PSC 6-01 - FSP

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leurs décisions. Grâce aux tests, ils
peuvent le faire de manière plus transparente
et plus objective qu’auparavant.
A mon avis, c’est l’une des principales
raisons qui expliquent pourquoi les
tests connaissent un succès grandissant
auprès des entreprises.
Certains tests, conçus il y a plus de 50
ans, sont encore largement répandus.
Comment s’explique cette longévité ?
Les tests classiques ont été adaptés et
fréquemment remis à jour, si bien que
certains, comme le Binet-Simon qui
date de 1904, sont toujours utilisés.
Plusieurs instruments vénérables datant
d’avant la Seconde Guerre mondiale
sont encore largement utilisés, qu’ils
soient psychométriques (STRONG,
MMPI, MBTI) ou projectifs (Rorschach,
TAT, etc.). Leur longévité prouve
la force des habitudes. Les utilisateurs
se disent : « Pourquoi changer,
puisque ça marche ?»
Que faut-il à la nouvelle génération de
tests pour s’imposer ?
Il est difficile de parler de nouvelle
génération de tests, cela nous ferait
aborder des considérations techniques
trop difficiles. Actuellement on voit se
distinguer nettement la famille des tests
informatisés de ceux que l’on désigne
par l’expression « papier-crayon ».
Un nouveau test ne peut s’implanter
que s’il rencontre un terrain favorable,
c’est-à-dire une volonté de changement
de la part des praticiens. Ces derniers
doivent aussi admettre qu’il leur faudra
sacrifier du temps en formation supplémentaire
et sans doute se familiariser
avec des systèmes informatiques en
perpétuel changement, ce qui est parfois
plus qu’agaçant.
Parmi les principaux arguments que
peuvent avancer les nouveaux tests,
outre des caractéristiques techniques
éventuellement supérieures, il y a la
commodité de la passation et du
dépouillement : ils prennent moins de
temps, certes, mais pour cette même
raison, ils sont aussi moins précis (les
tests longs sont en général meilleurs –
plus fidèles – que les tests courts). Les
tests informatisés séduisent parce qu’ils
peuvent être passés à l’écran et corrigés
automatiquement par l’ordinateur, ce
qui évite de compter les petites croix,
comme pour les tests papier-crayon.
Cela dit, on peut aussi informatiser les
anciens tests, mais ce n’est pas vraiment
faire preuve d’esprit d’innovation.
Les nouveaux tests sont-ils très différents
des anciens ?
Ils sont surtout plus conviviaux, plus
pratiques et épargnent le temps. Ainsi,
il existe des tests, très à la mode actuellement,
qui fournissent des textes prérédigés.
Le programme livre une interprétation
écrite en fonction des résultats
obtenus. L’utilisateur n’a donc plus
besoin d’interpréter des chiffres et de
rédiger un rapport personnel, ce qui lui
prenait parfois plusieurs heures. Il a
sous les yeux un texte prêt à l’emploi et
transmissible, censé décrire la personne
qui lui fait face. Voilà qui est très utile
à une époque où les conseillers et les
psychologues sont surchargés. Axés
essentiellement sur le monde professionnel,
ces tests ont beaucoup de succès,
notamment dans la réorientation de
chômeurs, mais aussi dans de grandes
sociétés nationales. Ce sont des tests
mixtes, qui mélangent intérêts, valeurs
et personnalité. Ils sont relativement
chers. Par exemple une institution peut
payer environ 10 000 francs par année
pour une copie installée sur un seul
ordinateur. Du point de vue technique,
ils sont complètement opaques et il est
absolument impossible de les analyser
ou de les démonter pour voir comment
ça marche, il faut faire confiance…
Il existe également des tests d’aptitudes
dits adaptatifs, qui présentent des questions
en fonction de la réponse donnée
à la question précédente. Ces instruments
sont basés sur des théories probabilistes
très complexes et ne peuvent
donc fonctionner que sur un ordinateur.
Leur construction suppose des connaissances
très pointues que peu de personnes
possèdent encore à l’heure
actuelle en Europe (je précise que je ne
les ai pas moi-même…).
A quoi ressemblera l’avenir de l’évaluation
psychologique ? Va-t-on encore
utiliser longtemps des tests classiques
ou est-ce que tout sera informatisé ?
L’usage de l’ordinateur va sans doute se
généraliser pour les passations individuelles.
Mais ce phénomène attendra le
renouvellement de toute une partie de
la population des praticiens. Il y a tout
de même un grand nombre d’entre eux
qui ne sont pas à l’aise devant un ordinateur,
car ils ont le sentiment de ne
pas maîtriser ce qui se passe. Ils préfèrent
des tests papier-crayon, plus rassurants
et faciles à corriger à la main et
dans lesquels il est encore possible
d’analyser les réponses, item par item,
avant de regarder les valeurs aux
échelles. Là, ils savent au moins à quel
genre de technique ils ont affaire.
À mon avis, on verra se perpétuer une
grande variété de pratiques pendant
encore très longtemps, ce n’est pas un
mal.
Interview: Jane-Lise Schneeberger
L’interlocuteur
Roland Capel est licencié en sciences naturelles, licencié en sciences sociales et titulaire d’un doctorat en psychologie. Maître
d’enseignement et de recherche, il donne depuis 5 ans des cours de psychométrie à l’Institut de psychologie de l’Université de
Lausanne. M. Capel est également consultant en psychométrie et analyse de données. Il travaille à la mise au point d’instruments
d’évaluation psychologique.
Adresse
Roland Capel, Institut de psychologie, BFSH2, Université de Lausanne, 1015 Lausanne. E-mail : roland.capel@ip.unil.ch