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JOURNAL ASMAC No 1 - février 2020

Régénération - A propos d’humains, de coraux et de déchets Diabète - Le scalpel remplace la pompe Immunologie - Immunothérapie – un aperçu Politique - 75 ans de l’asmac – au début était le salaire

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Diabète - Le scalpel remplace la pompe
Immunologie - Immunothérapie – un aperçu
Politique - 75 ans de l’asmac – au début était le salaire

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Point de mire<br />

En 2011, vous avez repris la direction<br />

de la Décharge de déchets<br />

spéciaux de Kölliken<br />

(SMDK). A l’époque, vous pensiez<br />

que votre travail serait terminé en<br />

<strong>2020</strong>. Etes-vous maintenant au chômage?<br />

Benjamin Müller: <strong>No</strong>n, il y a eu certains<br />

retards dans le démantèlement. Initialement,<br />

il était prévu que les déchets spéciaux<br />

seraient évacués jusqu’en 2012. Ces travaux<br />

n’ont cependant été terminés qu’en 2015. De<br />

plus, nous avons constaté que les polluants<br />

ont pénétré le sol plus profondément que ce<br />

que nous pensions, c’est pourquoi je ne<br />

crains pas de me retrouver au chômage<br />

dans un proche avenir.<br />

Lorsque la décharge a ouvert ses portes<br />

en mai 1978, elle était considérée comme<br />

à la pointe du progrès et une contribution<br />

à la protection de l’environnement.<br />

Comment était-on parvenu à une telle<br />

appréciation?<br />

C’était une autre époque, que ce soit sur le<br />

plan de la protection de l’environnement<br />

ou de l’élimination des déchets. En 1978, il<br />

n’y avait pas encore de loi sur la protection<br />

de l’environnement ni d’ordonnance sur<br />

l’assainissement des sites pollués, etc. Il régnait<br />

une situation plus ou moins sauvage.<br />

Les déchets dangereux étaient noyés dans<br />

la mer du <strong>No</strong>rd ou jetés quelque part dans<br />

une fosse en forêt. L’idée de les déposer<br />

dans une décharge organisée était progressiste.<br />

D’autant plus qu’il fallait obtenir une<br />

autorisation et payer. Les experts considéraient<br />

donc l’ancienne carrière d’argile de<br />

Kölliken comme idéale à cette fin.<br />

Sa fermeture immédiate fut décidée en<br />

avril 1985 après seulement sept ans d’exploitation.<br />

Pourquoi a-t-on dû prendre<br />

une telle décision?<br />

Les protestations de la population ont été le<br />

facteur déterminant. La gestion de la décharge<br />

n’était pas aussi moderne que ce qui<br />

était initialement prévu. On y stockait des<br />

déchets liquides, ce qui n’avait jamais été<br />

envisagé. Ce stockage a provoqué des émanations<br />

d’odeurs envahissantes. Parfois, les<br />

fûts étaient déjà endommagés lors du stockage,<br />

les contenus se mélangeaient et en<br />

cas de fortes pluies, les substances s’infiltraient<br />

dans le terrain et la nappe phréatique.<br />

Les odeurs pénétraient dans les maisons<br />

des habitants par les caves et buanderies.<br />

Cela s’est finalement transformé en<br />

véritable scandale environnemental; la télévision<br />

était sur place. A la suite de cela, le<br />

conseil communal a décidé de fermer la<br />

décharge sans attendre. Cependant, la pollution<br />

de la nappe phréatique n’a été découverte<br />

que plus tard.<br />

A quels dangers s’attendait-on et quelles<br />

premières mesures ont été prises?<br />

Immédiatement après sa fermeture, on a<br />

commencé par sécuriser le site. Dans un premier<br />

temps, l’eau a été collectée en différents<br />

endroits et recyclée dans une station<br />

d’épuration spécialement construite à cet<br />

effet. Ensuite, on a recouvert la décharge.<br />

Au cours des années suivantes, la décharge<br />

a véritablement disparu sous une<br />

couche de végétation. Quand et pourquoi<br />

a-t-on décidé d’excaver tous les déchets<br />

et de les éliminer correctement?<br />

Deux raisons ont motivé ce choix: au début<br />

des années 90, on a pris conscience du problème<br />

de la contamination de la nappe<br />

phréatique. De plus, différentes dispositions<br />

légales sont entrées en vigueur en conséquence<br />

de notre cas. Toutefois, les propriétaires<br />

de la décharge, un consortium composé<br />

des Cantons d’Argovie et Zurich comme<br />

propriétaires principaux et de la Ville de Zurich<br />

et de la chimie bâloise en tant qu’actionnaires<br />

minoritaires, ne savaient pas comment<br />

procéder. Nulle part dans le monde, il<br />

n’existait de projet de ce genre. Finalement,<br />

on a décidé de procéder de façon élémentaire:<br />

excaver, trier et éliminer correctement.<br />

En 2006, vous avez rejoint la SMDK en<br />

tant que géologue. Qu’est-ce qui vous a<br />

incité à vous lancer dans ce travail?<br />

Je connaissais la décharge depuis 2001, car<br />

j’étais employé dans un bureau d’ingénieur<br />

qui travaillait pour la SMDK. Ma tâche première<br />

a consisté à construire une galerie<br />

pour le recyclage de l’eau. Déjà à cette<br />

époque, on savait que l’assainissement serait<br />

inévitable. Lorsque la SMDK m’a ensuite<br />

sollicité en 2006, j’ai tout de suite dit<br />

oui. Un tel projet est un travail de pionnier<br />

et une occasion unique dans la vie.<br />

L’assainissement général a débuté avec<br />

la construction de la halle géante en<br />

2005. Quels problèmes avez-vous rencontrés?<br />

Il y avait trois sites de travail: la halle dans<br />

laquelle les déchets étaient excavés, le triage<br />

subséquent et la station de chargement ainsi<br />

que l’analyse. La halle a suscité le plus de<br />

commentaires: les riverains craignaient<br />

d’une manière générale la réouverture du<br />

sol, et l’état des déchets constituait un autre<br />

problème. Beaucoup de fûts s’étaient dissous,<br />

les contenus s’en étaient échappés et<br />

mélangés avec d’autres substances ou avec la<br />

terre qui avait été accumulée entre les<br />

couches. Au début, nous partions du principe<br />

que 80% des fûts seraient intacts. Cette<br />

hypothèse se fondait sur l’expérience acquise<br />

lors de la construction de la station<br />

d’épuration. A cette occasion, nous avions<br />

ouvert le sol de la décharge à un endroit et<br />

découvert deux rangées de fûts intacts. Il<br />

s’agissait là de la seule information dont nous<br />

disposions. Au final, il est apparu qu’environ<br />

90% des fûts étaient endommagés.<br />

Comment se déroule une telle opération?<br />

Commence-t-on simplement à creuser<br />

dans un endroit?<br />

Oui, en effet. <strong>No</strong>us avons commencé dans la<br />

plus petite section de la halle à éliminer<br />

l’humus et à dégager une couche après<br />

l’autre. <strong>No</strong>us avions réalisé des tests préliminaires<br />

et constaté que la situation n’était<br />

guère réjouissante. La visibilité nous posait<br />

aussi de gros problèmes, car même si une<br />

sous-pression régnait dans la halle et que<br />

l’aération était optimale, les machines soulevaient<br />

une telle quantité de poussière et<br />

d’émissions que nous devions parfois suspendre<br />

les travaux déjà à 3h de l’après-midi.<br />

Mais comme personne avant nous n’avait<br />

réalisé un tel assainissement, il nous fallait<br />

acquérir de l’expérience et nous ne disposions<br />

d’aucune référence.<br />

Connaissiez-vous la répartition des déchets?<br />

Oui, nous avions des données de stockage à<br />

disposition, mais beaucoup de substances<br />

n’avaient pas été déclarées. A ce titre, les entreprises<br />

chimiques bâloises avaient agi de<br />

façon exemplaire et déclaré leurs produits<br />

avec précision. Les plus petites entreprises<br />

n’avaient par contre fourni que de vagues<br />

indications du genre «petits déchets». A cela<br />

s’ajoutait que la localisation n’était pas<br />

précise au mètre près, mais globalement, la<br />

base de données nous a rendu service.<br />

Le projet était unique au monde. Qu’a-t-il<br />

fallu développer pour cela?<br />

Personne n’avait auparavant construit une<br />

halle de cette taille uniquement soutenue de<br />

l’extérieur et parfaitement étanche. A l’origine,<br />

on avait imaginé conduire les machinistes<br />

avec un petit bus jusqu’à leurs machines.<br />

On a cependant assez vite constaté<br />

que l’on ne pouvait pas se déplacer dans la<br />

zone «noire», c’est-à-dire là où les déchets<br />

n’étaient pas recouverts, sans combinaison<br />

protectrice. <strong>No</strong>us avons donc dû développer<br />

des véhicules autonomes disposant de leur<br />

propre approvisionnement en oxygène et<br />

des bornes techniques spécifiques. Pour les<br />

20<br />

1/20 VSAO /<strong>ASMAC</strong> Journal

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