Les clefs des Portes de demain - Le chasseur abstrait
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La femelle pond, en été, trente cinq gros oeufs qu'elle ne peut couver. Qu'importe ! six mois auparavant,<br />
<strong>Le</strong> couple creuse un trou <strong>de</strong> trois mètres <strong>de</strong> diamètre sur un mètre <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur et place, au fond, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
feuilles et <strong><strong>de</strong>s</strong> herbes. Comme le trou a la forme d'un entonnoir, il stocke les eaux <strong>de</strong> pluie qui maintiennent<br />
l'humidité. Au printemps, le mâle malaxe le mélange plusieurs fois par jour pour activer la fermentation.<br />
<strong>Le</strong> moment venu, il oeuvre un trou, la femelle pond et le mâle rebouche. Pour maintenir la température à<br />
33° pendant le jour, il crée <strong><strong>de</strong>s</strong> trous d'aération qu'il referme le soir. S'il fait trop chaud, il couvre l'ensemble<br />
d'une couche <strong>de</strong> sable pouvant atteindre un mètre d'épaisseur, soit vingt m3 à manier alors qu'il n'a que la<br />
grosseur d'une poule ! A l'automne, le problème est inverse : <strong>Le</strong> jour, il découvre le sable pour que le soleil<br />
réchauffe la couveuse ; la nuit étant froi<strong>de</strong>, il remet du sable qui, étalé sur le côté, s'est également réchauffé au<br />
soleil. Il ne le fait pas stupi<strong>de</strong>ment mais uniquement en fonction <strong>de</strong> la chaleur du jour. Régulièrement,<br />
d'ailleurs, il tâte <strong>de</strong> son bec, dans la couveuse, pour en contrôler la température.<br />
Lorsqu'il éclôt, ses parents étant trop occupés, le jeune doit se débrouiller seul : Avant que n'arrive la<br />
première nuit, il est déjà capable <strong>de</strong> voler suffisamment pour se mettre à l'abri sur une branche.<br />
Est-ce <strong>de</strong> l'instinct ou <strong>de</strong> l'intelligence ?<br />
Et la mante religieuse ?<br />
Chacun sait qu'elle utilise son mâle et le dévore ensuite. C'est ce que l'on dit et c'est erroné car cet acte est<br />
plus effarant encore !<br />
La femelle se jette sur son soupirant, plus petit et plus faible qu'elle ; elle l'enserre voluptueusement et<br />
fermement dans ses pattes antérieures et le dévore <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux tiers, pendant l'accouplement, en commençant<br />
par la tête. Et le tiers restant <strong>de</strong> l'infortuné mari d'un jour est toujours capable <strong>de</strong> continuer sa fonction<br />
biologique...<br />
Tout est envisageable, lorsqu'on y réfléchit. Je pense à la stupeur du commandant Cousteau lorsqu'il<br />
explora le lac Titicaca, dans les An<strong><strong>de</strong>s</strong>, et qu'il constata que <strong><strong>de</strong>s</strong> crapauds y proliféraient en nombre<br />
incalculable, <strong><strong>de</strong>s</strong> crapauds d'une race inconnue jusqu'alors et qui respiraient par la peau...<br />
17 avril<br />
J'ai l'impression <strong>de</strong> vivre sur une autre planète. je n'entends même plus résonner les pas <strong><strong>de</strong>s</strong> matons, le<br />
cliquetis <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>clefs</strong> et le claquement <strong><strong>de</strong>s</strong> serrures.<br />
- Grivelot, réveillez-vous !<br />
Et jean, compatissant, me secoue pour que je m'extraie <strong>de</strong> mes bouquins.<br />
*****<br />
En relisant ce que j'avais noté hier, je retrouve ces mots : "le merveilleux animal". Et je constate, à ma<br />
gran<strong>de</strong> stupéfaction, que le mon<strong>de</strong> végétal est tout aussi merveilleux.<br />
Je viens <strong>de</strong> lire plusieurs livres écrits par <strong><strong>de</strong>s</strong> savants <strong>de</strong> renommée mondiale concernant l'intelligence <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
plantes et <strong><strong>de</strong>s</strong> fleurs et je suis émerveillé.<br />
Comme l'histoire <strong>de</strong> cette plante dont le récit nous est conté par un certain Brandis dans un livre qui serait<br />
intitulé "Der <strong>Le</strong>ben und Polaritat". Sa racine heurta une vieille semelle <strong>de</strong> botte. Je ne pense pas, est-il écrit,<br />
que ses chromosomes-mémoire aient pu enregistrer pareille obstacle. Elle <strong>de</strong>vait donc inventer. Et elle<br />
inventa. Au lieu <strong>de</strong> contourner ce barrage dont elle ne connaissait pas l'étendue, elle tâtonna et s'aperçut qu'il<br />
existait <strong><strong>de</strong>s</strong> trous laissés par les points <strong>de</strong> couture. Elle se divisa en autant <strong>de</strong> radicelles qu'il y avait <strong>de</strong> trous.<br />
Chaque radicelle choisit son trou, traversa et, la traversée achevée, les radicelles se ressoudèrent pour recréer<br />
la racine unique qu'elles formaient à l'origine.<br />
Instinct ? Mais basé sur quoi ? Alors, "intelligence" ?<br />
Cela n'est pourtant rien comparé aux miracles quotidiens que les fleurs, ces êtres paralysés sur leur<br />
pédoncule, accomplissent pour permettre à leurs éléments femelles <strong>de</strong> rencontrer les éléments mâles et<br />
inversement afin qu'ils se fertilisent. Si la nature évoluait tout bêtement, le processus, pour l'ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
plantes, serait vaguement le même. Or chaque famille possè<strong>de</strong> ses astuces adaptées à son cas bien particulier<br />
et, dans chaque famille, chaque sous-ordre essaie, à sa manière, <strong>de</strong> les perfectionner. C'est un conte <strong>de</strong> fée<br />
perpétuel auprès duquel nos pauvres tâtonnements d'hommes orgueilleux semblent dérisoires.