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en embryologie et 9,5 en physique-bio ! Total, avec les coefficients, il a 9, 17 de moyenne !<br />
– Quoi la cata ? C'est pas si mal, dis-je rassuré. Il est presque à la moyenne !<br />
– Tu dis n'importe quoi, comme d'habitude !<br />
– J'ai pas fait un bac C mais 9,17, c'est pas loin de 10 chez moi !<br />
– On s'en fout ! Le premier admis a 18,58 de moyenne. Le numerus clausus était à 214 pour<br />
666 inscrits, ils sont allés jusqu'à 250 pour la liste complémentaire mais le dernier sur cette liste a<br />
encore 13,27 de moyenne ! Ton fils est classé 489e ! Il est aux figues et il va glandouiller tout l'été !<br />
Comment veux-tu qu'il réussisse avec une mentalité pareille ?!<br />
– Calme-toi, chounette ! Il va regonfler les batteries et à la rentrée : dare-dare !<br />
Mais même moi, je n'y crois qu'à moitié ! En pleine médecine, il n'aurait jamais dû partir aussi loin,<br />
aussi longtemps ! Anéantie par l'angoisse, ma douce capitule. Elle referme les annonces<br />
immobilières et va s'isoler dans notre chambre. Ça me désole tellement de la voir partir avec ses<br />
Kleenex que je sais ce qu'il me reste à faire ! Non, je ne vais pas cuisiner épicé, je vais téléphoner à<br />
notre inconscient de fiston pour le mettre face à ses responsabilités et récupérer des nouvelles<br />
fraîches dans la foulée : ça rassurera ma bien aimée !<br />
Il est quinze heures chez nous, il doit être huit heures du matin là-bas, c'est un peu tôt mais<br />
tant pis, il n'avait qu'à mieux travailler. Je prends le calepin et compose l'indicatif international...<br />
Comme je ne suis pas sûr de l'issue de cet appel, je m'isole dans la cuisine et regarde Alex<br />
qui mime un match de rugby à lui tout seul dans le jardin. Il y a pris goût, on dirait...Un demisou<strong>rire</strong><br />
en coin, je patiente tandis que la réception de l'hôtel me branche sur la chambre de Matéo.<br />
Les sonneries s'accumulent, soudain une voix familière mais caverneuse répond :<br />
– Allô ?<br />
– Salut mon grand ! C'est ton père à l'appareil !<br />
– Qu'est-ce qui se passe pour que tu appelles si tôt ? Mamie a cassé sa pipe ?<br />
Toujours aussi délicat ! Il a la voix tellement pâteuse qu'il a dû se coucher peu de temps avant que<br />
j'appelle ! Enfin, mieux vaut entendre ça que d'être sourd ! Je le ramène à la réalité en lui énonçant<br />
son relevé de notes et mon cher fils se montre on ne peut plus stoïque face à l'adversité. Tout juste<br />
se fend-il d'un « ouais, je m'y attendais» mais de contrition, d'angoisse ou de remords : que nenni !<br />
Je le sermonnerais bien mais le sentir aussi peu sensible à son destin me décourage à l'avance. Je<br />
réussis quand même à lui lâcher un « faudra qu'on parle à la rentrée », assorti d'un « va falloir<br />
réagir, là parce que y'a le feu ! » mais sa force d'inertie perdure et annihile mes velléités.<br />
Par contre, quand je change de sujet et demande si tout se passe bien - histoire de ne pas<br />
rentrer bredouille pour ma chounette- il s'anime et me conte moult anecdotes qui finissent par me<br />
dérider malgré moi.<br />
Tant et si bien que je raccroche une heure plus tard, rassuré, voire enjoué. Il faut que je<br />
raconte tout ça à ma belle.<br />
– Chounette ! J'ai eu Mat au téléphone ! Il va bien ! Ils arrêtent pas de faire des trucs<br />
incroyables, il va ramener des super photos !<br />
– Génial ! Il pourra illustrer son CV de futur G-O au Club Mèd. Et entre deux excursions, tu<br />
lui as dit pour ses notes ?<br />
– Évidemment que je lui ai dit ! J'ai même commencé par ça !<br />
– Et il a repris un Mojito, tellement ça l'a accablé ?<br />
– Pas du tout ! Il a vraiment encaissé le coup, fais-je en sentant mon nez s'allonger de dix<br />
bons centimètres. Mais tu veux savoir comment ça se passe ou pas ? Il va bien, ils engrangent plein<br />
d'expériences, c'est l'essentiel, non ?!<br />
– Oh oui ! Mais il n'avait pas besoin de visa pour goûter aux joies du redoublement !<br />
Frissons garantis et Pôle-Emploi qui vous tend les bras !<br />
– Chounette, arrête ! fais-je en l'enlaçant. Il va bien. Ça ne te rassure pas, ça ? Tu ne veux<br />
pas savoir ce qu'il m'a raconté ?<br />
Elle soupire et va se préparer un thé :<br />
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