Recueil des Assises des métiers d'art 2019

C’était plusieurs mois avant que n’explose la crise
des Gilets Jaunes, qui a secoué l’ensemble de la
société, avec cet énorme besoin d’être acteur de
sa propre vie, de prise de parole et de débats,
que nous avons vue surgir dans tous les coins de
la France.
Nous sommes au contact des évolutions
sociales. Nous en ressentons les tensions et les
aspirations. Nous, nous représentons une voie
possible de réalisation de soi. Nos métiers d’art
entrent en résonnance avec les aspirations profondes
qui traversent notre société. Nous représentons
des alternatives à un monde morne,
uniformisé, dénué de sens et d’intelligence
humaine. Parce que nos ateliers sont source d’innovation
et de propositions créatives, parce que
la société est en quête de valeurs, d’alternatives
aux marchés de la consommation de masse,
d’alternatives dans le monde du travail, nous
sommes devenus incontournables.
Nous faisons rêver. Nous sommes
« le Centre du Monde » !
Vous aurez perçu, comme moi, l’abondance
des termes qui se répandent : « pièces uniques »,
« créatives », « faites à la main », « fabriquées
artisanalement », « sur mesure », de « fabrication
locale », « en circuit court »... Nous n’avons pas
attendu ces termes marketés pour exister. De
fait, la création par le travail de la matière nous
ancre dans ces valeurs depuis des millénaires,
ce qui nous permet d’être force de proposition
et tournés vers l’avenir.
Nous n’avons pas attendu que la société nous
redécouvre. Nous avons été actifs pour rendre
visibles nos ateliers et notre secteur des métiers
d’art. Nous nous sommes organisés collectivement
pour atteindre nos marchés. Nous avons
rendu nos métiers désirables.
Nous avons réalisé un rêve, en partage avec
nos anciens, en obtenant des lois, une définition
reconnaissant nos métiers d’art inscrits dans le
champ de la création artistique et la reconnaissance
d’un secteur économique global. Ces
lois sont le socle dont nous avions besoin pour
construire notre avenir.
Aussi, dans ce contexte propice pour nos
métiers d’art, qu’attend donc l’État pour donner
les moyens à notre secteur de se structurer, dans
la continuité des lois mises en place en 2014,
2015, 2016 ?
La période actuelle ne manque pas de combats.
Nous vivons une séquence de réformes portées
par le gouvernement, qui vont à l’encontre des
avancées et du socle que représentent les lois
qui définissent notre secteur.
Face à ces réformes, nous avons travaillé activement
et nous avons remis, à l’été 2018, aux
différents ministères et acteurs concernés, un
rapport sur notre secteur de métiers d’art. Ce
rapport demande aux pouvoirs publics la création
d’une branche professionnelle de métiers
d’art. Cette branche professionnelle correspond
à notre réalité, à ce que nous représentons tous
ensemble ici. Elle est la seule voie qui permettra
le développement du secteur.
Quels que soient les arbitrages de l’État, nous
continuerons à nous battre pour améliorer nos
conditions de vie professionnelle, et c’est là tout
l’enjeu de ces Assises en 2019.
Compter sur nous-mêmes, nous prendre en
main, c’est ce que nous avons toujours fait. Notre
destin est entre nos mains. Les temps des débats
et de discussions entre nous, c’est ce qui nous
a permis de nous unir, de prendre conscience
de notre famille, de nos valeurs, de mettre en
marche notre communauté.
Nous seuls pouvons exprimer ce que sont nos
attentes et nos besoins : montrer sans relâche
la réalité de notre secteur et notre apport dans
ce pays, prendre la parole et faire entendre la
voix des professionnels de métiers d’art, porter
les questions vitales de développement qui se
jouent pour nos milliers d’ateliers, voilà le rôle
d’Ateliers d’Art de France. Voilà notre responsabilité.
Ces Assises sont portées par une équipe d’administrateurs.
Chacun d’eux est un professionnel
engagé dans son métier. Chacun est pénétré de
la mission que nous lui avons confiée. Ils forment
une équipe prête à défendre notre maison, à
défendre nos métiers d’art. Ils méritent notre respect
et nos applaudissements.
(Présentation de Chantal Lumineau, Jean-Pascal
Lheureux, Sophie Guyot, Dominique Bréard,
Daniel Pelegrin, Gilles Foray, Marie Pastorelli,
Pascale Mestre, Julien Truchon, Véronique
Achard et Stéphane Galerneau.)
Nous allons engager nos Assises. Elles vont être
un grand moment d’expression pour notre communauté,
des femmes et des hommes déterminés
à veiller sur leur bien commun.
Nous sommes là pour dire qui nous sommes,
pour exprimer notre engagement, pour exprimer
le militantisme qui nous anime, pour garantir
notre développement collectif, pour faire exister
notre secteur de métiers d’art.
Je vous remercie.
(Applaudissements.) •
Assises des métiers d’art – 28 et 29 juin 2019, Palais des Congrès de Perpignan