Recueil des Assises des métiers d'art 2019

vous serez reconnus un jour. Non, vous êtes des
métiers. Vous êtes une branche.
Il faut bien poser les questions du modèle économique
et de sa capacité à perdurer et à se
déployer. J’ai l’intuition que la plupart de vos
interlocuteurs mésestiment cette dimension,
comme moi au tout début en vous écoutant, je
la mésestimais.
Entre l'industrie et l'artiste, il y a les métiers d'art.
Vous êtes cette singularité qu'il faut déployer, de
sorte de constituer tout d'abord la singularité de
ce que vous êtes dans les représentations de vos
interlocuteurs et décideurs.
En un mot, vous avez raison d'être là et d'être
optimistes au sujet de votre avenir. Mon intuition
est que votre optimisme est déjà porté par
ce que je viens de dire. Vous constatez bien le
mouvement vers vous.
Seulement, il faut maintenant faire comprendre
aux interlocuteurs et aux pouvoirs publics, que ce
soit au plan local ou national, que vous êtes des
métiers, que vous êtes une branche. Il faut poser
la question de l'environnement économique, du
modèle économique de vos métiers, de sorte
que vous puissiez déployer encore ce que vous
êtes dans le temps et aussi dans l'espace, parce
que vous êtes fichés au cœur de ce qui fait la
représentation du génie français.
Je vous remercie. J'ai peut-être été un peu long
et caricatural. Je crois que nous avons une demiheure
pour échanger entre nous.
(Applaudissements.)
M. Philippe LOISEAU
— Merci, Stéphane Rozès.
QUESTIONS ET PARTAGE
D’EXPÉRIENCES
M. Philippe LOISEAU
— Il est 11 h 05. Nous sommes dans une
logique de gestion du temps. Cela étant, pour
lancer les questions, nous avons constitué des
groupes miroirs qui ont vocation à amorcer les
échanges. Ce matin, nous allons y consacrer un
temps plus limité que prévu, mais cet après-midi,
nous reviendrons sur les questions que vous pouvez
poser.
Du côté des groupes miroirs qui sont en charge
des amorces, y a-t-il des questions que vous souhaiteriez
poser à Stéphane Rozès ?
INTERVENANTE DU GROUPE MIROIR
— Nous avons récolté auprès des participants
des réactions sur le fait d'avoir des statuts équivalents
par rapport à l'ensemble de la société,
sur des revalorisations et sur le fait que les revendications
de branche ne sont pas forcément
prioritaires.
Une première question concerne la façon de
résoudre le paradoxe de faire rêver sans faire
pitié ou sans se mettre en position d’assisté sur le
plan économique.
Deuxièmement, comment pérenniser cet intérêt
vers les métiers d'art après l'effet de mode ?
AUTRE INTERVENANTE
— Une question et une réaction autour de la
fragilité des savoir-faire : comment les pérenniser
et conserver, sachant qu’ils sont liés à des
identités uniques ?
Effectivement, en rebond, c'est la question d’effet
de mode. Si la société française a compris
le sens de notre travail et de nos valeurs, que
faut-il faire maintenant ? Le combat serait de
mettre en lumière le modèle économique que
nous portons.
Une dernière question est plus philosophique :
qu’est-ce que le beau ? Peut-on ou faut-il
le définir ?
M. Stéphane ROZÈS
— Je voudrais vous faire partager mes
convictions.
Le mot vient d'être utilisé deux fois, mais ce n'est
pas un « effet de mode ». Si l'analyse du mouvement
vers vous est juste, ce n'est pas un effet
de mode, mais un effet profond. Il ne tient pas
à vous, même si vous faites beaucoup d’efforts
au quotidien, ainsi que vos représentants. C’est
pour ces raisons fondamentales que l’on vous
regarde différemment. C'est lié à ce que nous
traversons en ce début de XXIe siècle. Ce sont
des questions de fond.
C’est une façon de répondre ; il ne s'agit pas
que vous fassiez pitié, pas du tout ! Au contraire,
il faut que vous expliquiez aux décideurs qu’il est
frappant qu’à ce point, ils ne comprennent pas
ce que nous nous disons là.
En général, ils sont un peu limités. Ils pensent que
les sociétés sont faites par les choses et que les
Effectivement, étant en charge de la tenue de
la réunion et des Assises, j'en suis le principal
gardien du temps. Je l’assume !
Stéphane Rozès va rester toute la journée avec
nous et interviendra à nouveau en clôture de
cette journée. Il a souhaité participer aux ateliers,
justement pour vous écouter et continuer à
nourrir son propos. •
Les participants des Assises réunis en ateliers
18 Assises des métiers d’art – 28 et 29 juin 2019, Palais des Congrès de Perpignan