Observations - L'Université de la Relation

“La crise présente de l’humanité est d’abord une crise de
l’homme. Le rythme de développement de la civilisation
mécanique semble avoir outrepassé le processus naturel
d’adaptation humaine. Le problème consiste à trouver
l’ajustement approprié de l’homme à son nouveau milieu.
Evidemment, la source qui pourrait arrêter le processus de
dégénérescence et de décadence et écarter la menace doit
aussi jaillir de l’homme. Les modifications des institutions,
une réforme de la charpente politique et économique sont
importantes et urgentes, mais la condition première est un
désir, une volonté, un effort venant de l’homme. Il ne peut y
avoir de régénération sans une puissante vague humaine
aspirant à la foi, résolue à établir de solides modes de vie, à
cultiver les vertus de courage, d’endurance, de force morale, à
entraîner les esprits capables d’efforts créateurs.
On pourrait prétendre que les ressorts de ce sursaut humain
ne peuvent être ni contrôlés, ni influencés et que la vague, si
elle se produit, naîtra spontanément de l’humanité. Ce n’est
que partiellement vrai. En fait, l’homme est victime de son
milieu et une attitude expectative vis-à-vis des influences de
ce milieu conduit à un cercle vicieux... Ceux qui réalisent
l’étendue de la crise et qui se penchent sur l’avenir de la
civilisation ne peuvent rester inactifs.
Un effort délibéré pour combattre le mal est impérieux.
“Nous sommes à l’évidence en face d’une véritable crise de
notre civilisation qui croule. Pour la première fois, nous
commençons à réaliser que la science a créé un monde
inapproprié à la vie humaine. La présente crise a ses raisons
dans la structure même de notre société et ne peut être
détournée simplement par des changements politiques et
économiques. Cependant, la science nous a donné un pouvoir
inconnu des anciens qui ont vécu, prospéré et disparu. Avec
un tel pouvoir, il n’est pas impossible que la société puisse être
reconstruite selon les lois naturelles et continue à se
développer dans un milieu adéquat. 25
Alexis Carel
Observation : ce texte d’Alexis Carel fut écrit en 1930...
Est-ce que l’Europe l’entendra aujourd’hui ?