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The Red Bulletin Avril 2020 (FR)

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APOLLINE CORNUET/QUENTIN MAHÉAS/LA CLEF PROD, WILLIAM K/LA CLEF PROD<br />

Le MC-acteur Gringe<br />

sur scène à Garorock.<br />

compris qu’on pouvait faire à peu près<br />

tout ce qu’on voulait dans le rap. Tout le<br />

monde peut rapper aujourd’hui. Demain,<br />

un rappeur bourgeois de province peut<br />

se lancer dans le rap et devenir très important.<br />

Si le mec est bon, cela ne posera<br />

de souci à personne. Et il pourra collaborer<br />

avec des rappeurs plus street. Les<br />

barrières sont tombées à ce niveau-là.<br />

La personnalité multiple du rap<br />

français en <strong>2020</strong> s’explique inévitablement<br />

par ses évolutions ces trente<br />

dernières années. Quels ont été selon<br />

vous les moments fondamentaux<br />

de son histoire ?<br />

En fait, il y a eu deux chocs côté business<br />

dans l’histoire du rap français : quand<br />

Skyrock décide de devenir une radio<br />

rap en 1996, puisque ça accompagne le<br />

développement du rap et lui donne ses<br />

premiers gros succès, ses disques d’or. Et<br />

quand vingt ans plus tard, le streaming<br />

est comptabilisé dans les ventes de musique<br />

: le streaming est venu sauver le rap<br />

commercialement. Toute cette musique<br />

qui était téléchargée, écoutée de manière<br />

illégale par le passé, est devenue légale,<br />

comme par magie.<br />

Vous êtes au contact de l’essentiel des<br />

artistes et des intervenants du business<br />

rap. Dans les coulisses, quel est<br />

le vrai visage du rap aujourd’hui ? Estil<br />

toujours aussi sulfureux qu’on veut<br />

bien le croire ou nous le faire croire ?<br />

S’est-il assagi ?<br />

Assagi, je ne sais pas. Je n’ai pas connu le<br />

rap dans les années 90, car j’étais trop<br />

« Rap Jeu prouve aux<br />

gens que l’on peut<br />

parler du rap<br />

différemment »<br />

SCH, Dinos, Bigflo & Oli, Niska,<br />

Seth Gueko, Mac Tyer, Kalash<br />

Criminel, Oxmo Puccino… Depuis<br />

un an, sur <strong>Red</strong> Binks, une chaîne<br />

YouTube dédiée au rap, les patrons<br />

du genre défilent sur le plateau<br />

de la déjà culte émission<br />

Rap Jeu : un quizz d’un nouveau<br />

genre imaginé par Mehdi Maizi.<br />

« Contrairement aux kids d’aujourd’hui,<br />

j’ai un ADN télé assez<br />

fort, explique Mehdi, le créateur<br />

du format Rap Jeu. J’ai beaucoup<br />

regardé la télé étant gamin, j’ai<br />

bouffé du jeu télé, donc je voulais<br />

depuis longtemps faire un<br />

jeu télé sur le rap, avec les codes<br />

de YouTube. Pour transmettre de<br />

la connaissance sur le rap, sans<br />

être chiant. Pendant longtemps,<br />

en France, on a très peu ri du rap,<br />

alors qu’il y a plein de choses qui<br />

sont risibles dans cet univers,<br />

que l’on peut détourner ou parodier,<br />

sans s’en moquer. Cela<br />

s’est confirmé quand les auteurs<br />

de Rap Jeu sont entrés dans la<br />

boucle et que le côté fun de<br />

l’émission a commencé à se<br />

dessiner. Dans Rap Jeu, on peut<br />

plaisanter avec les artistes et les<br />

gens, et en retirer quelque chose.<br />

Ce concept est peut-être le point<br />

de départ de plein d’autres<br />

projets, car il prouve au public<br />

que l’on peut parler du rap<br />

différemment. »<br />

Retrouvez Rap Jeu ainsi que<br />

des freestyles et projets studio<br />

exclusifs sur <strong>Red</strong> Binks :<br />

youtube.com/redbinks<br />

« Un rappeur qui va rimer 12<br />

minutes sans refrain, ça peut<br />

sembler plus impressionnant<br />

qu’un morceau de 2 minutes<br />

où il y a moins de mots, mais<br />

ça ne l’est pas forcément. »<br />

jeune, mais depuis une dizaine d’années<br />

que je suis actif dans cet univers, j’observe<br />

un milieu globalement très professionnel.<br />

Quand je vois les artistes en<br />

promo ou lors de nos émissions, ils sont<br />

à l’heure, très respectueux, entourés d’attachés<br />

de presse. C’est une industrie, ils<br />

viennent au travail. Avant d’être à temps<br />

plein dans le journalisme musical, j’ai<br />

bossé en entreprise, dans le conseil, dans<br />

un cadre très classique, et je n’ai pas vu<br />

dans le rap une différence fondamentale<br />

dans la manière dont les gens travaillent.<br />

Même si je m’amuse dans ce que je fais,<br />

la manière dont les gens travaillent dans<br />

cette industrie est celle de l’entreprise.<br />

C’est un milieu assez sain, et il y a parfois<br />

une différence entre ce que les rappeurs<br />

disent et ce qu’ils vivent. Les rappeurs<br />

sont assez jeunes et souvent encore innocents<br />

vis-à-vis de pas mal de choses.<br />

C’est un milieu assez normal, même s’il<br />

y a des gens extravagants dans le rap,<br />

comme partout.<br />

Venant d’un métier classique, qu’estce<br />

que cela vous a apporté d’évoluer<br />

dans le monde du rap ? Pourquoi il<br />

faut s’intéresser à cette musique, cette<br />

industrie ?<br />

À la base, ce qui m’a fait tomber dans le<br />

rap, ce sont les textes, un phrasé et des<br />

thèmes qui me touchaient, que l’on n’entendait<br />

pas dans d’autres genres musicaux.<br />

J’étais jeune, et le rap, en tant<br />

que musique de jeunes, m’apparaissait<br />

comme un truc pour ceux qui veulent<br />

conquérir le monde, ou plein d’idéalisme.<br />

Puis, plus tard, c’est d’avantage la musique<br />

qui m’a plu. Puis sa capacité à évoluer<br />

en permanence. Ce rap en tant que<br />

monstre polymorphe, qui peut prendre<br />

n’importe quelle apparence : on peut rapper<br />

sur n’importe quoi. Ce qui m’intéresse<br />

aujourd’hui, ça peut être le producteur<br />

à la mode, ou ce qui vient dynamiter<br />

cette musique.<br />

THE RED BULLETIN 75

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