Décroissance sout<strong>en</strong>ableL’avion est lui aussi associé à unedéconnection du local. À cause de lui, onse retrouve parachuté dans un <strong>en</strong>droitinconnu. C’est le mode de transport quiprogresse le plus (6 à 9 % par an) grâce àla détaxe sur le kérosène et, dans unefaible mesure, grâce à son exclusion duprotocole de Kyoto. Par sa vitesse, il créeun imm<strong>en</strong>se effet rebond : nous nousmettons à parcourir des milliers de kilomètrespour des voyages éclairs. Nousn’aurions jamais p<strong>en</strong>sé à le faire s’il n’existaitpas. Aux niveaux mondial et interrégional,il serait jud<strong>ici</strong>eux de supprimertous les accords internationaux sur l’aviationet les routes (un bon lobby doit semettre <strong>en</strong> place !).La télévision individuelle est à bannir,de par sa responsabilité dans la diffusionde la publ<strong>ici</strong>té dans les foyers, et de par lapassivité qu’elle <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dre. L’action personnelleconsiste à réduire leur nombre, àles mettre hors des pièces à vivre, à lesbannir de la maison. A un niveau pluslarge, il s’agit de rétablir un contrôlecitoy<strong>en</strong> sur la télévision <strong>en</strong> supprimant lapubl<strong>ici</strong>té, de développer des programmesqui font part<strong>ici</strong>per les g<strong>en</strong>s, les débats <strong>en</strong>direct, les reportages objectifs.Les supermarchés sont un souti<strong>en</strong> àl’agriculture et à l’industrie de masse, <strong>en</strong>totale déconnection avec le local. C’est unsouti<strong>en</strong> aux grandes marques, à l’économiede la voiture individuelle. Au niveaupersonnel, évitons d’y mettre les pieds…On a toujours vu, semble-t-il, lesroutes augm<strong>en</strong>ter ; on ne peut pas imaginerque cela diminue, même quand leschoses s’amélior<strong>en</strong>t au niveau écologique…soi-disant. Pourtant, il est possible,<strong>en</strong> une semaine, de supprimer uneroute et de poser dessus des rouleauxd’herbe. Une route est réversible. Osonsdonc supprimer des routes, des voiesd’accès routier. Cela a des conséqu<strong>en</strong>cestrès positives. Une étude bi<strong>en</strong> connue deGoodwin de 1998 (4) a montré que surune cinquantaine de cas de suppressiond’accès routiers, peu de problèmes de traficsurv<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t. Il semble que dans bi<strong>en</strong>des cas, le trafic disparaît “et on ne saitpas où il est allé”. Car les g<strong>en</strong>s chang<strong>en</strong>tleur façon de s’organiser, les moy<strong>en</strong>s detransport qu’ils utilis<strong>en</strong>t. Dans de nombreuxcas, les g<strong>en</strong>s utilis<strong>en</strong>t la route parceque c’est le mode de transport qui a étéfavorisé par la politique. La vision selonlaquelle la politique doit représ<strong>en</strong>ter lesintérêts individuels est <strong>ici</strong> largem<strong>en</strong>t àremettre <strong>en</strong> cause. Rares sont les <strong>en</strong>droitsoù, comme à Bogota, un référ<strong>en</strong>dum ademandé aux habitants s’ils voulai<strong>en</strong>t uneville sans trafic individuel <strong>en</strong> 2015 auxheures de pointe (5). La réaction positivede la population, lassée de l’impossibilitéde se déplacer aux heures de pointe aunom de la “liberté de circuler”, a permisde développer une politique ambitieusesur le long terme. Il est toujours demandéaux g<strong>en</strong>s une vision individuelle plutôtqu’une vision de la cité. La politiquecontinue à être dévoyée par l’intérêt individuel,c’est peut-être la faute d’AdamSmith ?Il reste que dans de nombreusesvilles, des zones piétonnes ont été aménagés,des quartiers ou des villages ont étédéclarés “sans voiture”. Ce g<strong>en</strong>re demesures doit être développé.Il y a <strong>en</strong> France près de deux millionsde maisons vides et trois millions de maisonssecondaires. Cela fait cinq millionsde logem<strong>en</strong>ts vides la plupart du tempsalors que de nombreuses personnes sontsans abri. C’est un problème ardu, car iltouche à la propriété privée. L’associationDroit au logem<strong>en</strong>t a m<strong>en</strong>é avec succès desactions de rappropriation de logem<strong>en</strong>tsvides pour des sans-abris (6). Il existe uneloi de réquisition des logem<strong>en</strong>ts vides quipourrait être mise au goût du jour.Comme au Pays de Galles, des comitéslocaux doiv<strong>en</strong>t se développer pour réfléchiret agir face au problème des maisonssecondaires. Avons-nous besoin de plusd’un logem<strong>en</strong>t par famille ? Une solutionpour les vacances peut être l’échange delogem<strong>en</strong>ts.Il y a énormém<strong>en</strong>t de raisons deréduire l’utilisation de produits animaux,(4) Goodwin, Phil, Hass-Klau, Carm<strong>en</strong>, Cairns, Sally.(1998). “Evid<strong>en</strong>ce on the effects of road capacityreduction on traffic levels”. Traffic Engineering andControl, June 1998, pp. 348-354.(5) voir http://ecoplan.org/votebogota2000/(6) Droit au logem<strong>en</strong>t, 8, rue des Francs-Bourgeois,75003 Paris, tél : 01 42 78 22 00.SILENCE N°34012Novembre 2006
viandes, fromages, produits cosmétiquessurtout si ces animaux ne sont pas élevéslocalem<strong>en</strong>t. En premier lieu, il n’y a pasassez de terres pour nourrir une humanitécarnivore. L’élevage industriel devraitêtre remis <strong>en</strong> cause, non seulem<strong>en</strong>t pourson côté inhumain mais aussi parce qu’ilcrée un effet rebond de consommationpar les baisses de prix qu’il occasionne.Il y a énormém<strong>en</strong>t d’autres gadgets àréduire : est-ce qu’un seul téléphone nesuffit pas ? Si nous avons un téléphone autravail, est-il nécessaire d’avoir un téléphonefixe à la maison et un, voire plusieurs,téléphone portable ? Libéronsnousdes fours à micro-ondes, des asc<strong>en</strong>seurs,des tondeuses, des frigos <strong>en</strong> hiver…Au niveaudes extractionsLa prév<strong>en</strong>tion de base des problèmesécologiques consiste à réduire les extractionsde ressources naturelles. Pour cela,il est indisp<strong>en</strong>sable de réduire l’utilisationdes outils qui y part<strong>ici</strong>p<strong>en</strong>t. Ces outilss’appell<strong>en</strong>t des extracteurs (7) et compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t:• les bulldozers, excavateurs et explosifsqui serv<strong>en</strong>t dans les mines et dans leschantiers pour extraire terre, rochers etvégétation,• le processus Haber Bosch qui extraitl’azote de l’air pour permettre la productiond’explosifs ou d’<strong>en</strong>grais chimiques,• les pompes qui serv<strong>en</strong>t à extraire l’eaudes nappes phréatiques,• les <strong>en</strong>gins forestiers telles les tronçonneusesqui extrai<strong>en</strong>t le bois des forêts,• les puits de pétrole et de gaz qui extrai<strong>en</strong>tces mêmes matières énergétiques,• les bateaux de pêche et les filets quiextrai<strong>en</strong>t les poissons des mers,• les fusils de chasse qui serv<strong>en</strong>t à extrairele gibier des milieux naturels,• les dragues qui extrai<strong>en</strong>t sables et bouesdu fond des ports, canaux et fleuves navigables,• les tracteurs et leurs outils de labour quiserv<strong>en</strong>t à retourner les terres agricoles,• les véhicules tout terrain qui extrai<strong>en</strong>tmême un peu de terre et végétation deschemins.Une réduction des extractions signifieune baisse des extracteurs. Il est facile defaire de beaux discours sur l’importanced’agir au niveau des problèmes écologiqueset de le quantifier <strong>en</strong> terme d<strong>en</strong>écessité de réduire d’un facteur 4 ou 10les extractions de ressources naturelles.Mais ceci ne risque-t-il pas de demeurerun vœu pieu si nous ne réalisons pas demanière concrète que cela implique dediminuer le nombre et l’usage des extracteursde ces ressources naturelles ? Demême qu’un bannissem<strong>en</strong>t des productionsd’armem<strong>en</strong>ts est un moy<strong>en</strong> d’actionpour réduire les morts, il faudra développerune politique de réduction des extracteurspour réduire les impacts écologiques.Et avons-nous besoin de fusées interplanétaires,sauf peut-être pour la recherchefondam<strong>en</strong>tale ? C’est une questionque l’on peut se poser. Une actionurg<strong>en</strong>te est d’arrêter les programmes spatiaux.Avons-nous réellem<strong>en</strong>t besoin desatellites ? Quel serait l’impact de l’introductionde nouvelles substances v<strong>en</strong>antde l’espace dans les écosystèmes terrestres?Les mirages de cités lunaires ou marti<strong>en</strong>nesnous font croire que l’on peutremplacer notre planète. La perspective –improbable – d’une colonisation d’autresplanètes devi<strong>en</strong>t un argum<strong>en</strong>t pour moinsfaire att<strong>en</strong>tion à celle, l’unique, qui estfavorable à la vie. Ne pourrait-on pas plutôtmettre toute notre énergie à sauvernotre planète ?Refusons les constructions de TGVqui ét<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les espaces parcourus <strong>en</strong>favorisant la vitesse. Et remplaçons-lespar des TER et des pistes de campagne.En aval :émissions et déchetsLes emballages jetables cré<strong>en</strong>t unefacilité de consommation et de rejet etsont <strong>en</strong> parfaite harmonie avec laconsommation de masse qui fait l’apana-(7) Schneider F, Niza S, “Developm<strong>en</strong>t of InputIndicators based on Extraction Equipm<strong>en</strong>t”,Workshop Quo vadis MFA? Material Flow Analysis –Where do we go? Issues, Tr<strong>en</strong>ds and Perspectives ofResearch for Sustainable Resource Use, Wuppertal,Germany, 9–10 October 2003.SILENCE N°34013Novembre 2006