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AGRICULTURES

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14<br />

DOSSIER <strong>AGRICULTURES</strong><br />

s<br />

non OGM, mais également annihiler<br />

les progrès réalisés en la matière dans<br />

une trentaine d’États américains.<br />

La volaille désinfectée avec des solutions<br />

chlorées fait également partie<br />

des quelques sujets majeurs de préoccupation<br />

dans une étude réalisée par<br />

le Parlement européen. Les États-<br />

Unis tentent en effet depuis longtemps<br />

d’obtenir la possibilité d’en<br />

exporter vers l’Union : tandis que<br />

celle-ci n’accepte que l’eau pour laver<br />

les carcasses de volailles pour des<br />

raisons sanitaires, les États-Unis autorisent<br />

différents produits de traitement<br />

contre les pathogènes. Les<br />

États-Unis ont déjà contesté cette<br />

interdiction d’exportation, qui leur<br />

a coûté des centaines de millions de<br />

“<br />

dollars de manque à gagner. Ils comptent<br />

sur l’accord en cours pour faire<br />

avancer le sujet.<br />

De nombreux autres exemples pourraient<br />

être développés. Mais qu’on<br />

ne s’y trompe pas, les multinationales<br />

européennes ont elles aussi<br />

des intérêts dans cet accord. Le TAFTA<br />

n’est pas l’histoire de gentils Européens<br />

qui se feraient dominer par de<br />

méchants États-Uniens. Il s’agit bien<br />

plus d’une offensive conjointe des<br />

multinationales des deux côtés de<br />

l’Atlantique pour faire valoir leurs<br />

intérêts.<br />

DES DÉCISIONS POLITIQUES<br />

SUR LESQUELLES ON PEUT PESER<br />

L’accord transatlantique sera voté<br />

in fine à la fois par le Conseil et le<br />

Parlement européen, ainsi que par<br />

les Parlements nationaux si certains<br />

champs des négociations échappent<br />

aux compétences exclusives de<br />

l’Union. Au Parlement européen, les<br />

lignes bougent grâce aux mobilisations<br />

citoyennes: peu à peu, de nombreux<br />

mouvements écologistes, paysans,<br />

syndicaux, de consommateurs,<br />

de la santé ou encore de lutte contre<br />

la financiarisation s’organisent, en<br />

France, dans les autres pays européens<br />

et aux États-Unis, pour contrer<br />

l’accord et son contenu. Ils ont réussi<br />

à dévoiler auprès d’une partie de la<br />

population le contenu de l’accord<br />

qui est sur la table et tentent d’en<br />

faire un débat de société. Ils ont<br />

obtenu de premières victoires, partielles<br />

mais concrètes, en termes de<br />

transparence des informations ou<br />

de remise en cause de certains aspects.<br />

Les mouvements citoyens font le pari<br />

que, comme l’accord anti-contrefaçon<br />

(ACTA) il y a quelques années<br />

ou l’Accord multilatéral sur l’investissement<br />

(AMI) à la fin des années<br />

1990, il est possible de faire basculer<br />

le rapport de forces au détriment<br />

du libre-échange et en faveur d’un<br />

commerce plus régulé, fondé sur la<br />

coopération et le progrès social et<br />

écologique.<br />

“<br />

Mais qu’on ne s’y trompe pas, […] le TAFTA n’est pas l’histoire<br />

de gentils Européens qui se feraient dominer par de méchants États-<br />

Uniens. Il s’agit bien plus d’une offensive conjointe des multinationales<br />

des deux côtés de l’Atlantique pour faire valoir leurs intérêts.<br />

La mainmise de marchés n’est pas<br />

une fatalité. Retours aux circuits<br />

courts et au bio, signes de qualité,<br />

luttes contre les expropriations des<br />

paysans et pour la réappropriation<br />

collective des terres, contre la brevetabilité<br />

des semences et contre les<br />

OGM, forums pour la souveraineté<br />

alimentaire : les luttes et pratiques<br />

locales se multiplient, au Sud comme<br />

au Nord, comme autant d’alternatives<br />

concrètes à la mainmise des<br />

marchés. Pour qu’elles puissent servir<br />

à transformer l’ensemble de nos<br />

façons de produire, de consommer<br />

et d’échanger, il faut qu’elles s’accompagnent<br />

de politiques en leur<br />

faveur et que cesse la libéralisation<br />

des échanges.<br />

*AURÉLIE TROUVÉ est ingénieur<br />

agronome et maître de conférence<br />

en économie..<br />

Dernière publication : Le business est dans le<br />

pré. Les dérives de l’agro-industrie,<br />

éditions Fayard<br />

1. Hubert Cochet et Michel Merlet, « Land<br />

grabbing and share of the value added in<br />

agricultural processes. A new look at the<br />

distribution of land revenues »,<br />

communication à la conference internationale<br />

Global Land Grabbing, Brighton, Royaume-<br />

Uni, 6-8 avril 2011.<br />

BREVETER LE VIVANT?<br />

Le 25 mars 2015, la Grande Chambre de<br />

recours de l’Office européen des brevets a<br />

confirmé que des plantes issues de procédés<br />

« essentiellement biologiques » peuvent être<br />

brevetées. Les conséquences de cette décision<br />

sont dramatiques.<br />

Les États-Unis<br />

font pression pour<br />

que les normes<br />

européennes<br />

d’étiquetage<br />

de l’utilisation<br />

d’OGM soient<br />

remises en cause.<br />

V<br />

PAR GUY KASTLER*,<br />

la directive européenne<br />

98/44 (juillet<br />

D’après<br />

1998), la simple découverte<br />

d’un lien entre une séquence<br />

génétique et un caractère d’intérêt<br />

est qualifiée d’«invention brevetable<br />

» ; ce faisant, elle permet de<br />

revendiquer un titre de propriété sur<br />

toutes les plantes qui expriment ce<br />

caractère et contiennent la séquence<br />

génétique associée, y compris si elles<br />

préexistent à l’état naturel. Certes, en<br />

1998 la transgénèse était le seul outil<br />

auquel on pensait, parce qu’il était<br />

alors le plus utilisé. Mais seul<br />

Polichinelle pouvait croire que les<br />

marqueurs génétiques ne permettraient<br />

pas rapidement d’identifier<br />

puis de breveter directement les<br />

traits « natifs » des plantes en application<br />

de cette directive.<br />

Quelques jours plus tard, Monsanto<br />

dévoilait son ambition d’acquérir le<br />

Syngenta afin de réunir dans ses<br />

seules mains la majorité des brevets<br />

et le contrôle de plus du tiers du marché<br />

mondial des semences et des<br />

pesticides associés. De 1997 à 2013,<br />

on est passé de 7 000 entreprises<br />

semencières, dont aucune ne détenait<br />

plus de 1 % du marché, à 10 qui<br />

en contrôlent 75 %. Où est la souveraineté<br />

d’un pays si une seule entre-<br />

Progressistes AVRIL-MAI-JUIN 2015

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