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Zibeline n°26 en PDF

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Femmes maladesDans un de ses romans précéd<strong>en</strong>ts, Le mandarinmiraculeux, Asli Erdogan évoquait la solitude d’unejeune femme à l’œil malade, son histoire d’amour etla perte de l’être aimé, dans les rues de G<strong>en</strong>ève. C’estle même thème qu’elle traite dans Une Visite surgie dupassé, la nouvelle c<strong>en</strong>trale, la plus longue de son recueilLes Oiseaux de bois.Un homme a écrit du «seul <strong>en</strong>droit de G<strong>en</strong>ève quirappelle Istanbul», passant sur «le pont de bois fragile» dusouv<strong>en</strong>ir pour t<strong>en</strong>ter de retrouver le passé, «l’autre rivedu fleuve». Un an auparavant, il parcourait avec Elle lesquartiers d’Istanbul, «femme fatiguée mais attirante.»Elle, un être étrange jusqu’à la folie, pareille à unguerrier apache.La folie, la solitude, le temps qui passe imperturbable,l’étrange et les marges, la mort qui «comme lestramways, arrive à l’heure, ni plus tôt, ni plus tard» sontles thèmes que l’on retrouve dans les quatre autresnouvelles du recueil, écrites <strong>en</strong>tre 1996 et 2007.Nouvelles qui, au-delà de la proximité de leurs thèmesdéploi<strong>en</strong>t une langue riche de s<strong>en</strong>sations et d’odeurs.«Odeur de la guerre contre la faim qui recomm<strong>en</strong>cechaque matin, du travail v<strong>en</strong>du à vil prix, descanalisations crevées, odeur de la misère.»Les portraits de femmes malades, qui souffr<strong>en</strong>t dansleur chair et leur tête, des «femmes qui support<strong>en</strong>t lesil<strong>en</strong>ce et gard<strong>en</strong>t secrets leurs tragédies, leurs deuils, leurshumiliations, <strong>en</strong> espérant donner ainsi un s<strong>en</strong>s à leurssouffrances» nous rappell<strong>en</strong>t que l’écrivaine a connu lescoups et la prison. Ancrées dans la Turquied’aujourd’hui, ces nouvelles touch<strong>en</strong>t à l’universel,interrogeant sans relâche la question exist<strong>en</strong>tielle de laliberté.ANNIE GAVALes Oiseaux de boisAsli ErdoganActes Sud, 16 euros«Un goût de f<strong>en</strong>aison et de regain»«New York est une ville qu’il est très difficile de quitter»…Une mise <strong>en</strong> garde qu’Hans van d<strong>en</strong> Broek dédaigne,tout à sa bonne fortune d’aller s’y installer avec safemme pour y travailler. De cette vie à New York onaura les impressions, les réflexions de ce «héros»désabusé sur une époque qui ne l’est pas moins, surune tranche de sa vie chaotique. Car ce sont les moisqui suiv<strong>en</strong>t les att<strong>en</strong>tats du 11 septembre que décrit l<strong>en</strong>arrateur, mêlant sa propre histoire à celle d’une villequi cherche à se reconstruire : Hans se retrouveseul -son mariage s’est effondré avec les tours et safemme, traumatisée, r<strong>en</strong>tre <strong>en</strong> Angleterre avec leurjeune fils-, et va errer jusqu’à sa r<strong>en</strong>contre avec Chuck,immigré comme lui, son double impossible, soncontraire exact : flambeur, ambitieux, hâbleur. Unepassion commune va les réunir, le cricket, grand sportcolonial par excell<strong>en</strong>ce qui se joue à New York depuisc<strong>en</strong>t cinquante ans. Amitié chaotique qui va luipermettre de pénétrer l’univers de la populationPoil à la métaphoreCumali, jeune Turc dominé par son père commerçant,revi<strong>en</strong>t du service militaire. Le barbier va le convaincrede se laisser pousser la moustache. Celle-ci, superbe, vapeu à peu pr<strong>en</strong>dre toute la place et agir comme unmasque gratifiant derrière lequel l’homme trouve uneid<strong>en</strong>tité, et perd son être… Le roman de TahsinYücel vous saisit immédiatem<strong>en</strong>t dans son monde :alerte, ironique, il est écrit avec toute la légèreté descontes philosophiques. Les personnages sont croqués<strong>en</strong> deux coups de pinceau, les situations sont drôles,ancrées discrètem<strong>en</strong>t dans une Turquie villageoisesuffisamm<strong>en</strong>t marquée pour qu’on s’y attache, etsuffisamm<strong>en</strong>t vague pour qu’on y trouve del’universel. Cet homme, <strong>en</strong> s’id<strong>en</strong>tifiant à samoustache, va perdre son rire, son amour, son désir, etfinalem<strong>en</strong>t sa personne. Phallus illusoire, sans valeur,elle s’avèrera indépassable pourtant, tant Cumalimultiethnique de New York, les rêves de grandeur deChuck (la création d’un grand stade de cricketpourrait faire progresser la civilisation américainecroit-il) et ses activités douteuses par ailleurs seheurtant au mal-être de Hans. Il finira par quitterNew York, et r<strong>en</strong>trera <strong>en</strong> Angleterre où il appr<strong>en</strong>dra lamort viol<strong>en</strong>te de son ami…Ce n’est pas le premier livre de Joseph O’Neill (troisont déjà été publiée aux États-Unis), mais le premiertraduit <strong>en</strong> français. Et une belle découverte. DansNetherland, ce jeune auteur Irlandais installé aux États-Unis dresse un portrait d<strong>en</strong>se et mélancolique del’Amérique contemporaine, dans lequel, s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t,gracieusem<strong>en</strong>t, se mêl<strong>en</strong>t l’intime et l’Histoire.DO.MNetherlandJoseph O’NeillEd. De l’Olivier, 22 eurosderrière elle a désappris à exister. Mais si la fable estlimpide le sujet s’avère assez rapidem<strong>en</strong>t trop mince :la moustache, allégorie floue, fait p<strong>en</strong>ser bi<strong>en</strong> sûr auNez de Gogol, et par mom<strong>en</strong>ts, plus graves, à laMétamorphose kafkaï<strong>en</strong>ne ; on s<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> ce que cethomme perd à se confondre avec son app<strong>en</strong>dice, etcombi<strong>en</strong> cette société a besoin de symboles visiblescomme la moustache au milieu de la figure. Celasuffit-il à faire un roman ? Si le début et la fin sontpassionnants, le milieu flotte un poil…AGNES FRESCHELLa MoustacheTahsin YücelEd. Actes Sud, 19 euros53

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