rire larmes

de trois jours d'argent de poche, ces paroles font plus peur que la finition d'une centrale nucléaire
iranienne)... Juani bosse dans un resto, je vais pouvoir l'aider pour me faire trois sous, on vivra chez
elle et tout ira bien... de toute façon, je suis pas prêt pour retourner au bagne, ça servirait à rien...
– Oh là, fiston ! Atterris un peu ! Tu crois qu'en faisant la plonge dans un bouge, tu vas
pouvoir vivre décemment ? Non mais allô la terre ?!
– D'abord, c'est pas un bouge, c'est une bodéga réputée. Ensuite, Juani n'est pas serveuse,
mais chanteuse et elle cherchait un guitariste pour l'accompagner, alors ça tombe pile-poil !
– Ouais, ben Shakira pourra très bien réussir sans guitariste, alors arrête tes conneries et
ramène-toi vite fait en France !
Mais essayez de raisonner un ado amoureux ! C'est comme demander à l'Opus Dei d'applaudir le
mariage pour tous ou chercher à établir un lien de parenté entre Angela Merkel et Grace de
Monaco ! Bref, on a crisé en ligne pendant un quart d'heure avant de capituler, totalement anéantis.
Françoise a ouvert le frigo et entamé le Muscat à même la bouteille et à grande lampées, si
bien que quand Marie-Élisabeth est venue chercher son petit Eliot, elle a reculé de trois mètres
après avoir fait la bise à ma douce.
Pour ma part, la réaction a été légèrement plus épidermique puisque j'ai rassemblé tous les
cours de mon fils pour les brûler dans le jardin. Afin de ne pas rater mon coup, j'avais pris soin
d'arroser le tout d'essence à tondeuse et du peu de vodka que je n'avais pas encore sifflé. Et ma foi,
j'ai obtenu un bûcher que les anglais de Rouen n'auraient pas renié, à tel point d'ailleurs que
pompiers et gendarmes sont venus interrompre cette magnifique soirée.
Une légère empoignade a suivi, sous les yeux médusés d'Alex et du chat. Du coup,
Françoise a fini la nuit en cellule de dégrisement et moi, menotté au radiateur du planton de garde
au commissariat. Rien d'extraordinaire quand on a des enfants, finalement.
épilogue
dix-huit mois plus tard, à la clinique de repos des Tilleuls...
– Tu vas bien ? demande ma douce, qui est un peu intimidée pour sa première visite.
– Oui, oui, fais-je en l'invitant à s’asseoir à mes côtés sur l'un des bancs du parc.
L'un des avantages avec l'éducation nationale, c'est qu'ils ont des maisons de convalescence pour
leurs personnels en surchauffe. En septembre, j'avais bien repris les cours mais entre la collègue
d'espagnol avec qui on s'est crêpé le chignon sur l'Amérique du Sud et les élèves avec qui on s'est
frités lorsque je leur ai annoncé que je ne traiterais pas le chapitre portant sur les bienfaits d'une «
gap year » - ou année sabbatique pour les pignoufs qui sèchent médecine- bref, ça a été la goutte qui
a fait déborder le vase ! Et me voilà près de Vichy pour une bonne « cure de remise en forme ». Ma
douce a finalement mieux tenu le choc puisqu'elle a réussi à gérer les ados, la maison, son boulot où
elle a même réussi à négocier une augmentation avec Mr Minart. Je ne veux pas savoir comment
elle l'a eue mais un dossier à la fois.
– Alors, le traitement te fait du bien ? s'enquiert-elle. Pas trop long, l'isolement ?
– Non, ça va. Je serai bientôt d'attaque, rassure-toi. Et à la maison, quoi de neuf, alors ?
– Figure-toi que Juliette s'est inscrite en Droit à Lyon. Depuis qu'elle a rencontré Jean-
Guillaume, je ne la reconnais plus.
– Jean-qui ?
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