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AGRICULTURES

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20<br />

DOSSIER <strong>AGRICULTURES</strong><br />

1957-2015: L’ÉVOLUTION DE<br />

LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE<br />

Au-delà des grands principes, l’Union européenne traduit son existence en<br />

grands axes politiques, dont la politique agricole commune (PAC). Mise en<br />

place en 1957 selon des objectifs d’autosuffisance et de protectionnisme,<br />

elle s’inscrit aujourd’hui pleinement dans les logiques libérales mondiales.<br />

PAR JEAN-PIERRE BOINON*,<br />

À l’origine, la PAC a<br />

été mise en place<br />

lors du traité de<br />

Rome de 1957 pour<br />

permettre à une<br />

Europe dévastée<br />

d’assurer sa propre<br />

sécurité alimentaire.<br />

culture et l’augmentation de la production.<br />

Pour chaque catégorie de<br />

produits est fixé un prix d’intervention<br />

auquel la puissance publique<br />

s’engage à acheter toutes les quantités<br />

offertes du produit. Pour empêcher<br />

la concurrence des produits<br />

étrangers, un prix de seuil est fixé.<br />

C’est un prix minimum en dessous<br />

duquel les importations en provenance<br />

des pays tiers ne peuvent entrer<br />

sur le marché communautaire. Ce<br />

prix de seuil est supérieur aux prix<br />

d’intervention.<br />

Si, à l’aube de la décennie 1970, le<br />

bilan de la PAC apparaît satisfaisant,<br />

celle-ci n’est pas exempte de contradictions.<br />

Le développement de la<br />

production nécessite de trouver de<br />

nouveaux débouchés extérieurs à<br />

des prix inférieurs à ceux du marché<br />

intérieur européen. Les excédents<br />

dans plusieurs secteurs (lait, vin,<br />

céréales, viande bovine) pèsent de<br />

plus en plus lourd dans le budget<br />

communautaire (frais de stockage<br />

ou de destruction, subventions aux<br />

exportations). La solution proposée<br />

par les libéraux de la Commission<br />

européenne est une baisse des prix<br />

garantis, une accélération de l’insertion<br />

de l’agriculture dans une logique<br />

de compétitivité en même temps<br />

qu’une forte diminution de la population<br />

active agricole.<br />

1984 : LES NÉGOCIATIONS<br />

INTERNATIONALES CONTRE LA PAC<br />

À partir de 1984, les questions agricoles<br />

sont à l’ordre du jour des<br />

négociations internationales visant<br />

à réduire les barrières douanières<br />

qui faisaient obstacle au développement<br />

du commerce mondial.<br />

Les États-Unis demandent une<br />

réforme profonde du mécanisme<br />

européen de protection de l’agriculture<br />

communautaire. Dans le<br />

cadre de ces négociations, l’Union<br />

DU BESOIN D’AUTOSUFFISANCE<br />

AUX EXCÉDENTS ENCOMBRANTS<br />

Dans un contexte de guerre froide<br />

et de fin de l’empire colonial français,<br />

pour assurer durablement la<br />

sécurité alimentaire de l’Europe de<br />

l’Ouest et encourager la production<br />

agricole, le traité de Rome de 1957<br />

jette les bases d’une PAC qui favorise<br />

l’augmentation de la productivité<br />

de l’agriculture en développant le<br />

progrès technique et qui garantisse<br />

des prix raisonnables pour le producteur<br />

comme pour le consommateur.<br />

La PAC repose ainsi sur trois<br />

principes :<br />

– la liberté complète des échanges<br />

entre États membres (prix unique<br />

européen, réglementation unique) ;<br />

– la préférence communautaire, qui<br />

donne la priorité à la production<br />

domestique par rapport aux biens<br />

importés avec la mise en place de<br />

tarifs douaniers communs ;<br />

– la solidarité financière, selon laquelle<br />

les dépenses induites par la PAC sont<br />

assurées par le budget communautaire<br />

et non pas par le budget de<br />

chaque État membre.<br />

La Communauté finance l’effort de<br />

production des agriculteurs en garantissant<br />

les prix et les débouchés, ce<br />

qui favorise l’investissement en agrieuropéenne<br />

propose en 1992 une<br />

réforme de la PAC, qui se traduit<br />

par une baisse des prix d’intervention,<br />

une réduction des surfaces<br />

en production et des compensations<br />

de revenus aux agriculteurs.<br />

L’accord agricole de l’Uruguay Round<br />

de décembre 1993 est un compromis<br />

permettant de débloquer la<br />

situation et ouvrant la voie à la création<br />

de l’Organisation mondiale du<br />

commerce (OMC). La principale<br />

concession européenne est la suppression<br />

des prix de seuil et leur<br />

remplacement par des droits de<br />

douane fixes, qui sont réduits de<br />

36 %. Les seuls soutiens à l’agriculture<br />

tolérés sont ceux qui n’affectent<br />

ni le fonctionnement des marchés<br />

ni la détermination des prix,<br />

et ils doivent être justifiés par les<br />

contributions non marchandes positives<br />

de l’activité agricole.<br />

2003 : INSTAURATION<br />

DU DÉCOUPLAGE<br />

DES AIDES À LA PRODUCTION<br />

Avec pour objectif de libéraliser complètement<br />

le commerce mondial de<br />

produits agricoles, en 2003 une<br />

réforme en profondeur de la PAC<br />

introduit le découplage des aides de<br />

la production : il n’est pas nécessaire<br />

de produire pour obtenir les aides.<br />

Cette réforme, d’inspiration libé -<br />

rale, laisse une grande liberté aux<br />

États membres dans ses modalités<br />

d’application.<br />

Certains pays, comme le Royaume-<br />

Uni et l’Allemagne, ont opté pour un<br />

découplage total des aides, avec des<br />

paiements uniformes par hectare et<br />

un renforcement des transferts favorisant<br />

les fonctions environnementales<br />

de l’agriculture et le développement<br />

des zones rurales ; d’autres,<br />

comme la France, l’Espagne ou le<br />

Portugal, ont choisi au contraire de<br />

réduire au minimum les changements<br />

pour limiter les effets en matière<br />

de réorientation des productions<br />

(maintien du couplage des paiements<br />

à la production) ou de redistribution<br />

des aides (références historiques).<br />

Les négociations à l’OMC sont marquées<br />

par le poids grandissant des<br />

pays émergents, notamment ceux<br />

qui sont exportateurs de produits<br />

agricoles, qui contestent les politiques<br />

protectionnistes des États-<br />

Unis et de l’Union européenne. Si la<br />

Progressistes AVRIL-MAI-JUIN 2015

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