Argentine : Volver - Nouveaux Droits de l'Homme
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Faire “parler”<br />
les fosses communes<br />
LE CAS LIBANAIS<br />
Selon le Rapporteur<br />
Spécial <strong>de</strong> l’ONU pour<br />
les exécutions extrajudiciaires,<br />
sommaires ou<br />
arbitraires, les “charniers” sont <strong>de</strong>s<br />
endroits où trois ou plusieurs victimes<br />
d’exécutions extrajudiciaires,<br />
sommaires ou arbitraires ont été<br />
enterrées sans être décédées au<br />
combat ou lors d’affrontements<br />
armés.<br />
La troisième et quatrième convention<br />
<strong>de</strong> Genève et le premier<br />
protocole régissent l’enterrement<br />
et l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong><br />
guerre. Les prisonniers <strong>de</strong> guerre<br />
décédés par exemple, doivent être<br />
enterrés convenablement et doivent<br />
être clairement i<strong>de</strong>ntifiables,<br />
Mais le droit d’exhumer <strong>de</strong>s charniers<br />
n’est pas clair dans le droit<br />
international. La résolution 3074<br />
(1973) <strong>de</strong> l’Assemblée Générale<br />
<strong>de</strong>s Nations Unies appelle les Etats<br />
à coopérer dans les enquêtes sur les<br />
crimes <strong>de</strong> guerre. Un gouvernement<br />
normalement n’a pas à «<br />
autoriser » la recherche <strong>de</strong> charniers.<br />
Durant les 20 <strong>de</strong>rnières années, <strong>de</strong>s<br />
charniers ont été découverts en<br />
<strong>Argentine</strong>, au Guatemala, au<br />
Salvador, au Honduras, en<br />
Ethiopie, au Mexique et en Irak.<br />
Par ailleurs, tous les charniers dont<br />
on soupçonne l’existence n’ont pas<br />
nécessairement été créés en violation<br />
<strong>de</strong>s Conventions <strong>de</strong> Genève et<br />
<strong>de</strong> leurs Protocoles Additionnels. Il<br />
est concevable que certains<br />
contiennent les corps <strong>de</strong> soldats<br />
combattants enterrés dans une<br />
fosse commune pour <strong>de</strong>s motifs d’ordre<br />
sanitaire ou pour d’autres raisons<br />
légitimes. De la même façon, certains<br />
pourraient contenir les corps <strong>de</strong> civils<br />
enterrés ensemble pour <strong>de</strong>s raisons<br />
légitimes.<br />
C’est donc en étayant les dépositions<br />
<strong>de</strong> témoins et en considérant<br />
les découvertes et les circonstances<br />
<strong>de</strong> création <strong>de</strong> chaque charnier<br />
qu’on établit <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> preuve<br />
soli<strong>de</strong>s démontrant que <strong>de</strong>s crimes<br />
comme <strong>de</strong>s exécutions sommaires<br />
ont été commis. Comme les exhumations<br />
ne doivent être réalisées que<br />
dans le cadre d’une enquête, les<br />
enquêteurs doivent être en possession<br />
<strong>de</strong> certaines informations<br />
concernant <strong>de</strong>s charniers susceptibles<br />
<strong>de</strong> les intéresser.<br />
Malgré le fait que l’anthropologie<br />
médico-légale est une science jeune,<br />
les experts médico-légaux disposent<br />
<strong>de</strong> techniques leur permettant d’établir<br />
la date et la cause du décès, même<br />
en présence <strong>de</strong> restes très anciens. Ces<br />
tests, combinés à <strong>de</strong>s enquêtes et examens<br />
non médico-légaux, permettent<br />
aux enquêteurs <strong>de</strong> distinguer les sites<br />
éventuellement liés au conflit <strong>de</strong> ceux<br />
dépourvusd’intérêt.<br />
Les témoins (reporters, civils, parents,<br />
ONG…etc. qui découvrent un charnier<br />
ne sont pas supposés agir sur le<br />
site, surtout que dans certains cas les<br />
sites sont minés ou contiennent <strong>de</strong>s<br />
obus non explosés. Une activité d’amateurs<br />
pourrait détruire <strong>de</strong>s preuves<br />
importantes. Cette tache doit incomber<br />
à une équipe <strong>de</strong> professionnels<br />
sous supervision internationale (le<br />
CICR, le Haut commissaire aux<br />
droits <strong>de</strong> l’Homme <strong>de</strong>s Nations Unies<br />
ou <strong>de</strong>s ONG spécialisées comme<br />
Physicians for Human rights).<br />
Les succès au niveau international<br />
varient d’un pays à l’autre. La <strong>de</strong>struction,<br />
le manque <strong>de</strong> preuves ou<br />
les dégâts causés par les phénomènes<br />
naturels sont <strong>de</strong>s facteurs<br />
déterminants pour que <strong>de</strong>s résultats<br />
finaux soient confirmés.<br />
Dans le cas du Liban, la situation<br />
semble être complexe. Afin d’éviter<br />
<strong>de</strong>s erreurs dont les conséquences<br />
pourraient être dramatiques, il est<br />
nécessaire qu’un mécanisme soit<br />
mis en place afin d’i<strong>de</strong>ntifier tous<br />
les sites suspects. Ensuite, <strong>de</strong>s équipes<br />
pluridisciplinaires mixtes (formes<br />
<strong>de</strong> professionnels libanais et<br />
non libanais) doivent être chargées<br />
d’enquêter et <strong>de</strong> déterminer les<br />
charniers relevant <strong>de</strong> crimes <strong>de</strong><br />
guerre et <strong>de</strong> prendre les mesures<br />
nécessaires, dans le respect <strong>de</strong> la<br />
dignité <strong>de</strong>s victimes, <strong>de</strong> leurs<br />
familles et du principe <strong>de</strong> non<br />
impunité. Le droit international ne<br />
tolère aucun compromis à ce<br />
niveau puisque les crimes <strong>de</strong> guerre<br />
sont imprescriptibles.<br />
Dr. Elie Abouaoun<br />
(Chargé <strong>de</strong> Cours<br />
à l’Université St Joseph)<br />
Arc en Ciel • 21