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creative PROCESS magazine #16

arts / design / food / business : les créatifs son dans CREATIVE PROCESS MAGAZINE

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L’élégance. Le qualificatif revient souvent dans la presse<br />

lorsqu’il est question de The National, un groupe américain<br />

dont l’audience n’a jamais réussi à toucher le grand public en<br />

France. Chez les puristes d’un rock de grande classe - dans le<br />

sillage de REM et du mythique Michael Stipe s’il faut trouver<br />

quelques filiations -, The National est une référence, sinon<br />

LA référence. La voix de baryton de Matt Berninger donne<br />

sa coloration chaude à toutes les compositions de The National,<br />

un groupe composé de deux doublettes de frères (Aaron<br />

et Bryce Dessner aux guitares, Bryan et Scott Devendorf à la<br />

rythmique). Assez confidentiel en France, mais lié à quelques<br />

valeurs sûres comme Sufjan Stevens ou My Brightest Diamond, dont ils ont été<br />

des collaborateurs occasionnels (et réciproquement), le groupe de Brooklyn s’est<br />

fait remarquer en s’engageant, aux côtés de Barack Obama, lors de sa première<br />

campagne présidentielle (2008). Leur titre Fake Empire à la rythmique imparable<br />

sera même utilisé pour plusieurs clips de campagnes de celui qui deviendra le<br />

premier président noir américain.<br />

_Nouvel album Sleep well beast<br />

En septembre dernier, The National a sorti son nouvel album, Sleep well beast,<br />

lequel recèle un titre étrange. Walk it back, - littéralement « Marche arrière » -,<br />

intègre un texte lu par une voix féminine – celle de la compagne de Matt Berninger.<br />

Cette courte insertion est tirée d’un article du New-York Times Magazine de<br />

2004. Dans un dossier consacré à l’administration Bush et à ses « faucons » impérialistes,<br />

au moment de leur toute-puissance post-11 septembre, une déclaration<br />

était attribuée à un conseiller de George Bush, Karl Rove. Comme un écho au<br />

Fake empire de l’album Boxer (2007).<br />

« People like you are still living in what we call the reality-based community. You<br />

believe that solutions emerge from your judicious study of discernible reality.<br />

That’s not the way the world really works anymore. We’re an empire now, and<br />

when we act, we create our own reality. And while you are studying that reality<br />

— judiciously, as you will — we’ll act again, creating other new realities, which<br />

you can study too, and that’s how things will sort out. We’re<br />

history’s actors, and you, all of you, will be left to just study<br />

what we do ».<br />

Et donc en français :<br />

« Les gens comme vous vivent encore dans ce que nous appelons<br />

une communauté fondée sur la réalité. Vous croyez que<br />

des solutions émergent de votre étude judicieuse de la réalité<br />

perceptible. Ce n'est plus comme ça que le monde fonctionne<br />

en réalité. Nous sommes un empire à présent, et lorsque nous<br />

agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous étudierez cette<br />

réalité - judicieusement, comme vous le ferez - nous agirons à nouveau, créant<br />

d'autres réalités nouvelles, que vous pourrez étudier aussi, et c'est ainsi que les<br />

rôles se répartiront. Nous sommes les acteurs de l'histoire, et vous, vous tous,<br />

réduits à étudier de ce que nous faisons ».<br />

Karl Rove s’est toujours défendu d’avoir dit cela devant le journaliste du New<br />

York Times Ron Suskind, mais la citation fait peu de doute. On trouve dans cette<br />

déclaration tout le cynisme et le mépris de classe dont l’administration Trump<br />

n’est pas non plus avare. Evoquant la « réalité », elle fait écho aux arrangements<br />

du nouveau président des Etats-Unis par son invention des « alternative facts ».<br />

L’histoire pourrait s’arrêter là, mais un reporter de l’hebdomadaire Newsweek<br />

a voulu donner à écouter ce titre, Walk it back, à ce fameux Karl Rove, lequel<br />

commenta : « ça commence comme un morceau d’Euro Tech Pop puis chemine<br />

vers un air plus énergique, plus facile à danser. Mais à mon avis, ça ne fera pas le<br />

Top 40 ! » Plutôt remuant, mais toujours élégant, Walk it back est un titre à part<br />

dans cet album qui demeure dans la droite ligne de ce que The National sait faire<br />

de mieux : une musique racée, à l’écart des modes, portée par une rythmique<br />

impeccable et la voix, chaude et profonde, de son chanteur, Matt Berninger. Sleep<br />

well beast est l’un des « must have » de cet automne 2017. Pas si loin que cela de<br />

ses albums référence, Boxer et Alligator.<br />

americanmary.com<br />

M<br />

musique<br />

29<br />

TEXTE cyrille planson

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