Inhaltsverzeichnis/Table des matières - Dr. Dieter Winkler Verlag
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La Noblesse hongroise à la fin <strong>des</strong> années 1780<br />
CLAUDE MICHAUD<br />
Les représentations de la noblesse hongroise se départissent difficilement d’un<br />
certain nombre de topoï. Le noble hongrois est souvent représenté comme un<br />
seigneur terrien inculte, à l’horizon étroit, attaché au servage et vivant de la sueur<br />
de ses paysans ; ou bien comme le fougueux miles christi, défendant contre<br />
l’Islam une Hongrie devenue depuis le milieu du XV e siècle le boulevard de la<br />
Chrétienté, à moins qu’il ne trahisse cet idéal pour composer avec le Turc ; ou<br />
encore une tête brûlée et indisciplinée, abonnée plusieurs fois par siècle à la révolte<br />
contre le souverain ; et tous cultivant un magyarisme ombrageux et clos,<br />
assez semblable au sarmatisme <strong>des</strong> voisins polonais. Et lors de l’ultime décennie<br />
du siècle <strong>des</strong> Lumières, cette noblesse, une fois de plus, en s’opposant aux réformes<br />
de l’empereur-roi Joseph II, puis en se rebellant ouvertement contre la<br />
dynastie <strong>des</strong> Habsbourg, manifestait encore son hostilité à tout essai de modernisation<br />
du royaume.<br />
La recherche universitaire récente et dépassionnée, et pour la Hongrie,<br />
avant même la chute du régime totalitaire, montre qu’on ne peut plus se satisfaire<br />
de stéréotypes aussi sommaires. Il y eut, dès la seconde moitié du XVIII e siècle,<br />
une frange de la noblesse hongroise ouverte aux Lumières d’où quelles vinssent,<br />
de France, d’Italie, <strong>des</strong> Provinces-Unies, d’Allemagne avec les deux variantes de<br />
l’Aufklärung protestante et de l’Aufklärung catholique, d’Angleterre enfin. Certes,<br />
le mouvement ne saurait concerner la grande masse <strong>des</strong> 416.000 nobles, environ<br />
5% de la population du royaume, si l’on retient le chiffre du recensement<br />
de 1784. La petite noblesse <strong>des</strong> taxalistae, environ 350.000 individus, possesseur<br />
au plus d’une parcelle noble guère plus étendue qu’une tenure paysanne, ou plus<br />
encore n’ayant guère que la ressource de brandir leur lettre d’anoblissement<br />
(d’où leur appellation d’armalistae), n’accéda pas au banquet culturel de<br />
l’Europe <strong>des</strong> Lumières. 1 Et parmi les 16% qui restent, ce ne fut qu’une minorité<br />
riche qui put s’instruire, voyager, lire et constituer <strong>des</strong> bibliothèques 2 , prendre<br />
part au mouvement de réformes qui bouleversa la Monarchie <strong>des</strong> Habsbourg et le<br />
royaume de Hongrie dès le règne de Marie-Thérèse et plus encore sous le règne<br />
personnel de Joseph II, lorsque la réforme de la censure permit un accès plus<br />
1 Sur cette petite noblesse exclue, István György TÓTH, « Le monde de la petite noblesse hongroise<br />
au XVIII e<br />
siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. 46-1, janvier-mars<br />
1999, p. 171-184.<br />
2 Cf. István György TÓTH, Zwischen Tradition und Aufklärung – adelige Bibliotheken im 18.<br />
Jahrhundert in Westungarn, in: Martin SCHEUTZ/Wolfgang SCHMALE/Dana ŠTEFANOVÁ (Hg.):<br />
Orte <strong>des</strong> Wissens, 293-323, Bochum 2004.