Les clefs des Portes de demain - Le chasseur abstrait
Les clefs des Portes de demain - Le chasseur abstrait
Les clefs des Portes de demain - Le chasseur abstrait
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
6<br />
INCARCÉRATION<br />
22 Mars.<br />
Incroyable ! Ahurissant ! Je crois sortir d'un rêve mais la cellule est bien réelle. Instinctivement, je me<br />
frotte les poignets croyant y sentir encore le froid glacial et ru<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> menottes avec, presque aussi réelle<br />
également, la voix toute aussi glaciale <strong>de</strong> l'inspecteur <strong>de</strong> police qui fit irruption dans ma chambre, ce matin. -<br />
Allez ! Debout, salop ! On va te montrer comment on "saque" les violeurs <strong>de</strong> fille.<br />
J'avais la bouche pâteuse et la tête lour<strong>de</strong>, comme gonflée et prête à éclater. Et l'abrutissement d'un tel<br />
réveil n'était pas fait pour m'arranger. Je bafouillais je ne sais quoi. Je sentis <strong><strong>de</strong>s</strong> menottes qui enserraient mes<br />
poignets et <strong><strong>de</strong>s</strong> mains qui, me bousculant, me projetaient littéralement dans une voiture pendant que je<br />
recevais sur le dos un tas d'habits que je n'avais pas eu le temps <strong>de</strong> mettre.<br />
Je commençais à réagir dans le cachot du commissariat. Je regardais la grille que je tâtais pour me certifier<br />
que je ne rêvais pas et vins m'asseoir sur le banc <strong>de</strong> ciment noir, noir par le ciment ou par la crasse, la<br />
pénombre ne permettant pas <strong>de</strong> vérifier. Sur le côté, le trou <strong><strong>de</strong>s</strong> W-C bouché, maculé et puant. <strong>Le</strong> mur était<br />
aussi maculé, presque aussi puant et, <strong>de</strong> plus, recouvert d'inscriptions ordurières. De quoi s'occuper au cas où<br />
l'attente durerait. Je vis mes habits posés dans le coin gauche et m'habillais.<br />
Quelques heures plus tard, un gendarme, en uniforme cette fois-ci, vint me chercher. Un <strong>de</strong>uxième<br />
m'encadra, me <strong>de</strong>manda <strong>de</strong> tendre les mains, presque gêné, en s'excusant et j'entendis claquer les menottes. <strong>Le</strong><br />
fourgon cellulaire, grillagé, d'un bleu presque noir, un vrai fourgon mortuaire, m'attendait et m'entraîna à mon<br />
premier contact avec le tribunal.<br />
Bureau du juge d'instruction. Frappe du gendarme à la porte, entrée, sortie, attente. Un bruit <strong>de</strong> machine à<br />
écrire et <strong>de</strong> feuilles qu'on froisse, arrache ou dissocie. Puis le "Vous pouvez entrer !"<br />
Un bureau propret et qui sent presque bon. Monsieur le juge souriant : "Vous pouvez vous asseoir!"<br />
pendant que les <strong>de</strong>ux pandores se postent légèrement en arrière, à droite et à gauche <strong>de</strong> ma chaise. Une<br />
secrétaire qui semble se faire toute petite et ne regar<strong>de</strong> que son clavier.<br />
L'interrogatoire, le premier avant tant d'autres, commence alors.<br />
- Nom ?<br />
- Grivelot<br />
- Prénoms ?<br />
- Michel<br />
- Nom <strong>de</strong> votre père ?<br />
- Je n'ai pas connu <strong>de</strong> père, je viens <strong>de</strong> l'assistance. Mon père adoptif est décédé.<br />
- Nom <strong>de</strong> votre mère ?<br />
- Grivelot Jeanne, c'est ma mère adoptive.<br />
- Age ?<br />
- 19 ans.<br />
- Profession ?<br />
- Ouvrier agricole.<br />
- Michel Grivelot, vous êtes prévenu d'avoir, hier soir, entre minuit et 1 heure du matin, molesté<br />
violemment et essayer <strong>de</strong> violer ma<strong>de</strong>moiselle Simone Richard, fille <strong>de</strong> Monsieur Richard, votre patron. Elle<br />
ne s'en est tirée que grâce à l'arrivée provi<strong>de</strong>ntielle du chien <strong>de</strong> leurs voisins. Qu'avez-vous à dire ?<br />
La foudre serait tombée à mes pieds que je n'aurais pas été plus stupéfait. Moi, violer Simone ? Mais c'est<br />
impensable. Jamais, jamais je ne l'aurais pu.<br />
- Ma<strong>de</strong>moiselle Richard, reprit le juge tout aussi souriant, vous a formellement reconnu et ses parents,<br />
bien entendu, ont porté plainte. Qu'avez-vous fait, hier, <strong>de</strong> 20 heures à 2 heures du matin ?