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CHRONOMÈTRESDE MARINE<br />
66<br />
JOURNAL SUISSE D’HORLOGERIE<br />
ARNOLD ET LA PRODUCTION AU XVIIIE SIÈCLE<br />
Le Journal Suisse d’Horlogerie, magazine créé en 1876, en est à sa 134e année de parution. A feuilleter ses archives,<br />
certains sujets surgissent comme les éclairages historiques d’une actualité étonnante. Comme cette petite perle, également<br />
mise en ligne sur le site horlogerie-suisse.com. Par Joël A. Grandjean, rédacteur en chef JSH | Proposé par Eric Cosandey, professeur |<br />
Auteur de l’époque: Paul Ditisheim<br />
John Arnold et Thomas Earnshaw sont les deux horlogers anglais<br />
qui, au XVIIIe siècle, en développant sur une échelle importante la<br />
fabrication du chronomètre de marine, ont contribué à en généraliser<br />
l’emploi. Jusqu’alors, la plupart des éléments constitutifs de ces<br />
instruments devaient sortir des mains mêmes des constructeurs. Leur<br />
production restait donc étroitement limitée. Il fallut à John Harrison<br />
trois ans pour terminer successivement ses dernières montres marines<br />
N° 4 et N° 5. Ce délai fut également nécessaire à Kendall pour livrer au<br />
Board of Longitude la réplique de ce N° 4. Ce n’est qu’après trois<br />
années de travail que Mudge parvint à terminer son premier chronomètre<br />
de marine…<br />
Le commandant Gould a relevé dans The Marine Chronometer la portée<br />
de ces longs délais, en ajoutant que si la production totale du célèbre<br />
Ferdinand Berthoud s’est élevée à une septantaine d’appareils en<br />
une quarantaine d’années, il ne lui a pas été possible d’exécuter ses<br />
chronomètres à une allure dépassant annuellement deux ou trois unités<br />
[…] Au cours de cette même période, Arnold comme Earnshaw sont<br />
parvenus à produire plus d’un millier de chronomètres de marche très<br />
satisfaisante. Leur mode de fabrication permit de les livrer à des conditions<br />
de prix bien inférieures à celles des horlogers venant d’être cités.<br />
Les types qu’ils créèrent ont de plus servi de guide aux fabrications<br />
entreprises dans d’autres pays.<br />
Cette production n’a pu être atteinte qu’en faisant appel à la division<br />
du travail. Arnold et Earnshaw […] consacrèrent leurs efforts à une<br />
réalisation rationnelle, recourant à des artisans spécialisés pour les opérations<br />
d’ébauche, la fourniture des rouages, pierres, ressorts, cadrans,<br />
aiguilles, boîtiers. Ceux-ci ne manquaient pas dans le district horloger<br />
de Clerkenwell ou dans le Lancashire. Ils eurent cependant à former le<br />
personnel voulu pour exécuter certaines parties, telles l’échappement et<br />
le balancier, tout en se réservant les opérations finales de la pose du spiral<br />
et du réglage, considérées comme de précieux secrets de fabrication.<br />
Arnold et Earnshaw ne furent cependant pas meilleurs amis que Pierre<br />
Le Roy et Ferdinand Berthoud. Comme le commandant Gould l’a fait<br />
remarquer, ils se sont âprement disputé la priorité de l’origine de tous<br />
les perfectionnements apportés à l’échappement du chronomètre de<br />
marine et à la constitution de ses organes réglant.<br />
On voit alors apparaître le premier dispositif de balancier compensateur,<br />
exécuté en 1773, où deux masses diamétralement opposées s’éloignent<br />
John Arnold, 1736-1799. Son nom revit sous l’appellation «Arnold & Son, Master of The<br />
Longitude in London Since 1764». Elle a son siège à La Chaux-de-Fonds.<br />
www.arnoldandson.com<br />
ou se rapprochent du centre sous l’effet d’une lame bimétallique enroulée<br />
en spirale. Dès 1779, le mode d’actionnement des masses compensatrices<br />
fut modifié et remplacé par une paire de bilames symétriques<br />
repliées en S. […] L’échappement offrait l’inconvénient d’exiger la<br />
présence de l’huile aux parties agissantes: ceci provoquait de sérieuses<br />
perturbations de marche. Il y a plusieurs points communs entre ce<br />
dispositif et la construction d’un autre échappement à détente pivotée<br />
d’Arnold. La roue d’échappement portait une double denture, mais les<br />
fonctions présentaient, côté huiles, les mêmes inconvénients que le<br />
dispositif précédent.<br />
Arnold substitua à cet échappement le dispositif pour lequel il avait<br />
obtenu un brevet d’invention. La détente ne repose plus sur des pivots,<br />
mais elle est fixée à sa base sur la platine; elle est amincie en ressort de<br />
manière à pouvoir fléchir près de son point d’attache. Earnshaw a<br />
revendiqué la paternité de cette nouvelle disposition, comme il l’a indiqué<br />
dans Longitude, an Appeal to the Public, volume de 314 pages<br />
publié en 1808. Il donne les détails les plus précis sur les conditions<br />
dans lesquelles il réalisa sa découverte. Il s’était rendu compte des