volumes xlix. - Archive ouverte UNIGE
volumes xlix. - Archive ouverte UNIGE
volumes xlix. - Archive ouverte UNIGE
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
771 SERMONS 772<br />
faut monter pins haut. Nous prendrons une goutte<br />
de vin: ce n'est point pour la vie présente, ce n'est<br />
rien qui conoerne le monde. Voyla donc comme<br />
ce qui se fait entre les Chrestiens, les doit tellement<br />
attirer en haut, qu'ils oublient tout ce qui est du<br />
corps et de ceste vie caduque. C'est ce que nous<br />
avons à retenir,^ afin que quand nous venons à recevoir<br />
la saincte Cène, nous soyons tellement disposez<br />
que nous sçachions que Dieu nous apelle à<br />
soy, et veut que nous soyons compagnons des Anges.<br />
Car par ce Sacrement nous sommes associez avec<br />
eux, pour estre nourris de noStre Seigneur Iesus<br />
Christ, qui est leur vie comme la nostre. C'est<br />
donc le profit qui nous revient de ce passage quand<br />
S. Paul dit que nous avons les maisons pour boire<br />
et pour manger, et qu'il faut que le Sacrement nous<br />
retire hors de ces choses basses et corruptibles: car<br />
si nous y demeurons il -y aura une trop longue<br />
distance entre Dieu et nous.<br />
Or s'il n'est point licite de mesler son repas en<br />
quelque sobriété qu'on le prene, parmi la Cène de<br />
nostre Seigneur Iesus Christ; quand on y apportera<br />
d'autres vanitez, qui seront plus enormes beaucoup,<br />
cela sera-il supportable? Comme quelquefois on<br />
verra des pompes au Baptesme en la Papauté, que<br />
là il n'est question que d'ambition et orgueil pour<br />
se faire valoir: il semble qu'on vueille mettre ces<br />
pompes là en avant pour anéantir ce qui estoit de<br />
Dieu. Et cela doit bien estre poisé de nous: car<br />
il n'a pas tenu à des galans, qu'ici nous n'ayons eu<br />
parmi le Baptesme de Iesus Christ les tabourins et<br />
halebardiers. Et de faict, on les a veu venir ici<br />
profaner le temple de Dieu, et ceste confusion là<br />
a duré iusques à ce que ce bon Dieu ait purgé la<br />
ville de ceste ordure, de ces diables là qui taschoyent<br />
de tout pervertir, et qui meritoyent, non point de<br />
retourner aux superstitions des Papistes, mais d'estre<br />
comme chiens et pourceaux sans nulle Chrestienté<br />
ne religion. Comme aussi il ont voulu mettre ici<br />
une Turquie, voire, et des choses encores plus<br />
enormes. Car quand cela seroit, ne seroit-ce point<br />
une chose beaucoup pire et plus detestable que le<br />
boire et le manger que met ici S. Paul : mesmement<br />
quand on le prendroit en sobriété et temperance?<br />
Qu'est-il donc question de faire ? Que nous soyons<br />
despouillez des choses de ce monde, afin d'estre<br />
amenez à Dieu. Et de faict, quand on nous presche<br />
l'Evangile de nostre Seigneur Iesus Christ, et qu'il<br />
nous a laissé un thresor si inestimable, comme est<br />
la sainct Cène, nous devons bien regarder d'en<br />
faire nostre profit. Et quand nous penserions bien<br />
à cela, nous ne prendrions pas le loisir d'y mesler<br />
les affaires du monde.<br />
Or au reste, quand il adiouste que les uns sont<br />
yvres, et que les autres meurent de faim, veu que<br />
pour le moins ils sont là à demi-affamez: par cela<br />
nous voyons comme un abus attire l'autre, et Dieu<br />
condamne tout ce qui est ainsi inventé des hommes :<br />
et à la fin on voit qu'il ne peut apporter que mal<br />
avec soy. Il est vray que ceste cérémonie du commencement<br />
avoit esté mise sus, sous ombre que<br />
les aumosnes se faisoyent là: mais cependant les<br />
riches ont voulu là se nourrir à leur aise, et gourmander<br />
tout leur soul, et les poures ont esté là<br />
destituez. Or puis qu'ainsi est, cognoissons que<br />
quand nous venons en l'Eglise (comme S. Paul<br />
conclud) il nous faut prendre des affections toutes<br />
nouvelles : car quand nous sommes là unis ensemble,<br />
cela nous doit monstrer pour tout le temps de<br />
nostre vie, qu'il faut qu'un chacun secoure à ses<br />
prochains, comme une main du corps sera preste<br />
de secourir le pied. Voyla donc à quelle condition<br />
nous sommes assemblez. Car aussi ce que nous<br />
faisons une fois, et pour quelque temps, nous doit<br />
servir pour tous les iours de nostre vie, et nous<br />
doit inciter à nous tenir en telle union, qu'un chacun<br />
s'employe pour ses prochains. Car que sera-ce<br />
quand nous protesterons que nostre Seigneur Iesus<br />
preside au milieu de nous, que nous sommes ici en<br />
son Nom pour ouir sa Parole: si cependant nous<br />
ne sommes esmeus nullement d'affection d'amitié<br />
et d'humanité les uns envers les autres? Que serace<br />
quand nous apporterons ici nos haines, et nos<br />
rancunes, et que nous serons envenimez les uns<br />
contre les autres? Que l'un pensera comme il pourra<br />
tromper les simples: l'autre regardera comme il<br />
pourra attraper le bien d'autruy. Et neantmoins<br />
cela se fait ordinairement. Quand nous venons au<br />
temple, y venons nous estans purgez de toutes<br />
haines, et de toutes choses qui sont contraires à<br />
ceste union de laquelle parle ici sainct Paul?<br />
Hélas, il s'en faut beaucoup. Mais, (comme i'ay dit)<br />
il y en a, cependant qu'on presche, qui pensent à<br />
leurs rapines, à leurs tromperies, comment ils pourront<br />
circonvenir quelques simples, attraper à leurs<br />
filets et ceci et cela. Or voyans que tels vices<br />
sont enracinez en la nature humaine, et que les<br />
hommes n'en sçauroyent estre purs, sinon en bataillant,<br />
que devons nous faire, sinon de bien observer<br />
ce qui nous est ici monstre par S. Paul?<br />
Quand donc nous venons ici, que nous apprenions<br />
que nostre Seigneur nous assemble, afin<br />
que nul ne mesprise ses prochains: mais qu'en toute<br />
humilité nous communiquions les uns avec les autres,<br />
comme enfans de Dieu. Il est certain que la pasture<br />
que nous recevons au temple est beaucoup plus<br />
précieuse que tous les banquets de ce monde. Et si<br />
en un banquet on est assis à une mesme table : on<br />
dira, Et bien, encores que cestuy - là soit plus<br />
honorable que moy, tant y a qu'il n'a pas desdaigné<br />
de me recevoir à sa table: i'ay esté assis à la<br />
premiere table, et nul n'a esté honoré plus que moy.