Françoise RABYl’approche ergonomique disparaissait et l’importance <strong>de</strong>s facteurs contextuels ou<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux diminuait au profit <strong>de</strong>s facteurs relevant du moi. Dans ces<strong>de</strong>rnières formulations, Dörnyei semble consci<strong>en</strong>t du problème lorsqu’il écrit :However, I also felt that we nee<strong>de</strong>d to add a thirdmajor constitu<strong>en</strong>t, which was associated with the directimpact of the stud<strong>en</strong>ts’ learning <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t. After all,one of the main achievem<strong>en</strong>ts of the “educational shift”of <strong>motivation</strong> research in the 1990s was the recognitionof the <strong>motivation</strong>al impact of the main compon<strong>en</strong>ts ofthe classroom learning situation, such as the teacher,the curriculum, and the learner group. [Dörnyei,op.cit., p. 217]Et son <strong>de</strong>rnier modèle est composé <strong>de</strong>s mois idéaux et prescrits, auxquels il ajoutel’expéri<strong>en</strong>ce d’appr<strong>en</strong>tissage.ConclusionPersonnellem<strong>en</strong>t, je suis convaincue, dans le cas <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>en</strong> situation <strong>de</strong>travail, <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong>s facteurs externes. Certes, les didactici<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s langues nesaurai<strong>en</strong>t les ignorer, surtout ceux qui travaill<strong>en</strong>t sur les TICE, mais trop souv<strong>en</strong>t,leur importance reste sous-évaluée parce qu’ils sont associés à la <strong>motivation</strong>extrinsèque, considérée comme la « mauvaise » <strong>motivation</strong> par rapport à la<strong>motivation</strong> intrinsèque, qui serait la « bonne » <strong>motivation</strong>. Il y a là, à mon avis,confusion <strong>en</strong>tre la « nature » <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> et le « facteur » <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> et jevais t<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> m’expliquer sur ce point. <strong>La</strong> <strong>motivation</strong> est un état psychologique. Iln’existe donc pas, <strong>en</strong> toute logique, <strong>de</strong> <strong>motivation</strong> interne ou externe, comme on le litsouv<strong>en</strong>t, puisqu’elle ne peut être qu’interne. <strong>La</strong> question est alors <strong>de</strong> savoir ce quipousse l’individu à agir, quelles représ<strong>en</strong>tations ? Quelles att<strong>en</strong>tes ? Quellesattributions ? Toutes les théories actuelles affirm<strong>en</strong>t que le facteur le plus efficace estcelui qui émane du sujet et non <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Cette vision dichotomique meparait erronée car elle repose sur un modèle homéostatique. Or, <strong>de</strong> ce point <strong>de</strong> vue,l’épistémologie génétique <strong>de</strong> Piaget [1967], la théorie <strong>de</strong> l’étayage <strong>de</strong> Bruner [1983]ou la théorie génétique historique et culturelle <strong>de</strong> Vytgotsky [1978] se rejoign<strong>en</strong>t :nous sommes <strong>de</strong>s organismes <strong>en</strong> perpétuel mouvem<strong>en</strong>t et déséquilibre, un seulcomposant du système peut affecter un composant <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce éloigné, et c’est34
Françoise RABYdans l’interaction avec notre <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t que se développe l’individu. Enconséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ces idées très générales, c’est dans l’interaction avec les autrescomposants humains et matériels <strong>de</strong> la classe que la <strong>motivation</strong> pour la tâche va sedévelopper chez l’élève. Ce sont bi<strong>en</strong> les facteurs externes, in fine, qui provoqu<strong>en</strong>tl’évolution, mais ces facteurs externes sont, <strong>en</strong> quelque sorte, « traités » par lecerveau <strong>de</strong> l’élève, et c’est là que les mécanismes internes intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t. Nierl’importance <strong>de</strong>s facteurs externes, c’est <strong>en</strong> fait rejeter toute théorie dudéveloppem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> particulier celui <strong>de</strong> la <strong>motivation</strong> ou <strong>de</strong> la dé<strong>motivation</strong>.L’<strong>en</strong>seignant, les outils, les pairs mérit<strong>en</strong>t tous leur place dans les recherches.Cep<strong>en</strong>dant, ils ne doiv<strong>en</strong>t pas être vus comme <strong>de</strong>s objets externes à l’élève maiscomme <strong>de</strong>s instrum<strong>en</strong>ts au s<strong>en</strong>s anthropologique que Simondon [1989]ou Vytgotsky[1978] accord<strong>en</strong>t à ce terme. <strong>La</strong> perception que les élèves ont du projet, <strong>de</strong>s outils, <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>seignant, <strong>de</strong> l’évaluation r<strong>en</strong>contre les « I<strong>de</strong>al L2 self » et les « Ought L2 Self ».C’est dans cette r<strong>en</strong>contre que se génère, se mainti<strong>en</strong>t et se r<strong>en</strong>ouvelle la <strong>motivation</strong>,mais comm<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> cette r<strong>en</strong>contre ? Le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’appr<strong>en</strong>tissage <strong>de</strong>s langues via le web2, les secon<strong>de</strong>s vies, et même le web3 r<strong>en</strong>d cesquestions <strong>en</strong>core plus complexes mais passionnantes à traiter. Une vision techniciste<strong>de</strong> la <strong>motivation</strong>, fait <strong>de</strong>s miracles technologiques les sources mêmes <strong>de</strong> la<strong>motivation</strong> (abolition du temps et <strong>de</strong>s frontières, ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> nos capacitéscognitives, création <strong>de</strong> réseau <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contre et <strong>de</strong> partage à l’infini et l’appr<strong>en</strong>antvéritable acteur du mon<strong>de</strong> virtuel) alors qu’une vision anthropologique, mettre <strong>en</strong>avant le projet <strong>de</strong> l’individu ou <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignant. Le web2 ou 3, oui mais pourquoifaire <strong>en</strong>semble ? On découvrira alors, que la technologie reste la langue d’Esope :qu’elle peut susciter l’appr<strong>en</strong>tissage ou au contraire <strong>en</strong> distraire l’appr<strong>en</strong>ant.A partir <strong>de</strong> toutes ces réflexions, <strong>de</strong>meure la question générale du colloque Quelleréponse la recherche peut-elle apporter à cette question ? Il me semble que <strong>de</strong>uxfacteurs très importants sont à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte, le facteur culturel organisé autour<strong>de</strong> la r<strong>en</strong>contre et <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s mois : expression du moi coré<strong>en</strong> face àl’altérité française (mais Madame Zarate parlera mieux que moi <strong>de</strong> cet aspect) et lefacteur du contrôle par l’appr<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> son activité, tout au long <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage.Cela suppose un savant mélange <strong>de</strong> contrainte et <strong>de</strong> liberté. Les expéri<strong>en</strong>ces m<strong>en</strong>éespar mon équipe autour du Français <strong>en</strong> ligne, fourniss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s exemples tout à fait35