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Production Maintenance n°40

Maintenance à distance : comment s’y prendre ?

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Dossier management<br />

revenir à quelque chose de plus gérable<br />

et acceptable ».<br />

C’est du moins ce qu’a constaté Philippe<br />

Pluvinage lors de ses multiples visites à<br />

travers le monde. Or il est apparu que<br />

cette utilisation de la GMAO variait tellement<br />

que des sites pourtant comparables<br />

(même pays, même culture, même réglementation,<br />

même procédé de fabrication,<br />

nombre similaire d’employés etc.) ne<br />

sortait pas du tout les mêmes indicateurs<br />

tels que des choses pourtant évidentes<br />

comme les ordres de travail correctif par<br />

exemple. Il était impossible d’exercer du<br />

benchmark et de livrer des indicateurs<br />

communs.<br />

Une « bible »<br />

pour la maintenance<br />

Il a donc fallu trouver un compromis, et<br />

non procéder à une table rase qui, de<br />

toute évidence, aurait pris beaucoup plus<br />

de temps et aurait été très mal vécue. Il<br />

a donc été nécessaire de prendre le temps<br />

d’observer et d’écouter chacun. Le directeur<br />

technique a ensuite travaillé sur les<br />

niveaux d’équipements au sein de chaque<br />

site, découlant ensuite sur un niveau de<br />

hiérarchisation des ordres de travail,<br />

allant du préventif au curatif en passant<br />

par la casse et la fiabilité. « Nous nous<br />

sommes tous mis d’accord pour créer un<br />

système commun de tiroirs dans lesquels<br />

on met toutes les informations sur les<br />

ordres de travail. Cette étape était aussi<br />

cruciale que difficile à franchir car les<br />

opérateurs étaient déjà habitués à<br />

travailler différemment. Cela a été dur<br />

mais les responsables de maintenance<br />

chargés de mettre en place ce système<br />

ont su affirmer leur autorité en faisant<br />

admettre à chacun qu’il présentait de<br />

sérieux avantages ». Tous les jours, la<br />

direction technique recevait des alertes<br />

lorsqu’un ordre de travail avait mal été<br />

rentré ou intégré au mauvais endroit. Puis<br />

progressivement les remises à l’ordre<br />

auprès des responsables de maintenance<br />

se sont espacées, allant d’une semaine à<br />

un mois, pour se raréfier aujourd’hui. Le<br />

déploiement s’est d’abord effectué en<br />

Europe puis dans le reste du monde.<br />

Reste aujourd’hui à la direction technique<br />

de s’attaquer à la Chine où la démarche<br />

de mutualisation a déjà été entamée.<br />

Parallèlement au déploiement géographique,<br />

la démarche est aujourd’hui<br />

DR<br />

déclinée auprès des techniciens et ne<br />

s’adresse plus seulement aux responsables<br />

maintenance. Car Philippe Pluvinage<br />

a une obsession : celle du transfert<br />

de compétences et des savoirs. Or si un<br />

responsable de maintenance occupe son<br />

poste durant environ cinq ans (la<br />

démarche a été entamée il y a près de<br />

trois ans), les techniciens, eux, exerceront<br />

leur métier pendant plus de vingt<br />

ans, parfois durant toute une vie au sein<br />

de l’entreprise. Ce sont eux qui portent<br />

et colportent la mémoire de l’entreprise<br />

et de ces pratiques de maintenance nées<br />

de la nouvelle organisation, laquelle a<br />

pour but de s’inscrire dans la durée et<br />

devenir pérenne. « Ainsi, nous avons<br />

décidé d’impliquer les techniciens en les<br />

intégrant dans un réseau destiné au<br />

départ aux “maintenance managers’’.<br />

L’objectif étant de pérenniser l’outil en<br />

les formant. Et nous avons franchi un pas<br />

énorme lorsque, de leur propre chef, ils<br />

ont commencé à partager leurs retours<br />

d’expérience et proposé des pistes d’amélioration.<br />

Outre le langage commun et la<br />

bible, l’appropriation du système et de<br />

ses outils ont permis la réalisation de<br />

ce vaste et complexe travail d’organisation<br />

multi-site de la maintenance ».<br />

Intervenir sur les coûts<br />

et la partie financière<br />

Un des axes clés réside dans la réduction<br />

des coûts, et en tant que gestionnaire des<br />

coûts fixes et variables de maintenance,<br />

Philippe Pluvinage n’a pas tardé à<br />

s’adresser à la direction des finances de<br />

Kerneos pour travailler avec elle. Celleci<br />

gère en effet tous les achats et les<br />

investissements effectués dans l’entreprise<br />

au niveau mondial mais elle n’en<br />

était pas pour autant liée à la GMAO.<br />

Comprendre les besoins de la finance,<br />

c’est admettre l’idée de consolidation.<br />

Le lien entre la finance et le métier<br />

manquait ; c’est pourquoi la direction<br />

technique a imposé l’idée qu’un investissement<br />

en maintenance ne peut plus<br />

être dissocié d’un ordre de travail. « C’est<br />

à partir de là que nous avons pu obtenir<br />

de précieux indicateurs et établir des<br />

comparatifs entre les coûts liés au préventif<br />

entrepris sur deux broyeurs, l’un<br />

en France, l’autre aux États-Unis par<br />

exemple. On construit désormais nos<br />

budgets à partir de ces données ».<br />

Menée entre 2006 et 2009, la démarche<br />

– toujours en cours de déploiement – a<br />

permis de ressortir des résultats plus que<br />

satisfaisants. À travers les score-card<br />

notamment (devenus des outils de management<br />

à part entière), la direction technique<br />

a pu observer qu’en mars 2008,<br />

la moyenne de certains indicateurs – tels<br />

que l’utilisation d’un langage commun<br />

des ordres de travail, la part des heures<br />

d’intervention de maintenance planifiées<br />

et des heures passées sur les machines –<br />

était plutôt faible, de l’ordre de 40% pour<br />

les sites les moins bons. En 2012, les taux<br />

d’optimisation atteignaient 90 à 95%<br />

pour toutes les unités. Le taux de fiabilité<br />

est quant à lui passé de 80% à 95<br />

voire 98%, et le taux de réalisation des<br />

interventions planifiées et préventives<br />

sont aujourd’hui supérieurs à 90%. Quant<br />

aux coûts, le budget est respecté chaque<br />

année avec, il faut le rappeler, la possibilité<br />

dans une entreprise multinationale,<br />

de pouvoir rattraper les quelques excès<br />

d’un site en lorgnant sur l’autre.<br />

La prochaine mission est chinoise et<br />

concerne les nouveaux développements<br />

de déploiement de la démarche et d’organisation<br />

de la maintenance multi-sites.<br />

Un défi qui s’accompagnera de nouvelles<br />

actions de façon à réduire les coûts liés<br />

aux grands arrêts de maintenance. Enfin,<br />

autre cheval de bataille déjà entamé mais<br />

qu’il reste à mener, celui de la pérennité<br />

de l’outil et des pratiques d’utilisation<br />

auprès des jeunes et des techniciens. Car<br />

une bonne organisation n’a de sens que<br />

si elle est partagée par tous et traverse<br />

le temps autant que les frontières et les<br />

barrières culturelles ■<br />

Olivier Guillon<br />

PRODUCTION MAINTENANCE ➤ JANVIER, FÉVRIER, MARS 2013 ➤ PAGE 34

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