L’hivernal faitCe seront ses premières Hivernales :Emmanuel Serafini, nommé directeur du c<strong>en</strong>trechorégraphique, créé à Avignon il y a plus detr<strong>en</strong>te ans par Amélie Grand, souhaite poursuivrele festival sur sa lancée, et développerune politique culturelle annuelle qui <strong>en</strong> seraitle prolongem<strong>en</strong>t. Il explique son parcours,son projet, sa programmationManta de Héla Fattoumi © Laur<strong>en</strong>t Philippe<strong>Zibeline</strong> : Vous avez été nommé à ce poste de direction du C<strong>en</strong>tre deDéveloppem<strong>en</strong>t Chorégraphique après un appel d’offre lancé par les tutelles.Pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?Emmanuel Serafini : Il est atypique : j’ai comm<strong>en</strong>cé très jeune plutôt du côtéscène, <strong>en</strong> étant danseur vers 6 ans, <strong>en</strong> pratiquant le chant choral à 12. Puis jesuis dev<strong>en</strong>u baryton, j’ai pris des cours de théâtre… J’ai réussi le concours del’ENSATT (École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre ndlr), etje me suis <strong>en</strong>suite ori<strong>en</strong>té vers l’administration culturelle, avec des compagniescomme celle de Brigitte Jacques, <strong>en</strong>suite Daniel Larrieu. J’ai monté un bureaude production de spectacle vivant, avec des g<strong>en</strong>s comme Grand Magasin, HélaFattoumi… Dans ce cadre j’ai adhéré au SYNDEAC (Syndicat National desEntreprises Artistiques et Culturelles ndlr), je suis dev<strong>en</strong>u membre du conseilnational puis secrétaire national… puis j’ai eu <strong>en</strong>vie de rev<strong>en</strong>ir vers l’artistique.J’ai donc répondu à cet appel d’offre.Votre parcours explique donc votre volonté d’ouverture à d’autres pratiques etd’autres arts, à une activité multiforme, et au débat.Ces portes étai<strong>en</strong>t déjà largem<strong>en</strong>t ouvertes par Amélie Grand ! Avec l’énergiequi la caractérise elle avait proclamé les Hivernales C<strong>en</strong>tre de Développem<strong>en</strong>tChorégraphique. Appellation et statut qui pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t tout leur s<strong>en</strong>s aujourd’hui :elle avait raison !Mais qu’est-ce qu’un CDC ?Une structure vague, mais qui risque bi<strong>en</strong> de pr<strong>en</strong>dre corps, <strong>en</strong>fin ! Il y a 8 CDC<strong>en</strong> France -plus deux <strong>en</strong> cours et un à Ouagadougou, celui de Salia nï Seydou-,mais seul Toulouse a officiellem<strong>en</strong>t le label depuis 95. Il s’agit d’une structureintermédiaire dirigée non par un artiste comme les C<strong>en</strong>tres ChorégraphiquesNationaux (comme le Ballet Preljocaj, ou le Ballet National de Marseille ndlr),mais par un directeur. La différ<strong>en</strong>ce est la même qu’<strong>en</strong>tre un C<strong>en</strong>tre DramatiqueNational (comme la Criée ndlr) et une Scène Nationale. Un texte cadre précisantnos missions, et, nous l’espérons, augm<strong>en</strong>tant <strong>en</strong> conséqu<strong>en</strong>ce nos crédits, est<strong>en</strong> cours d’élaboration au Ministère. Si les Entreti<strong>en</strong>s de Valois ont servi à quelquechose, c’est à montrer cette nécessité de structures intermédiaires vouées audéveloppem<strong>en</strong>t des projets artistiques. Le réseau des CDC mis <strong>en</strong> place depuis1995 par la volonté des directeurs locaux préfigurait vraim<strong>en</strong>t ce qui est perçu
LES HIVERNALESPOLITIQUE CULTURELLE09peau neuveaujourd’hui comme un besoin.Vous dites espérer plus de moy<strong>en</strong>s.Quels sont-ils actuellem<strong>en</strong>t ?Nous n’avons hélas pas les moy<strong>en</strong>s deproduire des spectacles. Nous les accompagnons,les programmons, aidonsà la création et surtout à la diffusion,mais ne pouvons coproduire… Pourtant,sur nos 900 000 € de budget,450 000 € sont des recettes propres.Nous avons 50% d’autofinancem<strong>en</strong>t cequi est extrêmem<strong>en</strong>t rare dans lesstructures culturelles. Mais l’<strong>en</strong>semblecouvre à peine nos frais fixes de fonctionnem<strong>en</strong>t,et les subv<strong>en</strong>tions ne nouspermett<strong>en</strong>t que de faire de l’achat despectacles.Comm<strong>en</strong>t souhaitez-vous ori<strong>en</strong>ter lapolitique des Hivernales ?En développant et <strong>en</strong> prolongeantl’œuvre d’Amélie Grand. En int<strong>en</strong>sifiantl’idée d’un training régulier du danseur.En poursuivant les stages durantles vacances scolaires : nous disp<strong>en</strong>sonscette année 350 heures de stagede tout niveau, pour tout public, danstous les types de danse… En poursuivantl’ouverture vers d’autres pratiques:le théâtre avec Eric Lacascade, l’opéraavec Michel Rostain. En instaurant lesLundis au soleil, temps de réflexion etde r<strong>en</strong>contre régulier, qui devrait nouspermettre de faire v<strong>en</strong>ir davantage deg<strong>en</strong>s <strong>en</strong>core vers la danse.Et au niveau de la programmation ?Nous avons la chance d’avoir deux lieuxde spectacle, ce qui n’est pas le cas detous les CDC, qui sont souv<strong>en</strong>thébergés… J’aimerais parv<strong>en</strong>ir à différ<strong>en</strong>cierdans l’esprit des g<strong>en</strong>s lesHivernales, grand festival d’hiver,historique, et le CDC, qui a vocation àprogrammer toute l’année, avec unplateau double ouvert aux compagniesinterrégionales (Avignon est au carrefourde trois régions ndlr) durant leFestival d’Avignon, et tout au long del’année. Au-delà de cette activitérégulière de stage et de réflexion, etde la programmation d’été, j’aimeraisque février devi<strong>en</strong>ne un grand mois dela danse. Si Dieu nous prête vie -il paraitqu’il le fait <strong>en</strong>core- et subv<strong>en</strong>tions.Votre programmation est cette annéeess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t africaine. Pourquoi ?Je veux prolonger l’idée d’une thématiquequi traversera les Hivernales,comme le faisait Amélie Grand. Il y aaussi dans cette édition des coups decœur, un souti<strong>en</strong> à des compagniesrégionales comme celle de Thierry Baëou de Christophe Haleb qui ont besoinde cette visibilité. Mais l’<strong>en</strong>semble dela programmation est tournée versl’Afrique au s<strong>en</strong>s large : le Maghreb,l’Afrique sub-sahari<strong>en</strong>ne et le ProcheOri<strong>en</strong>t, et aussi vers des chorégraphesfrançais d’origine africaine, commeHéla Fattoumi.Pourquoi cette thématique ? P<strong>en</strong>sezvousque la danse de ce contin<strong>en</strong>t aquelque chose de particulier à montrer ?Oui. La plupart des spectacles qui m’ontprofondém<strong>en</strong>t touché ces dernièresannées vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t d’Afrique. Il s’y passequelque chose d’important au niveauchorégraphique, une force créatricequi me fait p<strong>en</strong>ser dans sa nouveautéau courant de la nouvelle danse dansles années 80. Un bouleversem<strong>en</strong>t.Que change-t-il ?C’est pour l’instant difficile à dire…Disons que quelque chose s’exprimequi r<strong>en</strong>verse le regard de l’exotisme,celui des occid<strong>en</strong>taux qui croyai<strong>en</strong>tapporter la culture savante à l’Afrique-ce qui est particulièrem<strong>en</strong>t prét<strong>en</strong>tieux<strong>en</strong> matière de danse !-, celui desAfricains aussi, qui interrog<strong>en</strong>t leurformation auprès des chorégraphesfrançais, et leur rapport à la tradition,aux interdits, à l’oppression… À latransmission aussi, à ce qu’est unmaître.Quels spectacles conseilleriez-vous ?Tous, quelle question ! La création deSalia nï Seydou sera certainem<strong>en</strong>t unmom<strong>en</strong>t fort. Loin, de Rachid Ouramdane,est un spectacle ess<strong>en</strong>tiel. Quantà Manta, la création de Hela Fattoumisur le hijab, comm<strong>en</strong>t ne pas l’att<strong>en</strong>dre<strong>en</strong> cette période de débat sur ce quedevrait être une id<strong>en</strong>tité nationale ?Tous les spectacles seront passionnants!ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNES FRESCHELLes Hivernales32 e édition du 13 au 20 fév04 90 82 33 12www.hivernales-avignon.comLe 13 fév 16hBernardo Montet / Thomas FerrandSwitch me offAu programmeLe 14 et 15 fév 16hNelisiwe XabaThey look at me… et PlasticizationLe 16 fév 21hBertrand LombardLegsDu 18 au 20 fév 12h30Hiverôclites, scène ouverteaux nouveaux tal<strong>en</strong>tsLe 13 et 14 fév 18hHéla Fattoumi / Eric LamoureuxMantaDu 13 au 15 fév 14hBertrand LombardMa Mana Danse De Nada,Hommage à Patrick BossatiLe 13 fév 20hRobyn OrlinDaddy, I’ve se<strong>en</strong> this piece…Le 14 fév 21hThierry BaëTout ceci (n’) est (pas) vraiLe 15 fév 18hAïcha M’barek et Hafiz DhaouVuLe 15 fév 20h30Cie Salia nï SeydouDambé et Concert d’un hommedécousuLe 16 fév 18hHélène IratchetHommage d’un demi-dimancheà un Nicolas Poussin <strong>en</strong>tierLe 16 fév 16h et 17 à 18hPatrick ServiusLespri kòChezaback to the rootsLe 17 fév 21hRachid OuramdaneLoinLe 17 fév à 16h30 et le 18 à 18hMounir Saeed, Salah El Brogy etShaymaa ShoukrySoirée EgypteDu 18 au 20 fév 15h et 16hRégine ChopinotLe Grand Oral de la danseuse aveugleLe 18 fév 20h30Cie Christophe HalebLiquideLe 19 fév 21h et le 20 à 18hOpiyo OkachBorder Border expressMichel Papach KouakouBehind me...Xavier LotSimon (non, je ne m’appelle passamuel eto’o)Le 20 fév 21hDelavallet BidiefonoEmpreintes - on posera les motsaprès