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enregistre une lumière colorée si la cible<br />
est atteinte, et une lumière blanche dans<br />
le cas contraire.<br />
Miles Chamley-Watson décrit l’escrime<br />
comme « un sport intime et pur ».<br />
Il adore la vitesse (la pointe du fleuret,<br />
qui peut atteindre 160 km/h, est l’un<br />
des objets les plus rapides dans le sport)<br />
et le danger (le champion olympique<br />
Vladimir Smirnov a été tué en 1982 lorsqu’une<br />
lame a transpercé son masque et<br />
traversé son œil). Mais par-dessus tout,<br />
il aime le face-à-face avec l’adversaire.<br />
« Vous croisez littéralement le fer. Vous<br />
êtes devant votre adversaire, à armes<br />
égales. Qui sera le meilleur ? » Sa mère<br />
est convaincue qu’il aime avoir les projecteurs<br />
braqués sur lui. « Tout repose<br />
sur lui. Il n’y a personne d’autre à blâmer<br />
», explique-t-elle.<br />
Lorsque Miles Chamley-Watson dit :<br />
« Je mets mon masque d’escrime… et je<br />
deviens Superman », il serait aisé d’y voir<br />
S’AMUSER COMME UN<br />
CHAMPION D’ESCRIME<br />
Quand Miles arrive au <strong>Red</strong> Bull High Performance<br />
Center de Santa Monica, son entraîneur<br />
Tyler Jewell sait que l’escrimeur, réputé<br />
pour sa vivacité, risque de s’ennuyer à enchaîner<br />
les répétitions. Alors, il réserve un<br />
quart des sessions d’entraînement à des activités<br />
plus fun. Tyler Jewell a ainsi imaginé<br />
plusieurs jeux concurrentiels afin de remplacer<br />
les traditionnels exercices d’escrime. Voici<br />
cinq routines qui permettent à l’escrimeur<br />
de continuer à s’impliquer et rester réactif.<br />
1. UN AIR DE DODGEBALL<br />
Miles Chamley-Watson se tient entre deux<br />
lignes espacées de 2 mètres environ : il doit<br />
esquiver une balle de tennis tout en déchiffrant<br />
le petit symbole marqué dessus.<br />
2. DOUBLE VOLANT<br />
Dans cette variante déjantée du badminton,<br />
lorsqu’un joueur rate un volant, il doit courir<br />
le ramasser tandis que la personne en face<br />
sert immédiatement un autre volant.<br />
3. PRENDRE LA BALLE AU BOND<br />
Tyler Jewell envoie une balle de tennis à Miles<br />
Chamley-Watson et attend le dernier moment<br />
pour lui demander d’attraper la balle avec la<br />
main gauche, la droite ou les deux.<br />
4. AU PIED DE L’ARC-EN-CIEL<br />
Tyler Jewell jette plusieurs balles colorées<br />
au-dessus de Miles Chamley-Watson qui doit<br />
uniquement attraper la couleur demandée.<br />
5. . DING DONG<br />
Miles Chamley-Watson doit lancer une medecine-ball<br />
de 9 kilos à 3 mètres de hauteur afin<br />
de toucher une cloche accrochée au bout<br />
d’une corde. C’est aussi dur que ça en a l’air.<br />
la énième vantardise d’un athlète au<br />
sommet. Il ne serait d’ailleurs pas le<br />
premier à idolâtrer l’Homme d’acier :<br />
tout le monde sait que Shaquille O’Neal<br />
s’est fait tatouer le « S » de Superman.<br />
Mais il est difficile de ne pas y voir<br />
quelque chose de plus profond pour<br />
Miles Chamley- Watson. En vérité, se<br />
transformer en superhéros armé d’une<br />
épée lui permet d’échapper à ses troubles<br />
du comportement. Lorsque les Grayson<br />
ont émis l’idée que l’escrime aiderait le<br />
jeune Miles à se concentrer, ils ont visé<br />
juste. Une étude de 2012 a notamment<br />
montré que les sports comme l’escrime,<br />
qui nécessitent des adaptations et des<br />
déplacements constants, requièrent<br />
« une attention visuelle et une flexibilité<br />
considérables », ce qui peut être mis en<br />
corrélation avec des améliorations de<br />
l’attention, du traitement des informations<br />
et d’autres fonctions cognitives.<br />
Et il a toujours rejeté les traitements<br />
médicaux contre le TDAH. « L’escrime,<br />
c’est ma Ritaline », plaisante-t-il.<br />
L’avènement de Miles est survenu en<br />
même temps que l’avènement de l’escrime<br />
américaine, passée du statut de<br />
discipline obscure à celui de sport de<br />
niveau mondial au début du millénaire.<br />
En 2008, il remporte le championnat<br />
mondial junior par équipes, le tout premier<br />
pour les Américains, mais aussi<br />
participé à la première de ses douze compétitions<br />
seniors, championnats du<br />
monde et Jeux olympiques confondus.<br />
En 2010, il se hisse à la cinquième<br />
place aux championnats du monde. En<br />
2012, il fait une brève apparition au rang<br />
de n° 2 mondial avant de terminer sur<br />
une décevante 25 e place lors de ses premiers<br />
Jeux olympiques. L’année suivante,<br />
ses résultats sont colossaux : il remporte<br />
ses premiers championnats du monde<br />
en individuel pour les États-Unis et la<br />
première médaille par équipes du pays,<br />
une médaille d’argent. Aux Jeux olympiques<br />
de Rio de 2016, il termine 19 e ,<br />
tandis que l’équipe masculine américaine<br />
de fleuret repart avec sa toute première<br />
médaille en décrochant le bronze face<br />
à l’Italie. En 2019, son équipe décroche<br />
enfin le titre qui leur a longtemps<br />
échappé : celui de champion du monde.<br />
Il fait partie de la plus grande génération<br />
de fleurettistes américains. Depuis<br />
neuf ans, le quatuor infernal, composé de<br />
Miles Chamley-Watson, Gerek Meinhardt,<br />
Alexander Massialas et Race Imboden,<br />
représente les États-Unis au fleuret, ce qui<br />
constitue une longévité exceptionnelle.<br />
Les exploits individuels de chacun pourraient<br />
en faire des candidats tout à fait<br />
crédibles au titre de meilleur fleurettiste<br />
américain de tous les temps. Miles<br />
Chamley- Watson est le premier d’entre<br />
eux avec son titre mondial en individuel,<br />
alors qu’Alexander Massialas remportait<br />
une médaille d’argent à Rio et se classait<br />
n° 1 mondial. Gerek Meinhardt aussi a<br />
atteint le rang de n° 1 et fut le premier<br />
Américain à remporter une médaille aux<br />
championnats du monde (le bronze en<br />
2010), tandis que Race Imboden fut le<br />
premier à remporter un titre de la Coupe<br />
du monde qui récompense les résultats<br />
de toute une saison.<br />
Il faut le préciser, car c’est assez rare :<br />
les quatre hommes sont très proches,<br />
notamment en raison de la dizaine d’années<br />
passées ensemble à parcourir le<br />
monde. Miles Chamley-Watson est sans<br />
surprise le premier à se faire remarquer.<br />
« Vous pouvez faire confiance à Miles<br />
pour mettre l’ambiance dans un dîner<br />
d’équipe ou une réunion et vous faire<br />
rire, même si vous n’étiez pas parti pour »,<br />
s’amuse Gerek Meinhardt. L’étrange tandem<br />
formé par Miles Chamley- Watson et<br />
Gerek Meinhardt, qui partagent la même<br />
chambre lors des tournois depuis leur<br />
adolescence, est le plus solide. Pourtant,<br />
au contraire de Miles Chamley-Watson,<br />
Gerek Meinhardt est toujours d’humeur<br />
égale, calme, studieux et rigoureux.<br />
« Nous étions amis quand nous étions<br />
enfants, et nous avons grandi ensemble,<br />
ajoute Miles. Si vos amis ne sont pas là<br />
pour vous pousser, vous motiver à vous<br />
surpasser, alors changez d’amis. »<br />
Àl’université de Pennsylvanie, il avait<br />
la réputation de s’habiller à la mode<br />
pour trois francs six sous en mixant<br />
par exemple un sweat à capuche bon<br />
marché avec un jean qu’il avait savamment<br />
déchiré. Aujourd’hui, de grandes<br />
maisons comme Gucci et Prada sont ravis<br />
de le voir porter leurs créations. « J’adore<br />
les vêtements, confie-t-il. Vous enfilez un<br />
costume et vous pouvez faire ce que vous<br />
voulez. » Sa mère raconte aussi qu’il a<br />
toujours été « maniaque avec ses affaires.<br />
CE QU’IL AIME, C’EST LE FACE-À-FACE<br />
AVEC L’ADVERSAIRE : « CROISER LE FER. »<br />
32 THE RED BULLETIN