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Tranchant d'Acier - Index of

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Le Ponton-de-Jervois<br />

Après deux semaines de voyage, Jack, Yr, Faraday, Timozel, la mule et leur joyeuse<br />

bande de cochons arrivèrent en vue du Ponton-de-Jervois, sur le fleuve Nordra. Avec<br />

l’épuisement, leur humeur s’était gâtée, et le moindre incident déclenchait d’interminables<br />

disputes.<br />

Soucieux de discrétion, ils avaient beaucoup marché de nuit, surtout à l’abord des villes et<br />

des villages, et dormi le jour dans des abris de fortune. Deux ou trois fois, Yr s’était glissée<br />

dans un hameau, après le coucher du soleil, et en était revenue avec assez de nourriture<br />

pour reconstituer leurs réserves. Sans jamais demander comment la superbe femme blonde<br />

avait fait son « marché », Faraday s’était généreusement rempli l’estomac devant les chiches<br />

feux de camp que Jack les autorisait à allumer.<br />

Le froid devenu de plus en plus mordant, il neigeait presque constamment. Après cinq<br />

jours passés à avancer dans des congères, les quatre voyageurs avaient atrocement mal aux<br />

jambes, même au réveil, après un repos bien trop court et inconfortable.<br />

Timozel avait plusieurs fois insisté pour hisser sa dame sur le dos de la mule. Emue par la<br />

souffrance de la pauvre bête, Faraday n’y était jamais restée longtemps.<br />

Enroulés dans des couvertures, sous leur manteau, ils claquaient quand même des dents.<br />

Durant les pauses, quand Jack jugeait trop dangereux de faire du feu, ils se blottissaient les<br />

uns contre les autres dans une crevasse ou contre un gros rocher, sans vraiment parvenir à<br />

se réchauffer.<br />

Faraday ne se séparait plus de sa coupe en bois, même si elle avait peu d’occasions de<br />

l’étudier et aucune raison de l’utiliser. Quand Timozel lui demanda d’où elle tenait cet objet,<br />

elle lui laissa penser – une sorte de mensonge par omission – que c’était un cadeau de<br />

maîtresse Renkin.<br />

Avec le temps, la sensation de… pouvoir… qu’elle éprouvait depuis la cérémonie, devant<br />

la Mère, s’était dissipée. Mais, en se concentrant, elle sentait toujours l’étrange force<br />

désormais tapie en elle.<br />

Réussirait-elle à retrouver le chemin du Bosquet Sacré, lorsqu’elle essaierait ? Elle<br />

l’espérait, car le souvenir de ce lieu merveilleux, comme un talisman, l’aidait à lutter contre<br />

le froid et la fatigue. Dès qu’elle s’allongeait, même dans le pire refuge, le souvenir de la<br />

chaleur et de la joie qu’elle avait connues l’aidait à s’endormir comme un bébé.<br />

Au fil des jours, Timozel était devenu de plus en plus morose et irritable. Oubliant souvent<br />

de se raser, il arborait une éternelle barbe de trois jours qui soulignait ses traits tirés et son<br />

amertume. Au fond de ses yeux, très enfoncés dans leurs orbites, Faraday lisait parfois une<br />

détresse qui lui brisait le cœur.<br />

Lorsqu’elle lui demandait ce qui n’allait pas, le jeune soldat lui souriait, redevenant pour<br />

quelques minutes le champion doux et attentif qu’elle appréciait. Dès qu’elle s’éloignait, il<br />

retombait dans sa mélancolie – peut-être encore plus pr<strong>of</strong>onde.<br />

Depuis leur départ du lac des Ronces, Yr s’était glissée deux ou trois fois sous la<br />

couverture de son fougueux amant. N’obtenant aucune réaction, comme s’il était trop

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