strong> manière interne, plus l’individu est maître <strong>de</strong> sesactions, plus le plaisir <strong>de</strong> l’action est important, plus l’att<strong>en</strong>te est gran<strong>de</strong>, plus le butest stimulant, plus l’autorégulation est forte et plus la <strong>motivation</strong> sera importante.7


Ces points s’accord<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t aux observations que j’ai pu réaliser au cours <strong>de</strong> mes vingtannées <strong>de</strong> visite <strong>en</strong> classe d’anglais et dans mes recherches sur les stratégies cognitives, j’<strong>en</strong> aidonc fait le socle <strong>de</strong> mon modèle <strong>de</strong> la Motivation pour l’Appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong> la LVE <strong>en</strong> SituationAcadémique. Mais si les théories <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> s’accord<strong>en</strong>t sur ces points, elles diverg<strong>en</strong>t surd’autres questions. <strong>La</strong> plupart du temps, il ne s’agit pas d’une franche opposition : ainsi, lesthéories du concept <strong>de</strong> soi [Marcus & Nurius, 1986 ; Schunk, 1987, 1989] ne s’oppos<strong>en</strong>t pas àla théorie <strong>de</strong>s buts d’accomplissem<strong>en</strong>t ; la théorie <strong>de</strong> l’attribution ne s’oppose pas à celle <strong>de</strong>l’autodétermination, etc. En réalité, comme le souligne Dörnyei à plusieurs reprises, lesdiffér<strong>en</strong>ces vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la plupart du temps du fait que les chercheurs ont développé leurs modèlesun peu partout dans le mon<strong>de</strong> <strong>en</strong>tre les années 1930 et 1970, sans connaître, au départ, le travaild’autres chercheurs. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on a bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t l’impression que lesdiscours se recoup<strong>en</strong>t mais utilis<strong>en</strong>t une terminologie différ<strong>en</strong>te. Malgré tout, <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>cessubsist<strong>en</strong>t dans les angles d’approche <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, dans l’ampleur <strong>de</strong>s modèles et dans lamanière dont on prét<strong>en</strong>d mesurer l’état <strong>motivation</strong>nel.Les points <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ce ou <strong>de</strong> désaccordMotivation ou <strong>motivation</strong>s ?Un premier point qui génère à mes yeux une certaine confusion théorique est la question dusingulier ou du pluriel. Comme pour le concept <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce, on trouve <strong>de</strong>s emploissinguliers et pluriels du terme Ellul, [1982], Francès [1995], Leplat [1997, 2000], Montmollin[1997]. Pr<strong>en</strong>ons la définition <strong>de</strong> Francès :<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> au travail est l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s aspirations qu’untravailleur attache à son emploi, chacune d’elles étant affectéed’un coeffici<strong>en</strong>t <strong>de</strong> probabilité qu’il conçoit <strong>de</strong> voir sesaspirations se réaliser dans l’emploi, <strong>en</strong> fonction du travailaccompli, <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong> ce travail par l’organisation,etc. <strong>La</strong> théorie repose sur les travaux <strong>de</strong> Hull qui cherche àdéfinir le processus <strong>motivation</strong>nel comme le produit <strong>de</strong> plusieursfacteurs. [Francès, 1995, p. 11].L’auteur livre bi<strong>en</strong> ici une définition générique <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>. Au fil du texte se produitun glissem<strong>en</strong>t sémantique qui fait que, comme les autres auteurs, il parle tantôt <strong>de</strong> <strong>motivation</strong>au singulier, mais le plus souv<strong>en</strong>t au pluriel ; dans ce cas, les <strong>motivation</strong>s au travail sontsynonymes d’att<strong>en</strong>tes ou aspirations. On retrouve le même problème dans le vocabulaire <strong>de</strong>8


l’ergonomie <strong>de</strong> Montmollin [1997, pp. 207-208] qui emploie <strong>de</strong>ux fois <strong>motivation</strong> au pluriel etune fois au singulier. On trouve un autre exemple <strong>en</strong>core plus gênant dans la prés<strong>en</strong>tation dumodèle hiérarchique <strong>de</strong> Vallerand. Les auteurs indiqu<strong>en</strong>t qu’il existe trois <strong>motivation</strong>s(intrinsèque, extrinsèque et l’a-<strong>motivation</strong>). En fait, ils ne décriv<strong>en</strong>t pas l’état psychologique <strong>de</strong>la <strong>motivation</strong> mais les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> cet état : l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans l’activité expliqué par lathéorie <strong>de</strong>s buts.<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> intrinsèque r<strong>en</strong>voie à la pratique volontaire d’uneactivité pour le plaisir et la satisfaction qu’on <strong>en</strong> retire. Parcontre, la <strong>motivation</strong> extrinsèque réfère à l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans uneactivité dans un but non inhér<strong>en</strong>t à l’activité, soit <strong>en</strong> vue <strong>de</strong>retirer quelque chose <strong>de</strong> plaisant, soit afin d’éviter quelque chose<strong>de</strong> déplaisant une fois celle-ci terminée. [Vallerand et Grouzet,2001, p61].Je compr<strong>en</strong>ds bi<strong>en</strong> la distinction qu’ils établiss<strong>en</strong>t mais il me semble qu’on ne sait plus trèsbi<strong>en</strong>, <strong>en</strong> revanche, ce qui relève <strong>de</strong>s facteurs et ce qui relève <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>. Mais les auteurspoursuiv<strong>en</strong>t, un peu plus loin :Aussi on ne peut pas dire qu’une personne est « motivée » ou non.Il est plus approprié <strong>de</strong> faire référ<strong>en</strong>ce à une collection <strong>de</strong><strong>motivation</strong>s différ<strong>en</strong>tes par nature et par niveau <strong>de</strong> généralité.[Vallerand & Grouzet, 1985, p. 62]Qu’est ce qu’une collection <strong>de</strong> <strong>motivation</strong>s ? En lisant cet extrait, on a l’impression que la<strong>motivation</strong> est ram<strong>en</strong>ée aux ori<strong>en</strong>tations, attitu<strong>de</strong>s et désirs, et non au processus. Il me semblealors que pour ces chercheurs, le problème rési<strong>de</strong> moins dans la définition <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> quedans les facteurs qui la décl<strong>en</strong>ch<strong>en</strong>t, d’où le glissem<strong>en</strong>t sémantique qui fait qu’on emploie<strong>motivation</strong> pour désigner un état ou un processus assez peu défini et <strong>motivation</strong>s pour désignerles ori<strong>en</strong>tations et les buts <strong>de</strong>s sujets face à une action ou une tâche. Il faut nous tourner versGardner et <strong>La</strong>mbert [1972] pour clarifier les choses. Ils ont défini la <strong>motivation</strong> comme lerésultat <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux facteurs : l’attitu<strong>de</strong> et l’ori<strong>en</strong>tation. L’attitu<strong>de</strong> regroupe l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>scroyances qui fond<strong>en</strong>t nos représ<strong>en</strong>tations à l’égard <strong>de</strong> la LVE, notamm<strong>en</strong>t la communauté quila parle ; l’ori<strong>en</strong>tation correspond aux résultats que nous att<strong>en</strong>dons <strong>de</strong> l’acquisition <strong>de</strong> la L2 etrecouvre la question <strong>de</strong>s buts ; et la <strong>motivation</strong> est ce qui garantit le succès dans la LVE[Masgoret & Gardner, 2003, p.170]. Pour ma part, j’ai décidé, <strong>en</strong> suivant Dörnyei [2001] ouViau [2004], <strong>de</strong> définir le concept <strong>de</strong> <strong>motivation</strong> comme un processus d’<strong>en</strong>semble et non9


comme un facteur, et je conserve les termes d’ori<strong>en</strong>tation ou d’attitu<strong>de</strong> pour évoquer les buts etles représ<strong>en</strong>tations <strong>de</strong>s sujets qui les pouss<strong>en</strong>t à agir.Y a-t-il <strong>de</strong>s profils <strong>motivation</strong>nels ?<strong>La</strong> théorie psychosociale <strong>de</strong> Gardner et <strong>La</strong>mbert a fourni le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> ma réflexionsur cette question. Cette théorie a vu le jour au Canada, pays fortem<strong>en</strong>t marqué par unesituation <strong>de</strong> bilinguisme, dans lequel chaque partie <strong>de</strong> la communauté parle une languedominante dans le mon<strong>de</strong> : l’anglais et le français.L’un <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts les plus connus et les plus cités <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> chezGardner est l’intégrativité. On la retrouve sous diverses formes comme l’ori<strong>en</strong>tation intégrative,l’intégrativité, le motif intégratif, les intégratifs (par opposition aux individus normatifs).Pourtant, cette notion a toujours suscité <strong>de</strong>s interrogations. D’abord parce qu’elle n’apparti<strong>en</strong>tpas aux théories générales <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> psychologie ; <strong>en</strong>suite, parce que s’il est possibled’y associer un certain type <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>ts chez les appr<strong>en</strong>ants, il est difficile d’<strong>en</strong> donnerune définition exacte, comme l’a lui-même expliqué Gardner à plusieurs reprises.On peut toutefois attribuer à la communauté qui parle la L2 une disposition intégrative etune ori<strong>en</strong>tation affective et interpersonnelle positive. Un individu intégratif aura <strong>en</strong>vie <strong>de</strong>découvrir la culture, les mœurs <strong>de</strong>s locuteurs <strong>de</strong> la L2, il lui plaira <strong>de</strong> s’id<strong>en</strong>tifier à eux quand ilparlera leur langue et il ira même, dans certains cas, jusqu’à abandonner sa communautéd’origine pour s’intégrer totalem<strong>en</strong>t à la communauté <strong>de</strong> la L2.Viau, <strong>de</strong> son côté, met <strong>en</strong> relation (<strong>de</strong> manière un peu étrange selon moi) la notion <strong>de</strong> profil<strong>motivation</strong>nel avec celle <strong>de</strong> dynamique <strong>motivation</strong>nelle. Après avoir précisé que la <strong>motivation</strong>d’un élève est <strong>en</strong> perpétuelle évolution « Sans se transformer complètem<strong>en</strong>t, à chaque instant ladynamique <strong>motivation</strong>nelle d’un élève évolue constamm<strong>en</strong>t » [Viau, op. cit., p. 38], il stipuleque l’<strong>en</strong>seignant doit, <strong>en</strong> quelque sorte, être capable <strong>de</strong> fixer cette dynamique, un peu commeon photographierait un sportif <strong>en</strong> pleine course :Lorsqu’un <strong>en</strong>seignant cherche à améliorer la <strong>motivation</strong> d’unélève, il doit baser son interv<strong>en</strong>tion sur la dynamique<strong>motivation</strong>nelle <strong>de</strong> cet élève dans l’état où elle se trouve aumom<strong>en</strong>t précis où il déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’améliorer. L’image fixe qu’il10


obti<strong>en</strong>t ainsi <strong>de</strong> la dynamique <strong>motivation</strong>nelle d’un élèves’appelle le profil <strong>motivation</strong>nel <strong>de</strong> l’élève. [Viau, 1999, p. 38]Si je compr<strong>en</strong>ds la nécessité, pour l’<strong>en</strong>seignant, <strong>de</strong> dresser un état <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>de</strong> l’élèveà un temps T donné, qu’il s’agisse <strong>de</strong> sa <strong>motivation</strong> générale pour la LVE ou <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>pour une tâche donnée, je compr<strong>en</strong>ds moins qu’il désigne cette image nécessairem<strong>en</strong>ttemporaire sous le terme <strong>de</strong> profil. Ce type d’approche appliquée aux situations <strong>de</strong> classe nem’a jamais sci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t convaincue, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, je suisintellectuellem<strong>en</strong>t très méfiante, d’une manière générale, à l’égard <strong>de</strong> la notion même <strong>de</strong> profilqui r<strong>en</strong>voie à une approche fixiste <strong>de</strong> l’individu, tout comme les fameux profils pédagogiques<strong>de</strong> <strong>La</strong> Garan<strong>de</strong>rie [1980]. Je ne récuse pas l’intérêt qu’il y a à chercher <strong>de</strong>s styles<strong>motivation</strong>nels ou cognitifs, à condition <strong>de</strong> conserver la distinction <strong>en</strong>tre traits stables et traitsperman<strong>en</strong>ts, comme le font Julkun<strong>en</strong> [2001] ou <strong>en</strong>core Boekaerts [1986]. Julkun<strong>en</strong> proposed’expliquer les comportem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s élèves liés à la tâche, <strong>en</strong> combinant <strong>de</strong>s facteurs généraux et<strong>de</strong>s facteurs spécifiques <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>. Cette distinction rejoint celle établie par Tremblay,Goldberg et Gardner [1995] <strong>en</strong>tre les états <strong>motivation</strong>nels et les traits <strong>motivation</strong>nels, lespremiers correspondant à <strong>de</strong>s dispositions stables et durables et les seconds à <strong>de</strong>s dispositionspassagères.Pour conclure ce débat, il faut aussi s’interroger sur la manière dont le chercheur établit lefameux profil. Les questionnaires, fuss<strong>en</strong>t-ils tout à fait complets, ne fourniss<strong>en</strong>t qu’unerationalisation, à postériori, par le sujet, <strong>de</strong> cet état affectif autant que cognitif dans un exerciced’introspection [Dörnyei, 2003]. On connait les limites <strong>de</strong> l’exercice. Les réponses sontaffectées par l’état du sujet au mom<strong>en</strong>t où il les fournit, elles rationnalis<strong>en</strong>t un état qui peut êtreassez confus et, <strong>de</strong> là, s’éloigner <strong>de</strong> la vérité du ress<strong>en</strong>ti [Wermersch, 1990]. Le contexte <strong>de</strong>l’interview ou <strong>de</strong> la passation du questionnaire n’est pas non plus indiffér<strong>en</strong>t, et lorsque ce sontles <strong>en</strong>seignants qui transmett<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s questionnaires à leurs appr<strong>en</strong>ants, dans un domaine aussi11


chargé d’affect, on ne peut que suspecter quelques biais d’expéri<strong>en</strong>ce 6 . De plus, dans lesrecherches empiriques <strong>en</strong> LVE, on ne procè<strong>de</strong> souv<strong>en</strong>t qu’à une seule passation et, à partir <strong>de</strong>ces résultats, on prét<strong>en</strong>d construire <strong>de</strong>s profils <strong>motivation</strong>nels <strong>de</strong>s élèves, c’est-à-dire produirela vérité <strong>de</strong> leurs caractéristiques émotionnelles. Des prises d’informations répétées montr<strong>en</strong>tcombi<strong>en</strong> ces résultats sont instables et l’idée <strong>de</strong> rechercher <strong>de</strong>s « profils » <strong>motivation</strong>nels chez<strong>de</strong>s sujets appr<strong>en</strong>ants me gêne, tant d’un point <strong>de</strong> vue épistémologique que déontologique.C’est <strong>en</strong> partie pour cette raison que j’ai décidé <strong>de</strong> m’inscrire dans le paradigme du processus etle courant <strong>de</strong> la task <strong>motivation</strong> [Julkun<strong>en</strong>, 2001]. Je ne cherche pas <strong>de</strong>s profils mais <strong>de</strong>s traitsou états plus ou moins stables, <strong>en</strong> perpétuelle évolution et toujours liés à une macrotâche ou unprojet bi<strong>en</strong> défini.<strong>La</strong> <strong>motivation</strong>, un phénomène consci<strong>en</strong>t ou inconsci<strong>en</strong>t ?<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est-elle un phénomène consci<strong>en</strong>t qui relève d’une réflexion par les individussur ce qu’ils ont fait ou vécu, et les conduit à anticiper et vouloir, <strong>de</strong> manière consci<strong>en</strong>te, tel outel comportem<strong>en</strong>t ? Ou bi<strong>en</strong> s’agit-il, comme le postulai<strong>en</strong>t à la fois les béhavioristes et lapsychanalyse, <strong>de</strong> mécanismes inconsci<strong>en</strong>ts échappant à notre contrôle ? <strong>La</strong> littératurespécialisée part généralem<strong>en</strong>t, du principe que la <strong>motivation</strong> peut s’expliquer par <strong>de</strong>s facteursconsci<strong>en</strong>ts. Mais ce n’est pas toujours le cas, et si la <strong>motivation</strong> se résume à la conséqu<strong>en</strong>ced’un désir ou d’une pulsion inconsci<strong>en</strong>te, si elle <strong>de</strong>meure sous l’effet <strong>de</strong> facteurs inconsci<strong>en</strong>ts, ilne serait pas très pertin<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong> faire un objet <strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique, car cela signifieraitqu’on ne pourrait jamais ai<strong>de</strong>r un élève à pr<strong>en</strong>dre consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ce qui le pousse à écouter (ounon) le cours <strong>de</strong> langue ou bi<strong>en</strong> à s’investir (ou non) dans son travail. L’expéri<strong>en</strong>ce sur leterrain m’a conduite à donner raison dans ce débat à Deci et Ryan [2002], Bandura [2003] etDörnyei [2001, 2003], lorsqu’ils rev<strong>en</strong>diqu<strong>en</strong>t que les comportem<strong>en</strong>ts d’appr<strong>en</strong>tissage, étudiéssur une pério<strong>de</strong> assez longue, sont activés et régulés, au moins <strong>en</strong> partie, par <strong>de</strong>s mécanismes6 Je revi<strong>en</strong>drai sur cette question à la fin <strong>de</strong> mon exposé, lorsque je prés<strong>en</strong>terai la métho<strong>de</strong> que j’ai élaboréepour comp<strong>en</strong>ser ce biais.12


cognitifs d’anticipation et <strong>de</strong> régulation consci<strong>en</strong>ts et donc, qu’il est possible d’agir sur la<strong>motivation</strong>, à condition d’ai<strong>de</strong>r élèves et <strong>en</strong>seignants à mettre à jour ces mécanismes.<strong>La</strong> <strong>motivation</strong>, un phénomène cognitif, affectif, conatif ?À l’heure actuelle, le courant dominant les recherches sur la <strong>motivation</strong> est caractérisé parl’approche cognitive qui met l’acc<strong>en</strong>t sur les connaissances, les p<strong>en</strong>sées, les réflexions <strong>de</strong>sindividus, leur manière d’interpréter l’expéri<strong>en</strong>ce.Humans are social animals, but they are also noteworthy forbeing self-aware. In<strong>de</strong>ed, the capacity for self-reflection, an<strong>de</strong>specially for self-concepts formation, distinguishes humans fromvirtually every other species. Research on this unique feature ofhuman psychology has <strong>de</strong>monstrated that the self is more than anepiph<strong>en</strong>om<strong>en</strong>on, but rather functions as an important platform forthe regulation of thought, emotion, and interpersonal relations.[Nowak, Vallacher, Zochowski, 2005, p. 368]C’est une rupture avec l’approche béhavioriste qui voyait les choses <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> stimuli et<strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>ts ou avec les approches psychanalytiques qui parlai<strong>en</strong>t d’instincts, <strong>de</strong> pulsions(drive), d’états émotionnels. Cep<strong>en</strong>dant, aucun chercheur, actuellem<strong>en</strong>t, ne pourrait nier le rôle<strong>de</strong>s émotions dans le décl<strong>en</strong>chem<strong>en</strong>t ou le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> : colère, anxiété, att<strong>en</strong>te,fierté, etc. C’est pourquoi, alors que les <strong>de</strong>ux aspects étai<strong>en</strong>t traités séparém<strong>en</strong>t, on t<strong>en</strong>teaujourd’hui <strong>de</strong> trouver leur articulation. C’est le cas notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s attributions <strong>de</strong>Weiner [1986] sur laquelle nous revi<strong>en</strong>drons. En ce qui concerne l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong>s languesétrangères, Schumann, dans son livre The Neurobiology of Affect in <strong>La</strong>nguage, [1998] affirmequ’il s’agit d’un processus fondam<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t piloté par l’émotion, et Arnold [1999] et Young[1999] lui font écho.Approche holistique ou réductionniste ?Pour expliquer la <strong>motivation</strong>, on fait appel à <strong>de</strong>s variables ou facteurs généraux mais aussi àd’autres facteurs précisém<strong>en</strong>t liés à tel ou tel domaine d’application ; par exemple, la<strong>motivation</strong> pour les mathématiques et la <strong>motivation</strong> pour les langues ne relèv<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong>smêmes processus. En outre, on sait que la <strong>motivation</strong> met <strong>en</strong> jeu plusieurs facteurs dans unprocessus complexe qui prési<strong>de</strong> à leur interaction. Pour les chercheurs <strong>en</strong> psychologie, la<strong>motivation</strong> se traduit donc par un agrégat <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>ts qui découl<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’interaction d’un13


agrégat <strong>de</strong> facteurs. Dans l’approche <strong>de</strong> type « réductionniste », il convi<strong>en</strong>t, à partir d’un travail<strong>de</strong> modélisation piloté par une ou <strong>de</strong>ux théories, d’id<strong>en</strong>tifier un nombre relativem<strong>en</strong>t limité <strong>de</strong>facteurs susceptibles d’expliquer un maximum <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>ts <strong>motivation</strong>nels. <strong>La</strong> métho<strong>de</strong>réductionniste prés<strong>en</strong>te un double avantage : d’une part, elle permet <strong>de</strong> mettre à jour avecprécision les interrelations qui s’établiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les facteurs sélectionnés et, d’autre part, lemodèle étant limité, il <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t opérationnalisable dans le cadre d’une démarche empirique[Raby, 2004a, 2006, 2008a, 2007b].Cep<strong>en</strong>dant, l’approche réductionniste (le terme le dit clairem<strong>en</strong>t) a pour inconvéni<strong>en</strong>t <strong>de</strong>réduire le champ d’investigation du chercheur. Seuls <strong>de</strong>s comportem<strong>en</strong>ts homogènes etrelativem<strong>en</strong>t rationnels sont pris <strong>en</strong> compte, au détrim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la complexité phénoménologiquedu mon<strong>de</strong> « réel ».Entre Charyb<strong>de</strong> et Scylla, je p<strong>en</strong>se, comme la plupart <strong>de</strong>s chercheurs dans ce domaine,qu’une approche réductionniste est inévitable si on ne veut pas se cont<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> discourir àpropos <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, ou bi<strong>en</strong> simplem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> décrire l’évid<strong>en</strong>ce, parce que les approches« compréh<strong>en</strong>sives », holistiques ou systémiques, ne sont pas opérationnalisables. En revanche,il me semble que les discours généraux issus d’une démarche philosophique, psychologique oudidactique ont pour rôle <strong>de</strong> critiquer les modèles, <strong>de</strong> stimuler la réflexion et <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>spistes d’interprétation ou <strong>de</strong> recherches.Comm<strong>en</strong>t abor<strong>de</strong>r l’interaction <strong>en</strong>tre les facteurs ?Une autre difficulté liée à l’approche réductionniste rési<strong>de</strong> dans le fait que, même lorsque lechercheur a bi<strong>en</strong> id<strong>en</strong>tifié un <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> facteurs susceptibles <strong>de</strong> prédire les comportem<strong>en</strong>ts<strong>de</strong>s élèves, il les appréh<strong>en</strong><strong>de</strong> comme si ces comportem<strong>en</strong>ts se produisai<strong>en</strong>t indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s autres comportem<strong>en</strong>ts ou actions dans lesquels les élèves sont <strong>en</strong>gagés. Certes, dans laclasse <strong>de</strong> langue, un élève ne peut pas être <strong>en</strong>gagé dans toutes sortes d’activités ou actions ;cep<strong>en</strong>dant, plusieurs épiso<strong>de</strong>s ou processus peuv<strong>en</strong>t être activés simultaném<strong>en</strong>t. Aussi, l’un <strong>de</strong>s<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> la recherche consiste à expliquer les interactions <strong>en</strong>tre diverses ori<strong>en</strong>tations <strong>de</strong>l’action, divers buts et divers mécanismes <strong>de</strong> contrôle, d’où mon intérêt pour la démarche <strong>de</strong> latriangulation. C’est ce que Dörnyei [2001] appelle la multiplicité parallèle (<strong>de</strong>s facteurs).L’une <strong>de</strong>s rares chercheuses étrangères à avoir t<strong>en</strong>té d’approcher la multiplicité parallèle <strong>de</strong>manière empirique est Boekaerts [1998].14


Des situations <strong>de</strong> travail interdép<strong>en</strong>dantes […] exig<strong>en</strong>t que lesétudiants mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> balance plusieurs buts et tâches simultaném<strong>en</strong>t.[…] Nous savons <strong>en</strong>core peu <strong>de</strong> choses sur la manière dont ilshiérarchis<strong>en</strong>t leurs buts, dont ils les chang<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s conflitsqui peuv<strong>en</strong>t surv<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>tre tel ou tel but. Nous ne savons, aussi,pratiquem<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> la manière dont ils chang<strong>en</strong>t leurs stratégies <strong>en</strong>fonction du s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> réussite qui les anime et <strong>de</strong>s comp<strong>en</strong>sationsque cela <strong>en</strong>traîne <strong>en</strong>tre différ<strong>en</strong>tes ressources cognitives. Lesrecherches à v<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t s’attaquer à ces questions. [Boekaerts,1998, p. 21]Mes recherches empiriques m’ont fourni <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> la multiplicité <strong>de</strong>s facteursparallèles. Dans mon article introductif au numéro spécial <strong>de</strong>s langues mo<strong>de</strong>rnes [Raby,2008b], je cite une étu<strong>de</strong> longitudinale m<strong>en</strong>ée auprès d’étudiants travaillant l’anglais <strong>en</strong>autonomie dans un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> langues à l’université. Nous avions <strong>de</strong>mandé aux étudiants <strong>de</strong>t<strong>en</strong>ir un journal <strong>de</strong> leur appr<strong>en</strong>tissage <strong>en</strong> autonomie <strong>en</strong> y confiant leurs att<strong>en</strong>tes, leurs succès etleurs échecs. Beaucoup d’<strong>en</strong>tre eux, à l’image <strong>de</strong> Marie, étudiante <strong>en</strong> droit <strong>en</strong> <strong>de</strong>uxième année,m<strong>en</strong>tionn<strong>en</strong>t l’effet négatif que joue le modèle <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> la faculté <strong>de</strong> droit sur sa <strong>motivation</strong>à se pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge dans le cadre <strong>de</strong> son appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong> l’anglais au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> langues.En droit, c’est pas pareil, on sait ce qu’on doit faire, on appr<strong>en</strong>d et onrécite, c’est peut-être moins intéressant mais c’est plus facile. En fait,<strong>en</strong> droit, c’est comme au lycée, c’est pas nous qui décidons tandis qu’auCLV, on doit nous-mêmes construire notre programme et on n’a pasl’habitu<strong>de</strong>. Quelquefois, c’est décourageant, on a l’impression qu’onsait pas où on va. [Marie, journal <strong>de</strong> bord, mars 2004]Je pourrais aussi fournir un exemple très différ<strong>en</strong>t concernant <strong>de</strong>s adultes au travail <strong>en</strong>autonomie avec un logiciel d’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong> l’anglais.Le programme TMM reste, pour moi, un temps fort d’appr<strong>en</strong>tissage à la recherche liée surl’activité, la <strong>motivation</strong>, et plus <strong>en</strong>core, la dé<strong>motivation</strong> car c’est un projet qui s’est conclus parl’abandon d’un grand nombre d’appr<strong>en</strong>ants. Ce projet associait l’<strong>en</strong>treprise AURALOG,distributrice du logiciel TMM, le laboratoire <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’éducation pour l’étu<strong>de</strong> du travail<strong>en</strong> autonomie, le LIDILEM pour l’analyse <strong>de</strong> l’activité langagière et l’IUFM qui nousfournissait les appr<strong>en</strong>ants <strong>en</strong> langues. Le projet reposait sur l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s usages du CD ROM par<strong>de</strong>s personnels administratifs <strong>en</strong> situation d’autonomie guidée. AURALOG a mis à notredisposition le logiciel TMM dans les quatre langues et pour tous les niveaux, dans une versionréseau béta du produit qui offrait notamm<strong>en</strong>t un tuteur à distance Avec le recul, je suisconvaincue que la raison principale <strong>de</strong> l’abandon par différ<strong>en</strong>ts acteurs du projet est v<strong>en</strong>u du15


fait qu’ils ne poursuivai<strong>en</strong>t pas les mêmes buts (ce qui, somme toute, est assez normal) maissurtout, qu’ils n’avai<strong>en</strong>t pas la même représ<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s buts que les autres étai<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>séspoursuivre. C’est pourquoi je prés<strong>en</strong>te cette singulière expéri<strong>en</strong>ce sous l’intitulé <strong>de</strong>s « buts ».Une fois que les différ<strong>en</strong>ts part<strong>en</strong>aires (la société AURALOG, le directeur <strong>de</strong> l’IUFM <strong>de</strong>Gr<strong>en</strong>oble, le responsable du master Métiers <strong>de</strong> la langue et moi-même) s’étai<strong>en</strong>t mis d’accordsur le projet TMM, j’ai réuni les étudiants <strong>en</strong>gagés dans le projet pour définir un programme <strong>de</strong>formation <strong>de</strong> six mois <strong>en</strong> autonomie guidée pour les membres du personnel <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> lascolarité et <strong>de</strong> la comptabilité et les professeurs <strong>de</strong>s écoles stagiaires [Raby, 2004a & b] Nousavons donc comm<strong>en</strong>cé les séances <strong>de</strong> formation, à raison d’une fois par semaine. Lesparticipants <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t monter <strong>en</strong> salle informatique, où ils étai<strong>en</strong>t accueillis par un tuteur qui lesaidait dans leur travail. Par ailleurs, nous avions mis à leur disposition le logiciel afin qu’ilspuiss<strong>en</strong>t l’utiliser chez eux. Au bout <strong>de</strong> quelques temps, j’ai croisé le responsable informatique<strong>de</strong> l’IUFM qui m’a proposé d’installer <strong>en</strong> réseau le logiciel TMM dans les bureaux pourpermettre aux employés <strong>de</strong> faire du travail personnel p<strong>en</strong>dant leur temps <strong>de</strong> pause. Il <strong>en</strong> avaitparlé autour <strong>de</strong> lui et tout le mon<strong>de</strong> semblait <strong>en</strong>thousiaste à cette idée. J’y fus moi-même tout àfait favorable. Trois semaines plus tard, l’assiduité aux séances informatiques comm<strong>en</strong>çait àdiminuer et les tuteurs n’arrivai<strong>en</strong>t pas à <strong>en</strong> connaître la raison. Ils p<strong>en</strong>sèr<strong>en</strong>t que les employéspréférai<strong>en</strong>t travailler seuls dans leur bureau ou chez eux. Un mois après le démarrage du projet,je fus convoquée par le directeur <strong>de</strong> l’IUFM qui me pria g<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> m’asseoir et me mit<strong>de</strong>vant les yeux une lettre signée du responsable syndical CGT <strong>de</strong> l’IUFM. Voici, <strong>en</strong> résumé, lecont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> cette missive qui s’organisait <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux points.1. Il <strong>de</strong>mandait à ce qu’il soit mis un terme à l’expéri<strong>en</strong>ce TMM.2. Parce qu’elle provoquait une inégalité <strong>de</strong> traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s membres du personnel <strong>de</strong>l’IUFMEn effet, pour <strong>de</strong>s raisons techniques, ceux qui possédai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Macs (service <strong>de</strong> lacomptabilité), n’avai<strong>en</strong>t pas eu la chance <strong>de</strong> voir le réseau TMM installé sur leur intranet,tandis que ceux dotés <strong>de</strong> PC (service du personnel), avai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> eu la version réseau sur leurposte <strong>de</strong> travail. Il y avait bi<strong>en</strong> là « inégalité <strong>de</strong> traitem<strong>en</strong>t ».16


<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir facteur <strong>de</strong> premier rang, non pour sa valeur instrum<strong>en</strong>tale mais à cause <strong>de</strong>svaleurs symboliques qui y sont attachées 7 .En conclusion, nous avions mis <strong>en</strong> place un projet linguistique qui n’était pas contesté et ceprojet avait échoué, non <strong>en</strong> raison du logiciel ou <strong>de</strong>s tuteurs, mais pour <strong>de</strong>s raisonsorganisationnelles qui échappai<strong>en</strong>t totalem<strong>en</strong>t à mon contrôle et qui avai<strong>en</strong>t conduit à unecomplète dé<strong>motivation</strong>. C’est à partir <strong>de</strong> cette expéri<strong>en</strong>ce que j’ai résolum<strong>en</strong>t décidé d’ét<strong>en</strong>dremon objet <strong>de</strong> recherche « analyse <strong>de</strong> l’activité » à la question <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>.Suite à ces observations, j’ai décidé d’adopter une démarche qui ne cherche pas àcaractériser les traits stables et généraux <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> langue, mais, conformém<strong>en</strong>t à uneapproche ergonomique, à caractériser la <strong>motivation</strong> <strong>de</strong>s élèves d’une manière locale etcontextualisée. Plus précisém<strong>en</strong>t, je ne me suis pas p<strong>en</strong>chée sur la <strong>motivation</strong> générale pour laLVE mais plutôt sur la question <strong>de</strong> savoir comm<strong>en</strong>t les divers facteurs <strong>en</strong>trant dans la<strong>motivation</strong> pour la tâche pouvai<strong>en</strong>t affecter l’activité <strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>ts [Julkun<strong>en</strong>, 1989, 2001].Approche par les cont<strong>en</strong>us ou par les processusLes recherches sur la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> SLA ont été, au départ, dominées par la perspectivemacrosociale initiée par Gardner et ses associés. Ils examinai<strong>en</strong>t les dispositions<strong>motivation</strong>nelles générales <strong>de</strong> larges communautés, sans que n’apparaisse la nature changeante<strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> au niveau sociologique ou sociopsychologique. À partir du mom<strong>en</strong>t où l’on acomm<strong>en</strong>cé à s’intéresser à la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> contexte scolaire, la dynamique <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>s’est imposée comme une évid<strong>en</strong>ce [Ushioda, 1996 ; Oxford, 1999 ; Williams & Burd<strong>en</strong>, 1997 ;Viau, 1999]. Les modèles élaborés par les spécialistes du contexte scolaire ont tous commeobjectif <strong>de</strong> r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> comme un processus.7 Je r<strong>en</strong>voie à cet égard à l’article pas terminé ?18


L’approche par les cont<strong>en</strong>usLes théories <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>us t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t d’expliquer par quoi on est motivé, les cont<strong>en</strong>us pouvantvarier d’un ag<strong>en</strong>t à l’autre, d’une tâche à l’autre ; les théories <strong>de</strong> processus décriv<strong>en</strong>t leprocessus <strong>motivation</strong>nel, comm<strong>en</strong>t on est motivé ou non. Il n’y a pas <strong>de</strong> diverg<strong>en</strong>ce sur cepoint, les <strong>de</strong>ux théories ne s’affront<strong>en</strong>t pas, elles sont simplem<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>trées sur <strong>de</strong>s objetsdiffér<strong>en</strong>ts, parfois complém<strong>en</strong>taires. Les théories <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>us sont plus anci<strong>en</strong>nes que lesthéories <strong>de</strong> processus [Francès, 1995 ; Dörnyei, 2005]. Elles cherch<strong>en</strong>t à inv<strong>en</strong>torier lesdiverses att<strong>en</strong>tes qui peuv<strong>en</strong>t mobiliser les ag<strong>en</strong>ts. Dans le langage courant, le terme <strong>motivation</strong>regroupe <strong>en</strong> fait un <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>us. <strong>La</strong> question « êtes-vous motivé par votre travail <strong>en</strong>LVE ? » sous-<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d « y-a-t-il un aspect <strong>de</strong> votre travail <strong>en</strong> LVE auquel vous t<strong>en</strong>ez, qui a <strong>de</strong>l’importance pour vous ? ». Les thèmes <strong>de</strong> réponses à cette question (les cont<strong>en</strong>us) ont étésinv<strong>en</strong>toriés, classés par ordre d’importance selon différ<strong>en</strong>tes théories que l’on cherche à vali<strong>de</strong>rpar <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> performances ou <strong>de</strong>s questionnaires, comme chez Gardner et <strong>de</strong> sescollaborateurs [Gardner, 1972, 1985], notamm<strong>en</strong>t dans leur modèle AMBT (Attitu<strong>de</strong> andMotivation Battery Test). L’idée consiste à rechercher l’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> facteurs <strong>motivation</strong>nelssur l’acquisition <strong>de</strong> la LVE. On considère chaque facteur comme un élém<strong>en</strong>t stable, susceptibled’être extrait à partir <strong>de</strong> batteries <strong>de</strong> questionnaires. Dans ce cas, les auteurs part<strong>en</strong>t du modèlesocio-éducationnel <strong>de</strong> Gardner [1985] qui id<strong>en</strong>tifie 5 variables : l’intégrativité, les attitu<strong>de</strong>s visà-vis<strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage, la <strong>motivation</strong>, l’ori<strong>en</strong>tation intégrative ou l’ori<strong>en</strong>tation instrum<strong>en</strong>tale.On cherche <strong>en</strong>suite à savoir comm<strong>en</strong>t ces variables se corrèl<strong>en</strong>t avec les performances <strong>de</strong>sappr<strong>en</strong>ants <strong>en</strong> LVE ou langue secon<strong>de</strong>. Par exemple, dans une réc<strong>en</strong>te méta-analyse, les auteursont trouvé que la <strong>motivation</strong> était le meilleur « prédicteur » <strong>de</strong> succès alors que les ori<strong>en</strong>tationsou les attitu<strong>de</strong>s <strong>en</strong>vers la situation d’appr<strong>en</strong>tissage n’agissai<strong>en</strong>t qu’indirectem<strong>en</strong>t sur lesperformances, c’est-à-dire via la <strong>motivation</strong> [Masgoret & Gardner, 2003].De manière générale, les individus sont motivés par <strong>de</strong>s besoins qu’ils cherch<strong>en</strong>t à satisfaire,comme l’indique la théorie fondatrice <strong>de</strong>s besoins fondam<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> Maslow [1954] qui portesur les relations <strong>en</strong>tre personnalité et <strong>motivation</strong>, ou celle <strong>de</strong> Nuttin [1980] qui porte sur lesrelations <strong>en</strong>tre personnalité, <strong>motivation</strong> et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.19


Accomplissem<strong>en</strong>t Personnel (Estime <strong>de</strong> soi)Estime <strong>de</strong>s AutresAmour, appart<strong>en</strong>anceSécuritéPhysiologiqueFigure 1 <strong>La</strong> pyrami<strong>de</strong> <strong>de</strong>s besoins, d’après [Maslow, 1970]Cette métaphore hiérarchique exprime le fait que lorsque les besoins d’un niveau inférieursont satisfaits, même <strong>de</strong> manière incomplète ou temporaire, les individus sont s<strong>en</strong>sibilisés à <strong>de</strong>sbesoins <strong>de</strong> niveau supérieur. Ces <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t importants et acquièr<strong>en</strong>t un pouvoirmobilisateur plus ou moins grand selon leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> satisfaction. Cela ne signifie pas que lesbesoins <strong>de</strong>s niveaux inférieurs disparaiss<strong>en</strong>t dès qu’un besoin <strong>de</strong> niveau supérieur émerge.Lorsqu’un besoin est satisfait (<strong>de</strong> manière constante), il <strong>en</strong>traîne l’émerg<strong>en</strong>ce d’un besoinsupérieur dans la hiérarchie et perd <strong>de</strong> l’importance aux yeux du travailleur, au profit dunouveau besoin. Par exemple, un élève qui s’estime bi<strong>en</strong> noté recherchera davantage lareconnaissance qu’une meilleure note. S’il n’<strong>en</strong> obti<strong>en</strong>t pas assez dans son travail, il pourrapourtant continuer à réclamer <strong>de</strong>s notes plus élevées <strong>en</strong> guise <strong>de</strong> comp<strong>en</strong>sation mais leurpouvoir mobilisateur sera moindre. Dans certaines circonstances, les besoins satisfaitsconserv<strong>en</strong>t néanmoins un tel pouvoir. Ces mécanismes <strong>de</strong>s besoins ont été tout à fait éclairantspour la recherche m<strong>en</strong>ée sur le logiciel Tell Me More citée plus haut. Il ne faut donc pas avoirune vision linéaire du passage d’un besoin à un autre, or, c’est le risque auquel on s’exposeavec la métaphore <strong>de</strong> la pyrami<strong>de</strong>.Les approches par les cont<strong>en</strong>us ont largem<strong>en</strong>t contribué à nous permettre <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>quoi était faite la <strong>motivation</strong> pour la LVE : l’image <strong>de</strong> la langue, le plaisir <strong>de</strong> la parler, le désir<strong>de</strong> s’intégrer ou non, le désir <strong>de</strong> trouver un travail et plus tard, le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce, laperception <strong>de</strong> son autonomie, la volonté <strong>de</strong> se dépasser, d’être reconnu par ses pairs, sespar<strong>en</strong>ts, ses professeurs, etc. Cep<strong>en</strong>dant, <strong>de</strong> telles approches revi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à découper la<strong>motivation</strong> <strong>en</strong> une série <strong>de</strong> facteurs discrets alors que nous savons aujourd’hui qu’elle naît <strong>de</strong>l’interaction <strong>en</strong>tre toutes sortes <strong>de</strong> facteurs, dont les facteurs cognitifs longtemps ignorés[Dörnyei, 2009, a & b]. Par ailleurs, sous-jac<strong>en</strong>te à ces <strong>en</strong>quêtes se trouve l’idée que la<strong>motivation</strong> est un état stable qu’on peut id<strong>en</strong>tifier et décrire à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> questionnaires passésune fois, or, c’est au contraire un état extrêmem<strong>en</strong>t labile. Enfin, c’est ignorer l’importance du20


contexte ou <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, tant du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’activité concernée (l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong>la LVE) que du point <strong>de</strong> vue du recueil <strong>de</strong>s données (les conditions <strong>de</strong> passation <strong>de</strong>squestionnaires).Au cours <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières déc<strong>en</strong>nies, les théories <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>us se sont vues largem<strong>en</strong>tconcurr<strong>en</strong>cées par les théories du processus, qui intègr<strong>en</strong>t les cont<strong>en</strong>us <strong>en</strong>visagés autrefois <strong>de</strong>manière séparée, mais dans une perspective dynamique et systémique [voir, pour une revue,Dörnyei, 2009, pp. 209-219].L’approche par les processusLes théories <strong>de</strong> processus cherch<strong>en</strong>t à préciser comm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s variables interagiss<strong>en</strong>t pourmobiliser le comportem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>ts. On trouve tout d’abord <strong>de</strong>s théories assez anci<strong>en</strong>nesmais plutôt négligées aujourd’hui, comme celle <strong>de</strong> Hull [1952] ou celle <strong>de</strong> Lewin, avec leconcept d’espace <strong>de</strong> vie [1959]. Chacune <strong>de</strong> ces théories postule l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> forces<strong>motivation</strong>nelles contradictoires qui ne sont pas seulem<strong>en</strong>t cognitives ou affectives maiségalem<strong>en</strong>t sociales. Ce sont les théories dominantes <strong>en</strong> SLA <strong>de</strong>puis le fameux « educationalshift » <strong>de</strong>s années 1990 [Oxford, 1999], c’est-à-dire <strong>de</strong>puis que les théorici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>se sont intéressées à la <strong>motivation</strong> à l’école. En effet, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> formation a exigéque soit <strong>en</strong>visagée la <strong>motivation</strong> sur le plan temporel, dans son évolution, et donc que l’onpasse d’une approche structuraliste, <strong>de</strong> type « état », à une approche plus dialectique, <strong>de</strong> type« processus ». la définition <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> que je propose est inspirée <strong>de</strong> ce courant.<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> pour appr<strong>en</strong>dre une langue étrangère <strong>en</strong>situation académique peut être définie comme un mécanismepsychologique qui génère le désir d'appr<strong>en</strong>dre la languesecon<strong>de</strong>, qui décl<strong>en</strong>che <strong>de</strong>s comportem<strong>en</strong>ts d'appr<strong>en</strong>tissage,notamm<strong>en</strong>t la prise <strong>de</strong> parole <strong>en</strong> classe <strong>de</strong> langue, qui permet àl'élève <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir son <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t à réaliser les tâchesproposées quel que soit le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> réussite immédiate dansson interaction avec les autres élèves ou le professeur, qui leconduit à faire usage <strong>de</strong>s instrum<strong>en</strong>ts d'appr<strong>en</strong>tissage mis à sadisposition (manuel, dictionnaire, tableau, CD ROMS) et qui,une fois la tâche terminée, le pousse à r<strong>en</strong>ouveler son<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans le travail linguistique et culturel [Raby,2008, p.2].<strong>La</strong> <strong>motivation</strong> dans le cadre <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage académique <strong>de</strong>s langues21


Ce modèle n’est pas loin <strong>de</strong> celui développé par Vroom [1964] 8 . Cette théorie cognitiviste,appelée aussi « la théorie du résultat escompté », repose sur trois concepts :<strong>La</strong> « val<strong>en</strong>ce » (V) : c’est la valeur, positive ou négative, que l’on attribue au résultat <strong>de</strong> sesactions ou <strong>de</strong> sa performance. C’est répondre à la question : ce que j’obti<strong>en</strong>s <strong>en</strong> retour pour maperformance accomplie, est-ce important ou non pour moi ? Dans le cadre du travail, parexemple, l’important pour certains peut être le niveau du salaire, pour d’autres, avoir du tempslibre. Ces préfér<strong>en</strong>ces sont mesurables sur une échelle <strong>de</strong> -10 à +10.L’« instrum<strong>en</strong>talité » (I) : est-ce que la performance est corrélée avec le résultat ? C’est laprobabilité perçue du li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre la performance à atteindre et ce que j’escompte <strong>en</strong> retour. C’estrépondre à la question : si je fais ceci, alors est-ce que j’obti<strong>en</strong>drai cela <strong>en</strong> retour ? Mesurablesur une échelle <strong>de</strong> 0 à 1.L’« att<strong>en</strong>te » (E) : est-ce que l’effort aboutit à une performance ? C’est répondre à laquestion : si je me mobilise pour faire cela, est-ce que j’arriverai à cette performance ?Mesurable sur une échelle <strong>de</strong> 0 à 1. Vroom propose une formule calculant la force <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> (F) :L’intérêt <strong>de</strong> ce modèle rési<strong>de</strong> dans les recherches quantitatives qui ont pu montrer un li<strong>en</strong><strong>en</strong>tre la <strong>motivation</strong>, ainsi mesurée, et les efforts déployés dans un travail ou un appr<strong>en</strong>tissage.8 On trouvera une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> ce modèle <strong>de</strong> <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> français dans : Levy-Leboyer, C. et Spérandio J.-C. (1987). Traité <strong>de</strong> psychologie du travail. PUF ou plus récemm<strong>en</strong>t dans Legrain H. (2003). Motivation àappr<strong>en</strong>dre : mythe ou réalité ? (pp. 42-51). L’Harmattan.23


Le modèle <strong>de</strong> Dörnyei : priorité au processusPour mes premières recherches [Raby, 2004, 2006, Raby, 2007] je me suis appuyée sur lemodèle d’Otto et Dörnyei [1998, 2001, 2003] pour trois raisons ess<strong>en</strong>tielles. Tout d’abord, ilfait partie <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> académique 9 . À ce titre, il examine la <strong>motivation</strong> dans<strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> travail, un travail d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t ou d’appr<strong>en</strong>tissage, ce qui correspondparfaitem<strong>en</strong>t à l’objet <strong>de</strong> mes recherches. Par ailleurs, bi<strong>en</strong> qu’il ne mette pas <strong>en</strong> avant lefacteur linguistique, il a été conçu par <strong>de</strong>s spécialistes <strong>de</strong> SLA et la dim<strong>en</strong>sion LVE s’intègredonc parfaitem<strong>en</strong>t dans ce modèle. Enfin et surtout, c’est un modèle dynamique dont l’objectifest <strong>de</strong> suivre l’évolution <strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>ts dans <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> travail données, il est donc conformeà ma démarche ergonomique [Dörnyei, 2003, pp. 18-21].To summarize the ess<strong>en</strong>ce of the approach in one (long)s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ce, a process mo<strong>de</strong>l of L2 <strong>motivation</strong> breaks down theoverall <strong>motivation</strong>al process into several discrete temporalsegm<strong>en</strong>ts organized along the progression that <strong>de</strong>scribes howinitial wishes and <strong>de</strong>sires are first transformed into goals andth<strong>en</strong> into operationalized int<strong>en</strong>tions, and how these int<strong>en</strong>tionsare <strong>en</strong>acted, leading (hopefully) to the accomplishm<strong>en</strong>t of thegoal and conclu<strong>de</strong>d by the final evaluation of the process.[Dörnyei, 2003, p. 18]9 (je préfère académique à éducatif pour traduire educational)24


Françoise RABY-HDR Volume 1 – Synthèse-Cinquième partie : recherches sur la <strong>motivation</strong>CHOIX MOTIVATIONNEL MOTIVATION OPERATOIRE RETROSPECTION MOTIVATIONELLEFonctions <strong>motivation</strong>nellesFonctions <strong>motivation</strong>nellesFonctions <strong>motivation</strong>nellesFormation <strong>de</strong> buts et d’int<strong>en</strong>tions<strong>La</strong> et la création réalisation <strong>de</strong> sous tâches<strong>La</strong> formation d’explicationsDémarrage <strong>de</strong> l’actionPrincipalesinflu<strong>en</strong>ces<strong>motivation</strong>nellesLes propriétés du butValeurs associées au processusd’appr<strong>en</strong>tissage et à ses conséqu<strong>en</strong>cesL’évaluation <strong>en</strong> continu <strong>de</strong> son travailLe contrôle <strong>de</strong> l’action et l’auto-régulationPrincipales influ<strong>en</strong>ces <strong>motivation</strong>nelles<strong>La</strong> qualité <strong>de</strong> l’expéri<strong>en</strong>ce d’appr<strong>en</strong>tissageLe s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’autonomieL’élaboration <strong>de</strong> critères et <strong>de</strong> stratégies et<strong>de</strong> règlesLe changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> buts et <strong>de</strong> stratégiesMain <strong>motivation</strong>al influ<strong>en</strong>cesLes facteurs attributionnels (internal versusexternal le lieu <strong>de</strong> control)Attitu<strong>de</strong>s vis à vis <strong>de</strong> la LV et <strong>de</strong>ses locuteursEspérance <strong>de</strong> succèsL’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s professeurs ou <strong>de</strong>s par<strong>en</strong>ts<strong>La</strong> récomp<strong>en</strong>se scolaireL’image <strong>de</strong> soi et tout ce qui s’y rapporteLes feedbacks (notes, louanges, reproches)25


Croyances et stratégies <strong>de</strong>sappr<strong>en</strong>antsL’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t comme supportou comme obstacleFrançoise RABY-HDR Volume 1 – Synthèse-Cinquième partie : recherches sur la <strong>motivation</strong>L’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s pairs et du groupeL’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t comme support oucomme obstacle<strong>La</strong> connaissance et l’utilisation <strong>de</strong>strategies régulatoiresLe retour du groupeLes réactions <strong>de</strong>s par<strong>en</strong>tsFigure 2 Le modèle dynamique adapté <strong>de</strong> Dörnyei [2003, p. 19]26


Françoise RABYUn exemple <strong>de</strong> recherche sur un dispositif motivantLes hypothèsesHypothèse 1 : les élèves <strong>de</strong> types intégratifs ou autodéterminés seront plusmotivés par le scénario d’ESCALE, qui fait appel à l’autonomie et à la créativité, queles élèves <strong>de</strong> types instrum<strong>en</strong>taux ou déterminés extrinsèquem<strong>en</strong>t.Hypothèse 2 : Les élèves ayant un fort s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> anglais et/ou<strong>en</strong> informatiqueSous hypothèse 2-1 seront plus <strong>en</strong>clins à s’<strong>en</strong>gager dans le scénarioSous hypothèse 2-2 dresseront un bilan plus positif du scénarioHypothèse 3 : Les élèves qui accord<strong>en</strong>t plus d’importance à la créativité serontplus motivés que ceux motivés par la note.Hypothèse 4 : L’autonomie est un facteur important <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>Hypothèse 5 : Les élèves <strong>en</strong> situation <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat auront une <strong>motivation</strong> plusgran<strong>de</strong> que ceux placés <strong>en</strong> situation <strong>de</strong> travail individuel d’un relatif handicaptechniqueHypothèse 6 : Les filles seront moins motivées par ce type <strong>de</strong> projet que lesgarçons du faitHypothèse 7 : En répondant au besoin d’accomplissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s élèves faibles onpeut restaurer l’image qu’ils ont d’eux-mêmes et les conduire sur le chemin d’une re<strong>motivation</strong>.Hypothèse 8 : les élèves utilisant l’ordinateur seront plus motivés que les élèvesutilisant le support papier.27


Françoise RABYUne démarche <strong>de</strong> recherche : la triangulationDans mes premières recherches, j’ai pu tester tel ou tel facteur ou bi<strong>en</strong> analysertelle ou telle phase du processus. Ainsi, dans la recherche au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> langues, nousavons testé l’influ<strong>en</strong>ce du facteur instrum<strong>en</strong>tal et <strong>de</strong> l’autonomie sur l’évolution <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>ants [Raby, 2007] et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignants [Borghès, 2001], dans larecherche « Tell Me More », nous avons étudié l’impact d’un dispositifd’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t tutoré à distance sur l’évolution <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>ants etl’impact <strong>motivation</strong>nel <strong>de</strong> l’ergonomie du logiciel [Raby, 2004a]. Mais c’est avec leprogramme ESCALE [Raby, 2008b] que nous avons été <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> mettrepleinem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> œuvre un modèle dynamique <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, puisque nous avonspris <strong>en</strong> compte le projet du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>ants, <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignants et <strong>de</strong> leursinteractions. Ce fut un travail d’équipe qui a regroupé <strong>de</strong>s spécialistes <strong>de</strong> la LSA, <strong>de</strong>la didactique <strong>de</strong>s langues, <strong>de</strong> la psychologie sociale et cognitive, tous ces points <strong>de</strong>vue étai<strong>en</strong>t nécessaires pour approcher le phénomène dans sa complexité et sacontinuité. Le travail <strong>de</strong> doctorat <strong>de</strong> madame Pénilla illustre parfaitem<strong>en</strong>t l’esprit etla métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre démarche. Elle a pris <strong>en</strong> charge l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong>sproductions <strong>de</strong>s élèves et je la convie à donner son point <strong>de</strong> vue dans la discussion.Dans l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> mes recherches sur la <strong>motivation</strong> à l’école, j’ai t<strong>en</strong>téd’opérationnaliser le processus, c'est-à-dire <strong>de</strong> suivre la <strong>motivation</strong> <strong>de</strong>s élèves ou <strong>de</strong>professeurs avant la tâche ou après la tâche, <strong>en</strong> faisant appel à la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> latriangulation qui consiste à confronter les points <strong>de</strong> vue ou les résultats afin <strong>de</strong>compr<strong>en</strong>dre ce qui se passe et <strong>de</strong> suivre l’évolution <strong>de</strong>s processus.28


Françoise RABYTemporelleOn cherche à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte les facteurs duchangem<strong>en</strong>t et à analyser les processus à l’œuvredans l’activité <strong>en</strong> adoptant une démarchelongitudinale, ou au moins, une démarchedynamiqueSpatialeElle consiste à m<strong>en</strong>é <strong>de</strong>s recherches au sein <strong>de</strong>cultures différ<strong>en</strong>tes pour tester, par exemple, lavalidité d’un modèle. Par exemple, l’image <strong>de</strong> lalangue est-elle la même dans divers pays ?[Fagnant et al, 2008]Parcombinaison d<strong>en</strong>iveauxOn utilise différ<strong>en</strong>ts niveaux d’analyse. Parexemple dans le modèle <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>hiérarchique <strong>de</strong> Vallerand [1997] on combine l<strong>en</strong>iveau global (l’école), contextuel (le domaine <strong>de</strong>tâche <strong>en</strong> langues) et situationnel (celui <strong>de</strong> lasituation <strong>de</strong> travail à un temps T donné].ThéoriqueOn confronte le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> diverses théoriessur la questionLes acteursOn confronte le point ce vue <strong>de</strong>s observateurs, celacorrespond à la notion <strong>de</strong> fidélité interjuges, maisaussi, dans le cas d’une démarche ergonomique,les points <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> tous les ag<strong>en</strong>ts au travail sontaussi confrontés <strong>en</strong>tre eux et à ceux <strong>de</strong>sobservateurs.MéthodologiqueLe chercheur a recours à <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes<strong>de</strong> production ou <strong>de</strong> traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> données.Figure 2 Les différ<strong>en</strong>ts types <strong>de</strong> triangulation<strong>La</strong> macro-triangulation29


Françoise RABY<strong>La</strong> micro triangulation <strong>de</strong>s données : le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’élève30


Françoise RABYLes principaux résultatsUn projet ambitieux (la création <strong>de</strong> la une d’un journal <strong>en</strong> langue étrangère m<strong>en</strong>ésur une longue durée), peut stimuler la <strong>motivation</strong> et même la réussite <strong>de</strong>s élèvesréparant confortant l’estime <strong>de</strong> soi et le plaisir du travail chez les plus performants etréparant un peu <strong>de</strong> l’estime <strong>de</strong> soi <strong>de</strong>s élèves <strong>en</strong> difficultés. Grâce à la manipulation<strong>de</strong> domaines <strong>de</strong> tâches complém<strong>en</strong>taires et au part<strong>en</strong>ariat, grâce aux outils <strong>de</strong>régulation, l’élève est arrivé au bout <strong>de</strong> l’effort et <strong>de</strong> réels progrès se font s<strong>en</strong>tir.Certes, ce n’est pas que la compét<strong>en</strong>ce dans la LVE qui progresse énormém<strong>en</strong>t maisnous ne p<strong>en</strong>sons pas que <strong>de</strong> réels progrès langagiers puiss<strong>en</strong>t être le fruit <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxmois <strong>de</strong> travail. En revanche, comme le souligne Clém<strong>en</strong>t, Dörnyei & Noel (1994) leprocessus <strong>motivation</strong>nel implique un cheminem<strong>en</strong>t qui va <strong>de</strong> l’amélioration dus<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’efficacité linguistique (la confiance que nous avons <strong>en</strong> nos possibilités<strong>de</strong> m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> une tâche particulière) vers l’amélioration du s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> confiancelinguistique (la confiance que l’on a dans ses compét<strong>en</strong>ces linguistiques <strong>en</strong> général).En d’autres termes, c’est <strong>en</strong> mettant l’élève <strong>en</strong> situation <strong>de</strong> réussir une tâcheexigeante que nous pouvons espérer graduellem<strong>en</strong>t « réparer » son manque d’estime<strong>de</strong> soi et restaurer sa <strong>motivation</strong> pour la L2.Un modèle dynamique, polytomique et pondéré [Raby, 2009]Le projet ESCALE ainsi que les résultats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> mes recherches, m’ontam<strong>en</strong>ée à rev<strong>en</strong>ir sur mon modèle <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>. Le va-et-vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre le modèle etl’activité continue <strong>en</strong>core à caractériser ma démarche sci<strong>en</strong>tifique et mon travaild’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche. Il manquait, <strong>en</strong> effet, au modèle <strong>de</strong> processus <strong>de</strong>Dornyei [voir, p.28] qui a inspiré mes premières recherches, le plus connu, <strong>de</strong>pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> la dim<strong>en</strong>sion dialectique du phénomène. Or, j’ai appris sur leterrain qu’un même facteur peut jouer dans les <strong>de</strong>ux s<strong>en</strong>s : dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’activitéou dans un s<strong>en</strong>s contraire à l’activité ; dans le s<strong>en</strong>s d’un r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> ou dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> son affaiblissem<strong>en</strong>t… ou <strong>en</strong>core dans un s<strong>en</strong>s nul. Lesfacteurs <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> sont comme la langue d’Esope !31


Françoise RABYUne approche polytomiqueIl me fallait donc établir un modèle qui puisse r<strong>en</strong>dre compte du fait que lesfacteurs pouvai<strong>en</strong>t se réaliser selon trois modalités : positive, négative ou neutre.J’utilise le terme polytomique, que j’emprunte à l’analyse statistique, pour désignercette caractéristique. J’avais découvert les modèles dichotomiques lorsque j’ai vouludécrire une salle d’appr<strong>en</strong>tissage multimédia comme un univers à n dim<strong>en</strong>sions,défini par toutes les variables qui caractérisai<strong>en</strong>t ce dispositif [voir chapitre 14].Pascal Bressoux, le statistici<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’équipe, recommanda <strong>de</strong> choisir le modèle <strong>de</strong>l’analyse <strong>de</strong>s correspondances multiples [B<strong>en</strong>zecri, 1980]. Ce modèle est ditdichotomique, c’est-à-dire qu’il pr<strong>en</strong>d <strong>en</strong> compte à la fois l’occurr<strong>en</strong>ce et la nonoccurr<strong>en</strong>ced’une variable [Raby et al, 2003]. On considère ici que l’activité <strong>de</strong>sag<strong>en</strong>ts doit être décrite <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> ce qu’ils font et <strong>de</strong> ce qu’ils ne font pas.Intellectuellem<strong>en</strong>t, la démarche s’appar<strong>en</strong>te à celle <strong>de</strong> l’analyse du discours, c’est-àdireà rechercher ce qui n’est pas dit au même titre que ce qui est dit dans un texte.Dans le cas <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, je ne pouvais pas appliquer ce schéma, puisque mesfacteurs pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> compte trois modalités : <strong>motivation</strong>, dé<strong>motivation</strong> et effet nul.J’ai donc recherché les modèles sci<strong>en</strong>tifiques qui pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> compte plusieursmodalités : ce sont les modèles polytomiques. Voici un exemple d’une telle analysechez les appr<strong>en</strong>ants : considérant que l’autonomie est considérée comme source <strong>de</strong><strong>motivation</strong> pour les appr<strong>en</strong>ants, j’ai cherché, dans leurs discours, <strong>de</strong>s énoncés danslesquels le terme est affecté <strong>de</strong> la valeur + (par exemple, le choix), <strong>de</strong>s énoncés quiexprim<strong>en</strong>t une valeur - (par exemple, une perte <strong>de</strong> temps) ou <strong>en</strong>core l’expressiond’une indiffér<strong>en</strong>ce (ça ne change ri<strong>en</strong>, valeur =). J’aurai donc, pour un même facteur,trois modalités d’occurr<strong>en</strong>ce. Autre exemple, dans le projet Escale, les appr<strong>en</strong>ants<strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t juger si la possibilité <strong>de</strong> collaborer sur les divers buts qui leur étai<strong>en</strong>tproposés se révélait motivante pour certaines raisons, démotivante pour d’autres, ou<strong>en</strong>core sans effet.<strong>La</strong> pondération <strong>de</strong>s facteursJ’ai éprouvé une autre insatisfaction <strong>de</strong>vant mon premier modèle : il ne r<strong>en</strong>daitpas compte du poids <strong>de</strong>s facteurs. C’est la recherche que j’ai m<strong>en</strong>ée sur le facteur32


Françoise RABY« instrum<strong>en</strong>t » comme facteur <strong>motivation</strong>nel qui m’a mise sur cette voie. L’analyse<strong>de</strong>s journaux t<strong>en</strong>us par les élèves montrait, <strong>en</strong> effet, que le facteur <strong>motivation</strong>nelpouvait jouer <strong>de</strong> manière nécessaire ou conting<strong>en</strong>te. J’ai donc distingué <strong>de</strong>ux typesd’énoncés : ceux dans lesquels les appr<strong>en</strong>ants exprimai<strong>en</strong>t le fait que sansl’instrum<strong>en</strong>t, ils n’aurai<strong>en</strong>t pas pu réaliser la tâche (j’ai appelé cette modalité primaryrank factor) et ceux dans lesquels ils exprimai<strong>en</strong>t le fait que l’instrum<strong>en</strong>t les avaitaidés, stimulés, ou qu’il leur tout simplem<strong>en</strong>t plu (j’ai appelé cette modalitésecondary rank factor) [Raby, 2007]. Il ne suffit pas <strong>de</strong> dégager <strong>de</strong>s facteurs internesou externes <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, il faut aussi pr<strong>en</strong>dre consci<strong>en</strong>ce du rang (conting<strong>en</strong>t ounécessaire) qu’ils occup<strong>en</strong>t, afin <strong>de</strong> cibler <strong>en</strong> priorité ceux qui sont ess<strong>en</strong>tiels dans ledispositif pédagogique.Ces recherches m’ont aussi conduite à réévaluer le poids <strong>de</strong> certains facteurs, <strong>en</strong>accordant une place importante aux facteurs dits externes, alors que le courantdominant <strong>de</strong>s recherches met l’acc<strong>en</strong>t sur les composants internes <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>.De ce point <strong>de</strong> vue, l’évolution <strong>de</strong> la théorisation <strong>de</strong> Dörnyei est très intéressante. En1998, il a produit un modèle dynamique <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> qu’il prés<strong>en</strong>tait clairem<strong>en</strong>tcomme un modèle situé et bi<strong>en</strong> adapté à la classe, parce qu’il mettait <strong>en</strong> relation la<strong>motivation</strong> et les diverses phases <strong>de</strong> l’action. En 2005, il a élaboré un nouveaumodèle dont les fonctions étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> synthétiser les diverses théories et <strong>de</strong> s’appliquerà toutes sortes d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>ts d’appr<strong>en</strong>tissage :The new construct – the “ L2 Motivational Self-System” attempts to synthesize a number of influ<strong>en</strong>tialapproaches in the field (e.g. Gardner 1985; Noël 2003;Ushioda 2001) and at the same time broad<strong>en</strong>s thescope of L2 <strong>motivation</strong> theory to make it applicable indiverse language learning <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>ts in the curr<strong>en</strong>t,increasingly globalized world. (For a <strong>de</strong>tailed<strong>de</strong>scription, see Dörnyei 2009). [Dörnyei, 2009,p. 212]On pouvait alors p<strong>en</strong>ser que, du fait <strong>de</strong> son élargissem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> l’acc<strong>en</strong>t mis sur lesthéories du moi (i<strong>de</strong>al self+ought self), le modèle allait perdre <strong>de</strong> son efficacité pourr<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong>s situations académiques d’appr<strong>en</strong>tissage. En effet, les divers<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>ts d’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong> la L2 inclu<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>ts noninstitutionnels. Dès lors, la notion <strong>de</strong> situation <strong>de</strong> travail qui est au cœur <strong>de</strong>33


Françoise RABYl’approche ergonomique disparaissait et l’importance <strong>de</strong>s facteurs contextuels ou<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux diminuait au profit <strong>de</strong>s facteurs relevant du moi. Dans ces<strong>de</strong>rnières formulations, Dörnyei semble consci<strong>en</strong>t du problème lorsqu’il écrit :However, I also felt that we nee<strong>de</strong>d to add a thirdmajor constitu<strong>en</strong>t, which was associated with the directimpact of the stud<strong>en</strong>ts’ learning <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t. After all,one of the main achievem<strong>en</strong>ts of the “educational shift”of <strong>motivation</strong> research in the 1990s was the recognitionof the <strong>motivation</strong>al impact of the main compon<strong>en</strong>ts ofthe classroom learning situation, such as the teacher,the curriculum, and the learner group. [Dörnyei,op.cit., p. 217]Et son <strong>de</strong>rnier modèle est composé <strong>de</strong>s mois idéaux et prescrits, auxquels il ajoutel’expéri<strong>en</strong>ce d’appr<strong>en</strong>tissage.ConclusionPersonnellem<strong>en</strong>t, je suis convaincue, dans le cas <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>en</strong> situation <strong>de</strong>travail, <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong>s facteurs externes. Certes, les didactici<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s langues nesaurai<strong>en</strong>t les ignorer, surtout ceux qui travaill<strong>en</strong>t sur les TICE, mais trop souv<strong>en</strong>t,leur importance reste sous-évaluée parce qu’ils sont associés à la <strong>motivation</strong>extrinsèque, considérée comme la « mauvaise » <strong>motivation</strong> par rapport à la<strong>motivation</strong> intrinsèque, qui serait la « bonne » <strong>motivation</strong>. Il y a là, à mon avis,confusion <strong>en</strong>tre la « nature » <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> et le « facteur » <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> et jevais t<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> m’expliquer sur ce point. <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est un état psychologique. Iln’existe donc pas, <strong>en</strong> toute logique, <strong>de</strong> <strong>motivation</strong> interne ou externe, comme on le litsouv<strong>en</strong>t, puisqu’elle ne peut être qu’interne. <strong>La</strong> question est alors <strong>de</strong> savoir ce quipousse l’individu à agir, quelles représ<strong>en</strong>tations ? Quelles att<strong>en</strong>tes ? Quellesattributions ? Toutes les théories actuelles affirm<strong>en</strong>t que le facteur le plus efficace estcelui qui émane du sujet et non <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Cette vision dichotomique meparait erronée car elle repose sur un modèle homéostatique. Or, <strong>de</strong> ce point <strong>de</strong> vue,l’épistémologie génétique <strong>de</strong> Piaget [1967], la théorie <strong>de</strong> l’étayage <strong>de</strong> Bruner [1983]ou la théorie génétique historique et culturelle <strong>de</strong> Vytgotsky [1978] se rejoign<strong>en</strong>t :nous sommes <strong>de</strong>s organismes <strong>en</strong> perpétuel mouvem<strong>en</strong>t et déséquilibre, un seulcomposant du système peut affecter un composant <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce éloigné, et c’est34


Françoise RABYdans l’interaction avec notre <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t que se développe l’individu. Enconséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ces idées très générales, c’est dans l’interaction avec les autrescomposants humains et matériels <strong>de</strong> la classe que la <strong>motivation</strong> pour la tâche va sedévelopper chez l’élève. Ce sont bi<strong>en</strong> les facteurs externes, in fine, qui provoqu<strong>en</strong>tl’évolution, mais ces facteurs externes sont, <strong>en</strong> quelque sorte, « traités » par lecerveau <strong>de</strong> l’élève, et c’est là que les mécanismes internes intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t. Nierl’importance <strong>de</strong>s facteurs externes, c’est <strong>en</strong> fait rejeter toute théorie dudéveloppem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> particulier celui <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> ou <strong>de</strong> la dé<strong>motivation</strong>.L’<strong>en</strong>seignant, les outils, les pairs mérit<strong>en</strong>t tous leur place dans les recherches.Cep<strong>en</strong>dant, ils ne doiv<strong>en</strong>t pas être vus comme <strong>de</strong>s objets externes à l’élève maiscomme <strong>de</strong>s instrum<strong>en</strong>ts au s<strong>en</strong>s anthropologique que Simondon [1989]ou Vytgotsky[1978] accord<strong>en</strong>t à ce terme. <strong>La</strong> perception que les élèves ont du projet, <strong>de</strong>s outils, <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>seignant, <strong>de</strong> l’évaluation r<strong>en</strong>contre les « I<strong>de</strong>al L2 self » et les « Ought L2 Self ».C’est dans cette r<strong>en</strong>contre que se génère, se mainti<strong>en</strong>t et se r<strong>en</strong>ouvelle la <strong>motivation</strong>,mais comm<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> cette r<strong>en</strong>contre ? Le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong>s langues via le web2, les secon<strong>de</strong>s vies, et même le web3 r<strong>en</strong>d cesquestions <strong>en</strong>core plus complexes mais passionnantes à traiter. Une vision techniciste<strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, fait <strong>de</strong>s miracles technologiques les sources mêmes <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> (abolition du temps et <strong>de</strong>s frontières, ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> nos capacitéscognitives, création <strong>de</strong> réseau <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contre et <strong>de</strong> partage à l’infini et l’appr<strong>en</strong>antvéritable acteur du mon<strong>de</strong> virtuel) alors qu’une vision anthropologique, mettre <strong>en</strong>avant le projet <strong>de</strong> l’individu ou <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignant. Le web2 ou 3, oui mais pourquoifaire <strong>en</strong>semble ? On découvrira alors, que la technologie reste la langue d’Esope :qu’elle peut susciter l’appr<strong>en</strong>tissage ou au contraire <strong>en</strong> distraire l’appr<strong>en</strong>ant.A partir <strong>de</strong> toutes ces réflexions, <strong>de</strong>meure la question générale du colloque Quelleréponse la recherche peut-elle apporter à cette question ? Il me semble que <strong>de</strong>uxfacteurs très importants sont à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte, le facteur culturel organisé autour<strong>de</strong> la r<strong>en</strong>contre et <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s mois : expression du moi coré<strong>en</strong> face àl’altérité française (mais Madame Zarate parlera mieux que moi <strong>de</strong> cet aspect) et lefacteur du contrôle par l’appr<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> son activité, tout au long <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage.Cela suppose un savant mélange <strong>de</strong> contrainte et <strong>de</strong> liberté. Les expéri<strong>en</strong>ces m<strong>en</strong>éespar mon équipe autour du Français <strong>en</strong> ligne, fourniss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s exemples tout à fait35


Françoise RABYstimulants <strong>de</strong> projets ou dispositifs tout à fait motivants via l’approche pragmatiquemais <strong>en</strong> même temps les recherches dévoil<strong>en</strong>t combi<strong>en</strong> la <strong>motivation</strong> est fragile dèslors que le moi <strong>de</strong>s l’appr<strong>en</strong>ant s’expose dans l’échange [Mang<strong>en</strong>ot, 2009] Je vi<strong>en</strong>s<strong>de</strong> coordonner <strong>de</strong>ux numéros spéciaux consacrés à la <strong>motivation</strong> à pour la LE. L’unpour les langues mo<strong>de</strong>rnes 10 , l’autre est sous presse 11 , nous avons eu chaque fois d<strong>en</strong>ombreuses propositions <strong>de</strong> papiers témoignant <strong>de</strong> la vitalité et <strong>de</strong> la créativité <strong>de</strong> noscollègues japonais et coré<strong>en</strong>s sur ces questions. Leur imagination pédagogique et leurquestionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> chercheur sont impressionnants comme nous pouvons nous <strong>en</strong>apercevoir <strong>en</strong> consultant le programme du colloque.BibliographieAlmaberti, R., Montmollin, M. & Theureau, J. (1991). Modèles <strong>en</strong> analyse dutravail. Liège: Mardaga.Amalberti, R., Hoc, J-M. (1998). Analyse <strong>de</strong>s activités cognitives <strong>en</strong> situationdynamique : quels buts ? comm<strong>en</strong>t ? Le travail humain, 61(3), 209-234.Amalberti, R. H., J-M. (1999). Analyse <strong>de</strong>s activités cognitives <strong>en</strong> situationdynamique : d'un cadre théorique à une métho<strong>de</strong>. Le travail humain, 62(2), 97-129.Arnold, J. (Ed.). (1999). Affective <strong>La</strong>nguage Learning. NewYork: CambrigeUniversity Press.Bandura, A. (1980). L'appr<strong>en</strong>tissage social. Bruxelles: Mardaga.Bandura, A. (1993). Perceived self-efficacy in cognitive <strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t andfunctionning. Educational Pscyhologist(28), 117-148.10 Les langues mo<strong>de</strong>rnes [2008] F.Raby [Éd.], 3.11 LIDIL [ 2009] F. Raby & JP Narcy [Éds]. Entre dispositif et concept, la <strong>motivation</strong> pour la LVEà l’école.36


Françoise RABYBandura, A. (2003). Auto-efficacité: le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d'efficacité personnelle.Bruxelles: De Boeck.B<strong>en</strong>zecri, J. P. (1980). L'analyse <strong>de</strong>s données, tome 2 : l'analyse <strong>de</strong>scorrespondances. Paris: Bordas.Boackerts, M. (1986). Self-regulated learning. Where we are today.International Journal of Educational Research, 31, 445-456.Cury, F. S., P. (2001). Théories <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> et pratiques sportives. Paris:PUF.Deci, E., L., Ryan, R., M. (1985). Intrinsic <strong>motivation</strong> and self-<strong>de</strong>terminationin human behavior. New York: Pl<strong>en</strong>um. New York: Pl<strong>en</strong>um.Deci, L., Ryan, M. (2002). Handbook of self-<strong>de</strong>termination research.Rochester: The University of Rochester Press.Deci, L., Ryan, M. (2002). Handbook of self-<strong>de</strong>termination research.Rochester: The University of Rochester Press.Dörnyei, Z. (2001). Teaching and researching <strong>motivation</strong>. London: Longman.Dörnyei, Z. (2003). Attitu<strong>de</strong>s, Ori<strong>en</strong>tations and Motivations in <strong>La</strong>nguageLearning: Advances in Theory, Research, and Applications. <strong>La</strong>nguage Learning,53(supplem<strong>en</strong>t 1), 3-32.Dörnyei, Z. (2005). The psychology of the language learner. Mahwah::<strong>La</strong>wr<strong>en</strong>ce Erlbaum Associates.Dörnyei, Z. (2009). The psychology of second language acquisition. Oxford:OUP.Dweck, C., S. (1989). Motivation. In A. G. Lesgold, R. (Ed.), Foundations fora psychology of education (pp. 87-136). Hillsdale, N., J.: <strong>La</strong>wr<strong>en</strong>ce Erlbaum.Dweck, C., S. (1996). Motivational processes affecting <strong>motivation</strong>. AmericanPsychologist, 41, 1040-1048.F<strong>en</strong>ouillet, F. (2003). <strong>La</strong> <strong>motivation</strong>. Dunod: Paris.Frances, R. (1995). Motivation et effici<strong>en</strong>ce au travail. Liège: Mardaga.Freud, S. (1900). The complete introductory lectures on psychoanalysis. NewYork: Norton.Frost, D. (2008). The Stress <strong>Site</strong>: l'acc<strong>en</strong>t lexical, l'anglais <strong>de</strong> spécialité etl'oral. <strong>La</strong> conception d'un outil d'appr<strong>en</strong>tissage médiatisé. Bor<strong>de</strong>aux 2, Bor<strong>de</strong>aux.37


Françoise RABYGardner, R. C. (1985). Social psychology and second language learning: therole of attitu<strong>de</strong>s and <strong>motivation</strong>. London: Arnold.Gardner, R. C., <strong>La</strong>mbert, W., E. (1972). Attitu<strong>de</strong>s and <strong>motivation</strong> in secondlanguage learning. Rowley MA: Newbury House.Hackeman, J. P. O., G.R. (1976). Motivation through the <strong>de</strong>sign of work: Testof a theory in Organizational Behavior and Human Performance no. Journal ofApplied Psychology(16), 159-170.Hackman, J. R., and G. R. Oldham. (1980). Work Re<strong>de</strong>sign. Reading: Addison-Wesley.Julkun<strong>en</strong>, K. (1989). Situation and task specific <strong>motivation</strong> in foreign languagelearning and teaching. Jo<strong>en</strong>suu: University of Jo<strong>en</strong>suu.Julkun<strong>en</strong>, K. (2001). Situation and task-specific <strong>motivation</strong> in second languagelearning and teaching. In Z. Dornyei, Schmidt, R. (Ed.), Motivation and secondlanguage learning (pp. 29-42). Honolulu. HI: University of Hawai'i Press.Leplat, J. (1997). Regards sur l'activité <strong>en</strong> situation <strong>de</strong> travail. Paris: PUF.Leplat, J. (2000). L'analyse psychologique <strong>de</strong> l'activité <strong>en</strong> ergonomie.Toulouse: Octares.Leroy, N. (2009). Impact du contexte scolaire sur la <strong>motivation</strong> et sesconséqu<strong>en</strong>ces au plan <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>tissages., Université Pierre M<strong>en</strong>dès FranceGr<strong>en</strong>oble 2, Gr<strong>en</strong>oble.Lewin, K. (1959). Psychologie dynamique. les relations humaines. Paris: PUF.Maehr, M. L., & Braskamp, L. A. (1986). The <strong>motivation</strong>al factor : A theory ofpersonal investm<strong>en</strong>t. Lexington, MA: Lexington books.Markus, H., Nurius, P. (1986). Possible selves. American Psychologists, 41,954-969.Masgoret, A., M. (2003). Attitu<strong>de</strong>s, Motivation and Second <strong>La</strong>nguageLearning: a Meta Analysis of Studies Conducted by Gardner and Associates.<strong>La</strong>nguage Learning, 53(supplem<strong>en</strong>t 1), 167-210.Maslow. (1970). Motivation and personality (2nd edition éd.). New York:Haper and Row.Montmollin, M. d. (1997). Vocabulaire <strong>de</strong> l'ergonomie. Toulouse: Octares.38


Françoise RABYNicholson, J. G. (1984). Conception of Ability and Achievem<strong>en</strong>t Motivation.In R. Ames, E. & Ames, C. (Ed.), Research on Motivation in Education. 1, 39-73.Toronto: Toronto Aca<strong>de</strong>mic Press.Nowak, A., Vallacher, R., & Zochowski, M. (2005). The emerg<strong>en</strong>ce ofpersonality: dynamic foundations for individual variations. Developm<strong>en</strong>tal review,25, 351-385.Nuttin, J. (1980). Théorie <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> humaine. Paris: PUF.Otto, V., Dörnyei, Z.,. (1998). Motivation in action: a Process Mo<strong>de</strong>l of L2Motivation. Working papers in applied linguistics (Thames Valley, University ofLondon),(4), 43-69.Oxford, R. (1999). <strong>La</strong>nguage Learning Motivation: Paths to the New C<strong>en</strong>tury.Hawaï: University of Hawaï at Manoa.Putnam, H. (1983). Realism and Reason, Philosophical Papers (Vol. 3).Cambridge: CUP.Raby, F. (2004). Rapport <strong>de</strong> recherche et d'expertise Tell Me More. Gr<strong>en</strong>oble:Université Pierre M<strong>en</strong><strong>de</strong>s France.Raby, F. (2005). A User-C<strong>en</strong>tered Ergonomic Approach to CALL Research. In J.Elgbert & G. Petrie (Éds.), CALL Research Perspectives (pp. 179-190). Mahwah, NJ:<strong>La</strong>wr<strong>en</strong>ce Erlbaum Associates.Raby, F. (2006). Vers une cyber-équité : les effets d'un cyber-projet <strong>de</strong> languesur la <strong>motivation</strong> <strong>de</strong>s filles et <strong>de</strong>s garçons. Etu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> linguistique appliquée, avriljuin,142, 215-227.Raby, F. (2007). A triangular approach to <strong>motivation</strong> in Computer AssistedAutonomous <strong>La</strong>nguage Learning (CAALL). Recall, 19(2), 181-201.Raby, F. (2008). Compr<strong>en</strong>dre la <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> LV2 : quelques repères v<strong>en</strong>usd'ici et d'ailleurs. Les <strong>La</strong>ngues Mo<strong>de</strong>rnes, 3, 9-16.Raby, F. (2008). ESCALE : Les effets d'un cyber-scénario collaboratif surL'appr<strong>en</strong>tissage d'une LVE. Gr<strong>en</strong>oble: Ministère <strong>de</strong> l'éducation nationale. ACI Ecoleet Sci<strong>en</strong>ces Cognitives.Raby, F. (2009). The manifold Impact of Technology on Instructed Foreign<strong>La</strong>nguage Education: How the past accounts for the future. Paper pres<strong>en</strong>ted at the44th RELC International Seminar. The Impact of ICT, 8-10 mai 2009.39


Françoise RABYSchumann, J. H. (1998). The neurobiology of affect in language. Oxford:Blackwell.Schunk, D. H. (1987). Self-efficacy and motivating learning. In N. Hasting & J.Schwieso (Éds.), New directions in educational psychology (Vol. 2, pp. 233-251).London: Falmer Press.Schunk, D. H. (1989). Self-efficacy an Cognitive Achievem<strong>en</strong>ts. Implicationsfor for Stud<strong>en</strong>ts with Learning Problems. Journal of learning disabilities, 22(1), 14-22.Simondon, G. (1989). Du mo<strong>de</strong> d'exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s objets techniques(2ème.(Première édition 1958) ed.). Paris: Aubier.Skinner, B. F. (1967). Sci<strong>en</strong>ce and Human Behavior. New York: New YorkFree Press.Sternberg, W. (1994). Mind in context: Cambridge University Press.Ushioda, E. (1996). Developing a dynamic concept of <strong>motivation</strong>. In T. Hickey& J. Williams (Éds.), <strong>La</strong>nguage education and society in a changing world (pp. 239-245). Clevedon: Multilingual Matters.Vallerand, R., J. (1997). Toward a Hierarchical mo<strong>de</strong>l of intrinsic and extrinsic<strong>motivation</strong>. In M. R. Zanna (Éd.), Advances in experim<strong>en</strong>tal social psychology (Vol.29, pp. 271-360). New York: New York: Aca<strong>de</strong>mic Press.Vallerand, R. J., & Miquelon, P. (2008). Le Modèle Hiérarchique: Une analyseintegrative <strong>de</strong>s <strong>de</strong>terminants et consequ<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> intrinsèque etextrinsèque. In R. Joule (Éd.), Bilans et perspectives <strong>en</strong> Psychologie Sociale.Gr<strong>en</strong>oble: Presses Universitaires <strong>de</strong> Gr<strong>en</strong>oble.Viau, R. (1997). <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> <strong>en</strong> contexte scolaire. Bruxelles: De Boeck.Vygotsky, L. S. (1978). Mind in society. Cambridge, M.A.: MIT Press.Weiner, B. (1992). Human <strong>motivation</strong>: Metaphors, theories and research.Newbury Park CA: Sage.Whyte, S. (2009). <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> pour la langue étrangère à l'école primaire :appr<strong>en</strong>tissage <strong>en</strong> autonomie à l'ordinateur. Les cahiers <strong>de</strong> l'Acedle, 267 - 293.Williams, M., Burd<strong>en</strong>, R. (1997). Psychology for language teachers.Cambridge: CUP.40


Françoise RABYYoung, D. J. (Ed.). (1999). Affect in foreign language and second languagelearning. Boston: MC Graw-Hill.41

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!