Dans les années 1860-1880 ,à l’Université de Vienne une controverse animéeopposa les tenants de l’Ecole Historique , inductive , à l’Ecole Marginaliste ,déductive. Les marginalistes reprochaient aux historistes d’accumuler des faits, deschiffres, sans en tirer une théorie générale , et les historistes incriminaient le manquede réalisme des modèles hypothético-déductifs. L’issue de cette Querelle deMéthodes (Methodenstreit) fut trouvée quand on affirma que « déduction etinduction sont aussi indispensables que les deux jambes pour marcher » … ce qui,évidemment, ne résolvait pas les problèmes de fond, mais devait aboutir audéveloppement de l’empirisme logique.Cependant , nombre de travaux qualifiés d’ « épistémologiques » neconcernent que de simples problèmes de méthodes. Réciproquement, nombred’ouvrages dits « de méthodologie » traitent de questions relatives à l’épistémè.L’ouvrage, cité, d’Hempel , est ainsi à la frontière des deux niveauxd’approche .L’ouvrage de méthodologie économique de Blaug (Economica) pénètreplus en aval , puisqu’il traite les questions de méthode à partir du traitement degrands concepts (comme le capital) , constituant une « histoire épistémologique » dela pensée économique.On ne saurait trop conseiller le manuel de Marie Fabienne Fortin (LeProcessus de la Recherche Editions Decarie Québec) qui traite très clairement desrelations entre l’épistémologie et la méthodologiePour la Gestion, les ouvrages « classiques » sont ceux de Martinet (éditeur)Epistémologies et Sciences de Gestion (Economica) et de Thiétart (éditeur)Méthodes de Recherche en Management (Dunod).§ 4 ) L’épistémologie, comme sociologie de la scienceCe courant épistémologique est beaucoup plus récent. Il comprend les travauxautour de la « vie de laboratoire » , pour reprendre le titre d’un ouvrage fondateur (sathèse) de Bruno Latour .L’idée principale est que la production de savoir scientifiques’effectue au sein d’organisations (soumises à des problèmes classiques dedifférenciation et d’intégration) , elles-mêmes intégrées dans des systèmesinstitutionnels ayant leurs propres champs de forces.Ces travaux abordent le problème en termes individualistes , autour duchercheur , ou holistes, autour du laboratoire et des instances de la recherche(entreprises y compris).Ils contribuent , pour l’essentiel, à « casser » l’imagestéréotypée du chercheur solitaire et désintéressé, et s’intéressent aux conditions deproduction de la recherche.Les titres d’ouvrages édités par les Editions de l’INRA (6 euros) sontsignificatifs : « Les savants croient-ils à leurs théories ? » (Jean-Pierre Dupuy) , « Lemétier de chercheur –Regard d’un anthropologue » (Bruno Latour)Cependant , les recherches concernent avant tout les sciences de laboratoire.Toutefois, le courant initié par Bourdieu s’est intéressé à l’activité de l’HomoAcademicus » , et, par ce biais, à la production de savoir. De façon générale, cesrecherches ignorent l’existence des disciplines du droit, de l’économie et de la10
gestion, quitte à manifester une réaction de rejet 12 . Il va de soi que l’étudesociologique de la production de recherche , de savoir et de connaissances dans lescentres en économie et en gestion serait tout- à- fait bienvenue et passionnante !Par exemple, « à titre de proposition » , des « experts » du CNRS ont fournisur Internet une liste des revues françaises en économie et gestion considéréescomme ayant un « niveau scientifique reconnu» ( de une à trois étoiles…). La liste,fort réduite, ne comprenait pratiquement que des revues ayant un degré élevé deformalisation, « ultra positiviste » . La « communauté scientifique » a réagi vivement :cependant , cette initiative était pertinente , dans la mesure où elle devrait conduirela « communauté » à adopter une « convention de scientificité » des productions derecherche .En l’occurrence , l’interprétation sociologique de la proposition devrait êtreque le CNRS souhaitait indiquer les critères selon lesquels il était prêt àsubventionner une revue ; mais, ce faisant , il a suscité des questions autour de lareconnaissance scientifique de chaque chercheur et de chaque équipe : dans quellesrevues « faut-il » publier ? Nous pensons que cette incidence n’avait pas étéenvisagée par lesdits « experts » (dont le mode de désignation serait en soi un sujetde recherche…).§ 5) L’épistémologie, comme philosophie morale et politiqueIl n’étonnera personne que la réflexion sur la science et ses productions soitconfrontée, puis insérée dans les préoccupations de ce que l’on appelle laphilosophie morale .Celle-ci s’interroge en effet sur le rapport entre les « mœurs »,les valeurs de la Société, les idéologies, et les grandes questions métaphysiques.Elle se « raccorde » à la philosophie politique , laquelle traite du « gouvernement »des êtres et des choses, au travers notamment des considérations touchant à lajustice sociale , mais aussi au gouvernement par la Raison.Nombre de philosophes ont abordé ces questions de philosophie morale. Laphilosophie longtemps dominante aura été celle développée par Kant et les néokantiens13 . Ces préoccupations se retrouvent dans les travaux contemporains deRawls et de Habermas concernant l’édification de la notion de « justice sociale » .Ces recherches philosophiques débouchent sur des considérations touchant àl’éthique , c’est-à-dire aux règles de conduite individuelles et collectives, dictées ounon par la « Morale » au sens kantien, ou forgées par les conventions sociales entreles Hommes.On citera les travaux de Rawls ( Justice et Démocratie Le Seuil Points Essais)et d’Habermas ( De l’Ethique de la Discussion Champs Flammarion)Anne Salmon développe ces thèses dans « Ethique et Ordre économique -Une entreprise de séduction CNRS Sociologie 2002La philosophie morale va alors interpeller directement l’économie et la gestionau travers de la réflexion critique sur les Techniques (les Technologies chezHeidegger) . Les dérives de la recherche scientifique et technologique au cours duvingtième siècle ont fait tomber la Science du piédestal où le rationalisme de la fin du12 Citons Jean-Pierre Dupuy : « Je pense que le savoir de la science économique est un savoir faux. Cela ne veutpas dire que c’est un savoir inintéressant, cela n’implique pas que ce savoir n’a pas de qualité esthétique ni derôle social éminent. Je crois simplement qu’il est faux »13 Mai Lequan La philosophie morale de Kant Seuil Le Point Série Inédit Essais n° 47111
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