FEU ET LUMIERES - Institut du Monde Arabe

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Les Ottomans, désireux de poursuivre leur avantage, toujours poussés par les Anglais, débarquent ensuite, le 14 juillet, à Aboukir. Bonaparte les attaque et les bat, le 25 juillet. L’échec d’Acre s’en trouve atténué… « et le nom du conquérant redevient synonyme de victoire », écrit Henry Laurens, qui constate d’ailleurs que « plus rien ne retient Bonaparte en Egypte ». Les Anglais se sont chargés de faire tenir à Bonaparte quelques exemplaires assez récents de gazettes européennes qui détaillent les échecs des armées françaises en Europe. Le succès – terrestre – d’Aboukir permet à Bonaparte de quitter l’Egypte la tête haute : « Puisque l’empire d’Orient est un mirage, il lui reste encore l’empire d’Occident », écrit encore H. Laurens. Avant de partir, il s’adresse une dernière fois au diwan du Caire : « N’est-il pas vrai (…) qu’il est écrit dans vos livres qu’un être supérieur arrivera d’Occident, chargé de continuer l’œuvre du Prophète (…) N’est-il pas vrai (…) qu’il est encore écrit que cet homme, ce délégué de Mahomet, c’est moi ». Encore une fois, les ulémas opposent à ce discours un silence glacial… Le 22 août, le général en chef s’embarque secrètement pour la France. Il ramène avec lui les généraux Berthier, Andréossy, Marmont, Lannes et Murat (Junot et Desaix, indisponibles sur le moment, le rejoindront peu après) et quelques civils, dont Monge et Berthollet. Encore une fois, il échappe à la croisière anglaise et débarque à Fréjus, le 9 octobre 1799. Partout, sur le trajet qui le mène à Paris, le 16 octobre, il est acclamé comme un sauveur… On sait quel destin l’attend. Le départ de Bonaparte ne peut être tenu caché bien longtemps… Kléber, qui a hérité du commandement en chef, doit faire face à une situation désastreuse. Malgré l’affection profonde qu’ils portent au général alsacien, les soldats ne peuvent cacher leur colère. Les caisses sont vides. Les effectifs de l’armée ont subi des pertes considérables depuis leur arrivée. Les épidémies font des ravages. La troupe, épuisée, démoralisée par le départ de Bonaparte, éclate en mutineries que Kléber est contraint de mater… Aussi, dans un premier temps, décide-t-il, malgré les ordres reçus, de négocier avec les Ottomans une évacuation dans l’honneur. Il signe en ce sens l’accord d’al-Arich qui doit permettre aux Français de quitter l’Egypte sur des bâtiments fournis par les Ottomans, avec la promesse de ne pas être inquiétés par la Porte et ses alliés jusqu’au retour en France… Mais les Anglais, en dépit du désir qu’ils ont de voir les Français hors d’Egypte, s’opposent à ce qu’ils la quittent librement. Les hostilités reprennent. L’armée française trouve la force d’écraser les Turcs à Héliopolis. Kléber vient à bout d’une seconde insurrection du Caire et réaffirme la mainmise française sur l’Egypte, mettant en place un nouveau système fiscal et procédant même à la formation de troupes recrutées localement. Ces succès convainquent, peut-être, l’Alsacien de la possibilité de s’installer durablement en Egypte. Ses véritables intentions resteront inconnues : l’homme est assassiné par un « fanatique syrien », le 14 juin 1800, le jour même où Bonaparte, en Italie, remporte la bataille de Marengo... Malgré de réels talents d’administrateur, Jacques- François Menou, qui reprend le flambeau, est loin d’avoir les compétences militaires et le prestige de Kléber auprès des soldats. Les projets de ce général, converti à l’Islam, de faire de l’Egypte une colonie française resteront lettre morte face aux coups de boutoir des Anglais, bien décidés, eux, à en finir. Menou ira d’échec en échec. Son impéritie patente, tant militaire que diplomatique, mettra l’armée d’Orient dans l’obligation de capituler, le 30 août 1801. En face de lui, Anglais et Ottomans se renforcent de ses défaites. L’aventure est terminée. A leurs conditions, les Britanniques organisent le rapatriement en France, sur des navires anglais, des soldats, généraux et savants français. Ils s’approprient les collections de ces derniers – en acceptant toutefois, face aux protestations, de leur laisser leurs notes et leurs papiers –, parmi lesquelles figure, notamment, la fameuse pierre de Rosette, découverte dans la ville du même nom quelques jours avant que Bonaparte ne se soit, lui-même, embarqué pour la France. Portrait du Général Kléber André Dutertre, vers 1798 Musée national du Château de Versailles © RMN. Photo : Gérard Blot
L’EGYPTE DANS LA FRANCE DU XIX e SIECLE (JUSQU’EN 1869) En tant qu’entreprise militaire et coloniale, l’expédition d’Egypte constitue à l’évidence un échec, pour ne pas dire un fiasco. Cette même expédition occupe, pourtant, une place considérable dans l’imaginaire tant français qu’égyptien et ce, pour des raisons d’ordre essentiellement culturel… militaire, aventure savante : les deux faces de cet épisode se résument et «Expédition s’expriment dans la personnalité de Bonaparte qui les a voulues l’une et l’autre », écrit Yves Laissus, dans le catalogue de l’exposition. A l’évidence, sans les « savants » qui composent la Commission des arts et des sciences de l’armée d’Orient, et par lesquels Bonaparte se fait accompagner en Egypte, cette dimension culturelle n’aurait pas existé. Même s’il est aujourd’hui couramment admis que les savants et les artistes qui se sont trouvés mêlés aux aventures coloniales de l’Europe ont aussi été – fût-ce à leur corps défendant – les complices de ce fait colonial, il reste que, dans le cas de l’expédition, la présence de ces hommes en Egypte, pendant une période pourtant fort courte, a eu, dans maints domaines de la culture et de l’histoire des idées, des conséquences formidables. Monuments de l’Egypte de la Nubie Jean-François Champollion, 1835-1845 Collection Jacques Doucet © Bibliotheque de l’Institut national d’histoire de l’art, Paris
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