Argentine : Volver - Nouveaux Droits de l'Homme
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et nous…<br />
Port-Melo,<br />
roman <strong>de</strong> la mémoire et <strong>de</strong> l’oubli<br />
Editions Gallimard, collection continents noirs, 2006<br />
D<br />
ans un port d’Afrique<br />
<strong>de</strong> l’Ouest où un peuple<br />
d’anonymes et <strong>de</strong><br />
cireurs <strong>de</strong> chaussures<br />
tente <strong>de</strong> survivre, la Milice fait régner<br />
la terreur, réprimant toute manifestation,<br />
supprimant tout opposant.<br />
Sous le regard <strong>de</strong> la mère Cori, «<br />
sage vieille folle » qui lit le <strong>de</strong>venir<br />
<strong>de</strong> son pays dans ses cauris, Orpheus<br />
Bambara, le chef <strong>de</strong> la PJ, traque<br />
Manuel. Ce rebelle tient un carnet<br />
où il fait le compte macabre <strong>de</strong> tous<br />
les cadavres jetés à la mer après leur<br />
longue torture et leur exécution<br />
sommaire. Un carnet contre l’oubli,<br />
une liste <strong>de</strong> noms que l’autorité veut<br />
effacer. Son ami, Christophe Mélo,<br />
et la belle Joséphine, essaient <strong>de</strong> le<br />
sauver mais aussi <strong>de</strong> sauver leur propre<br />
peau. Ils finiront par s’aimer sous<br />
le wharf au coeur d’un mon<strong>de</strong> magnifique<br />
et apocalyptique avant d’être<br />
pourchassés à leur tour...<br />
le <strong>de</strong> la République”<br />
Jeanne-Luce Marcouly - Copedit<br />
Ce premier roman d’un écrivain né<br />
au Togo en 1975, qui vit actuellement<br />
au Québec après <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />
supérieures en France, met en scène<br />
une Afrique <strong>de</strong> la corruption, <strong>de</strong> la<br />
sulteront pas leur maîtres, n’agresseront pas leurs camara<strong>de</strong>s, ne brûleront pas la<br />
voiture <strong>de</strong> leurs voisins - voire qu’ils songeront à acheter <strong>de</strong>ux bouquins plutôt<br />
qu’une paire <strong>de</strong> Nike.<br />
Dans son livre “Le Périgord à l’Ecole <strong>de</strong> la République”, on ne sent pas la truffe mais<br />
l’encre violette, l’o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la craie. Photos à l’appui, on redécouvre les blouses qui,<br />
en ce temps, étaient facteur d’égalité entre les élèves.<br />
Ceci étant, l’ouvrage ne se cantonne pas dans les généralités. C’est un outil “pointu”<br />
<strong>de</strong> 360 pages qui radiographie l’école et sera précieux plus tard aux chercheurs<br />
et autres documentalistes. Car cette somme, bien qu’il n’y paraisse, est un travail<br />
<strong>de</strong> “bénédictin” (désolé pour la laïcité) ou, mieux encore, <strong>de</strong> “bénédictine”- ce qui<br />
n’est pas mauvais pour la santé. On en reprendrait volontiers d’ailleurs. A consommer<br />
sans modération. <br />
P.B.<br />
délation et <strong>de</strong> la terreur, une Afrique<br />
lessivée et abandonnée à l’indifférence<br />
du mon<strong>de</strong> extérieur, mais<br />
aussi une Afrique <strong>de</strong> la révolte.<br />
En plaçant son roman sous le signe<br />
d’une citation <strong>de</strong> son illustre aîné<br />
Kossi Efoui, E<strong>de</strong>m donne le ton d’un<br />
récit labyrinthique comme le mon<strong>de</strong><br />
qu’il décrit. Mais si <strong>de</strong>s ombres<br />
<strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt aux enfers, c’est la chef <strong>de</strong><br />
la milice qui s’appelle Orpheus et<br />
règne sur les ténèbres <strong>de</strong> ses caves... Et<br />
seul Mélo en ressort avec pour mission<br />
<strong>de</strong> “donner un nom” pour se<br />
sauver lui-même. Le fil d’Ariane est<br />
brisé et les repères, brouillés, s’effacent<br />
dans un Port où les rues n’ont<br />
pas <strong>de</strong> nom et où il n’y a « pas <strong>de</strong><br />
chemin ». Errance du héros au<br />
prénom <strong>de</strong> marcheur dans un univers<br />
en déshérence...<br />
Imprécision du lieu, atemporalité<br />
du récit, linéarité <strong>de</strong> la chronologie<br />
bouleversée : le roman d’E<strong>de</strong>m<br />
atteint l’universel et les disparus du<br />
Port sont tous les disparus, la milice,<br />
tous les régimes d’oppression. Il<br />
s’agit bien là d’une utopie en négatif<br />
et on pense certes à l’Afrique du Sud<br />
<strong>de</strong> l’Apartheid, aux régimes <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>nts<br />
à vie <strong>de</strong> l’Afrique post-coloniale,<br />
mais aussi aux dictatures sudaméricaines<br />
<strong>de</strong>s années soixante-dix,<br />
à la France <strong>de</strong> Vichy, aux régimes<br />
fascistes et nazis, à la Russie soviétique,<br />
à la Chine totalitaire, à<br />
l’Afghanistan <strong>de</strong>s Talibans... La liste<br />
est malheureusement infinie <strong>de</strong> l’arbitraire<br />
et <strong>de</strong> la répression.<br />
Cependant, Port-Mélo ne se réduit<br />
pas à un tableau expressionniste <strong>de</strong><br />
la souffrance et <strong>de</strong> l’horreur : c’est<br />
un hymne à la résistance et à la vie,<br />
un chant d’amour et d’espoir qui<br />
vibre au son <strong>de</strong>s gospels et <strong>de</strong> la<br />
musique <strong>de</strong> Miles Davis ou <strong>de</strong> Tiken<br />
Jah Fakoly, une célébration <strong>de</strong> la littérature<br />
et du pouvoir <strong>de</strong>s mots contre<br />
l’obscurité et l’oubli. Une<br />
plongée en enfer comme une o<strong>de</strong> à<br />
la vie. T.B.<br />
Arc en Ciel • 55