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FEU ET LUMIERES - Institut du Monde Arabe

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La Description est composée de trois parties :<br />

Antiquité, Histoire naturelle et Etat moderne. Si la<br />

section relative au patrimoine archéologique<br />

égyptien, en permettant pour la première fois une<br />

compréhension et une connaissance profondes de<br />

l’Egypte antique et de ses monuments, a un impact<br />

considérable sur la naissance de l’égyptologie, la<br />

troisième partie, dédiée à l’Etat moderne, représente,<br />

quant à elle, l’apport le plus original. Les planches<br />

consacrées à la description de l’Egypte contemporaine<br />

suscitent, en effet, l’apparition d’un regard<br />

nouveau, à la fois plus rigoureux et moins ethnocentrique.<br />

Le caractère scientifique de cette publication<br />

surpasse, et de loin, celui des récits de voyage qui<br />

prévalent jusqu’alors – de la vision enchanteresse<br />

d’un Savary à l’œil impitoyable d’un Volney, en<br />

passant par le Journal de voyage de Vivant Denon –<br />

et constitue, à l’époque de sa parution comme<br />

aujourd’hui encore, la qualité de cette œuvre unique<br />

et novatrice. Bien que la parution d’un tel monument<br />

littéraire vise sans conteste à transformer l’échec<br />

politique et militaire en revanche scientifique, il n’en<br />

reste pas moins que l’influence de cette nouvelle<br />

source documentaire est considérable et contribue<br />

pleinement au passage de l’égyptomanie <strong>du</strong> XVIII e siècle<br />

à l’égyptologie <strong>du</strong> XIX e .<br />

C’est que « la Description de l’Egypte (…) est à la<br />

source de l’égyptologie, <strong>du</strong> déchiffrement des<br />

hiéroglyphes », ainsi que l’écrit dans le catalogue de<br />

l’exposition Paul-Marie Grinevald, responsable de la<br />

Bibliothèque historique à Hôtel des Monnaies. Né en<br />

1790, Jean-François Champollion voue, dès son jeune<br />

âge, une passion sans bornes à l’antiquité égyptienne<br />

et décide de consacrer sa vie à l’élucidation de ce qui<br />

est alors le mystère des hiéroglyphes. Il se procure<br />

une copie des estampages de la pierre de Rosette que<br />

les savants français ont eu le temps de réaliser avant<br />

que les Anglais n’accaparent celle-ci. Le hasard vient<br />

aussi à son aide : lorsqu’il a quinze ans, son frère ainé<br />

« est le bibliothécaire de la ville de Grenoble, chef-lieu<br />

de la préfecture de l’Isère. Le préfet n’est autre que le<br />

mathématicien Joseph Fourier, ancien membre de la<br />

Commission des savants de l’expédition, ancien<br />

secrétaire de l’<strong>Institut</strong> d’Egypte, devenu depuis le<br />

retour d’Egypte le coordinateur de la publication et<br />

futur préfacier de la Description de l’Egypte »,<br />

rapporte Guillemette Andreu, conservateur en chef<br />

chargé <strong>du</strong> département des Antiquités égyptiennes au<br />

Musée <strong>du</strong> Louvre, dans l’article <strong>du</strong> catalogue consacré<br />

à la naissance de l’égyptologie. Champollion « a ainsi le<br />

loisir de pouvoir contempler la Description de l’Egypte<br />

avant les autres ; il se constitue alors une documentation<br />

de premier ordre pour ses travaux », poursuit-elle.<br />

Se fondant, notamment, sur les études de<br />

précurseurs, « accumulant les copies de textes,<br />

apprenant toutes les langues anciennes et sémitiques<br />

qui peuvent l’éclairer, comprenant que le copte est<br />

l’ultime avatar de l’égyptien hiéroglyphique,<br />

Champollion a trente-deux ans lorsqu’il a l’intuition<br />

fulgurante qui lui révèle la double nature des<br />

hiéroglyphes : à la fois phonogrammes et idéogrammes,<br />

ces signes peuvent être tour à tour employés dans un<br />

même texte tantôt pour leur valeur phonétique,<br />

tantôt pour l’idée qu’ils suggèrent », précise encore<br />

Guillemette Andreu.<br />

Couronnement de toute une vie, le voyage qu’il<br />

entreprend en Egypte, en 1928, va lui permettre de<br />

mettre en pratique la science dont il est l’inventeur :<br />

« Jeté depuis six mois au milieu des monuments de<br />

l’Egypte », écrit-il à son frère, « je suis effrayé de ce<br />

que j’y lis plus couramment encore que je n’osais<br />

l’imaginer » ! Des pans entiers des trois millénaires de<br />

l’histoire des Pharaons se dévoilent sous ses yeux,<br />

pendant ce séjour qui l’épuise. Il aura le temps et<br />

l’esprit de se comporter en pionnier encore, adressant<br />

une supplique au souverain de l’Egypte visant à créer<br />

un service de conservation des antiquités <strong>du</strong> pays et<br />

à protéger celles-ci <strong>du</strong> pillage et de la destruction :<br />

« Son Altesse pourrait ordonner qu’on enlevât sous<br />

aucun prétexte aucune pierre ou brique, soit ornée de<br />

sculptures, soit non sculptée, dans les constructions<br />

et monuments antiques existant encore ». Il faudra<br />

attendre plusieurs décennies et Auguste Mariette<br />

pour que la loi, en Egypte, s’empare <strong>du</strong> sujet.<br />

Champollion meurt peu de temps après son retour<br />

d’Egypte. « Grâce à sa découverte », constate Robert<br />

Solé dans le catalogue de l’exposition, « c’est toute<br />

une civilisation, muette depuis quatorze siècles, qui<br />

va se mettre à parler ». On peut toutefois se<br />

demander, comme le fait J.-M. Humbert,<br />

commissaire scientifique de l’exposition,<br />

dans l’article <strong>du</strong> catalogue intitulé<br />

Le style retour d’Egypte, sources<br />

et prolongements : « quelle<br />

aurait pu être l’évolution de<br />

l’égyptologie si l’expédition<br />

Encrier « égyptien » - Jean-Baptiste Chanoux, manufacture de Sèvres, 1802<br />

Musée national de Céramique, Sèvres<br />

© RMN. Photo : Christian Jean

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