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10 ANS PM<br />
Entretien<br />
Une revue à contenu technologique<br />
et à l'écoute des techniciens<br />
Parmi les fondateurs et concepteurs incontournables du<br />
magazine <strong>Production</strong> <strong>Maintenance</strong> et de sa ligne éditorial<br />
figurent naturellement les membres actifs de la seule<br />
organisation représentant la maintenance en France.<br />
Entretien avec Claude Pichot, président de l’Association<br />
française des ingénieurs de maintenance (Afim) qui nous<br />
détaille sa vision de la maintenance depuis une décennie et le contexte<br />
de création du magazine.<br />
DR<br />
➤ <strong>Production</strong> <strong>Maintenance</strong><br />
À l’occasion des 10 ans de la création<br />
de <strong>Production</strong> <strong>Maintenance</strong>, quel regard<br />
portez-vous sur l’évolution du marché<br />
de la maintenance depuis 2002 ?<br />
Claude Pichot : L’une des caractéristiques<br />
fortes de l’évolution des métiers<br />
de la maintenance est la concentration de<br />
l’offre qui a réduit le nombre d’entreprises<br />
et renforcé par là même des<br />
groupes d’ampleur nationale. Autre<br />
niveau de concentration : il existe quelques<br />
acteurs nationaux et de grands prestataires,<br />
lesquels, pour bon nombre<br />
d’entre eux, ont récupéré des grandes<br />
marques disparues comme Vinci Énergie,<br />
Opteor, Cegelec, Cofeli Endel etc. et ont<br />
intégré de plus petites entreprises et des<br />
structures régionales. Ce phénomène s’est<br />
accompagné de l’affirmation de la soustraitance<br />
avec des entreprises qui se sont<br />
spécialisées dans la maintenance des<br />
installations industrielles (même si cette<br />
spécialisation a été plus rapide dans le<br />
secteur tertiaire). Ce phénomène n‘est pas<br />
sans poser des problèmes de planifica-<br />
« La revue <strong>Production</strong><br />
<strong>Maintenance</strong> possède avant tout<br />
un contenu technologique et doit<br />
être à l'écoute des techniciens.<br />
Le but est, en même temps, de<br />
ne pas caresser tout le monde<br />
dans le sens du poil »<br />
tion et d’organisation de la maintenance,<br />
les donneurs d’ordres se déchargeant de<br />
ces problèmes qu’ils préfèrent laisser à<br />
leurs prestataires qui eux-mêmes le<br />
donnent à leurs sous-traitants. Et c’est<br />
comme ça que l’on assiste aujourd’hui à<br />
une cascade de sous-traitance.<br />
« On assiste aujourd'hui à une<br />
cascade de sous-traitance »<br />
➤ Et concernant le métier en luimême<br />
?<br />
Il existe une articulation particulière du<br />
métier. N’importe qui ne peut faire n’importe<br />
quoi. Ces métiers comportent une<br />
multitude de spécialités : mécanique,<br />
micro-mécanique, hydro-électricité, électromécanique<br />
etc. Le métier de la maintenance<br />
s’est considérablement spécialisé.<br />
Par exemple, dans une turbine, ce n’est<br />
pas parce que l’on sait régler une vanne<br />
vapeur que l’on sait régler l’alternateur.<br />
Le problème est que parallèlement à<br />
cette complexité du métier, on a du mal<br />
à défendre la technologie dans<br />
une filière professionnelle qui<br />
n’a de cesse que de régresser. Au<br />
nom d’une rentabilité à court<br />
terme, on n’apprend plus à faire<br />
le geste, ni à travailler sur la technologie.<br />
Pourtant, les casses<br />
d’usines et les catastrophes<br />
industrielles telles qu’AZF puis<br />
Fukushima auraient pu nous<br />
alerter sur la sécurité et la sûreté<br />
industrielles.<br />
PRODUCTION MAINTENANCE ➤ JANVIER, FÉVRIER, MARS 2013 ➤ PAGE 6<br />
➤ Quelle est la place d’une telle revue<br />
pour les métiers de la maintenance ?<br />
L’idée était de créer avec Maurice Roboh,<br />
pour qui j’ai beaucoup d’estime, un<br />
magazine sur la production et la maintenance<br />
industrielle en partant des métiers.<br />
Cette revue possède avant tout un<br />
contenu technologique et doit être à<br />
l’écoute des techniciens.<br />
Le but est, en même temps, de ne pas<br />
caresser tout le monde dans le sens du<br />
poil aux dépens d’un axe éphémère et des<br />
effets d’annonce. Car la maintenance est<br />
en opposition totale avec l’éphémère de<br />
la production et du marketing. N’oublions<br />
pas que la pire des choses est de<br />
porter uniquement le regard sur le cours<br />
de l’action ; c’est comme ça que l’on<br />
casse des usines. L’essentiel réside<br />
dans une information technologique<br />
et de fond.<br />
➤ Avez-vous des recommandations<br />
particulières ou doléances à formuler<br />
en tant que président de l’Afim ?<br />
Dans le débat sur la compétitivité on<br />
oublie bien souvent que la part de la soustraitance<br />
représente 25 milliards d’euros.<br />
Or, ces métiers sont des piliers de la<br />
production. Même si on ne fabrique plus<br />
les équipements que l’on consomme on<br />
doit continuer de les maintenir.<br />
Le ministère de l’Industrie pourrait nous<br />
faire l’honneur de considérer la place de<br />
la maintenance dans le dispositif. On<br />
pourrait ainsi reparler des technologies,<br />
mais aussi traiter l’industrie comme un<br />
patrimoine qu’il faut absolument maintenir.<br />
Il y a un manque de soutien de la<br />
part des pouvoirs publics.<br />
Pourtant, avec près de 40 milliards<br />
d’euros dépensés chaque année dans la<br />
maintenance, les centaines de milliers de<br />
personnes que le secteur représente ont<br />
leur place autour de la table ■<br />
Propos recueillis par Olivier Guillon