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AGRICULTURES

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19<br />

sité due à la fonte des effectifs douaniers,<br />

des contrôles vétérinaires insuffisants<br />

et la démoralisation des services<br />

supposés contrôler –<br />

numériquement – des indications<br />

vagues, voire inexactes, y ont contribué.<br />

Qui sait que seul 0,01 % des produits<br />

sont vérifiés par les douanes à<br />

leur entrée sur le territoire européen,<br />

qui ne protège guère son agriculture<br />

?<br />

VERS UN « CHEVALGATE »?<br />

Le cheval n’est pas une mauvaise<br />

viande, au contraire, mais peut le<br />

devenir par son origine, parfois douteuse,<br />

ou du fait d’une tricherie dans<br />

la fixation de sa provenance : retraite<br />

paisible ou abattage, racheté à 10 €<br />

pièce aux États-Unis ou ailleurs (avec,<br />

par exemple, présence de phénylbutazone,<br />

antidouleur interdit dans<br />

la chaîne alimentaire humaine). Le<br />

risque d’un « Chevalgate » international<br />

est permanent, alors que d’anciens<br />

scandales sont dans les<br />

mémoires : vache folle, farines animales<br />

(de retour depuis 2013) pour<br />

nourrir poissons et crevettes.<br />

La profession déplore la baisse continue<br />

en France de consommation de<br />

morceaux dits « nobles » en viande<br />

fraîche au profit de steaks hachés,<br />

moins chers, de composition multiple.<br />

Il y a aussi du porc dans le<br />

bœuf… à l’occasion de cette guerre<br />

des prix, sans police économique<br />

effective.<br />

QUALITÉ OU TRAÇABILITÉ?<br />

La Commission européenne n’a pas<br />

dit que les provenances diverses dans<br />

le matériau usiné rendent difficile<br />

l’identification. En revanche, elle s’est<br />

émue du souhait des consommateurs<br />

d’une traçabilité, un peu plus<br />

chère, mais n’a rien dit quant au<br />

Après les<br />

scandales des<br />

vaches folles, des<br />

farines animales<br />

(réautorisées) et<br />

des antibiotiques,<br />

la menace d’un<br />

«chevalgate»<br />

plane, tant est<br />

mal encadrée et<br />

contrôlée l’origine<br />

de cette viande.<br />

niveau des salaires et revenus qui<br />

expliquent les choix alimentaires d’un<br />

grand nombre, selon la logique du<br />

prix le plus bas. Ne faut-il pas nourrir<br />

le travailleur peu payé ou précarisé<br />

tout en maintenant la profitabilité<br />

pour les grands distributeurs ?<br />

Face à une industrie de la viande<br />

mondialisée, deux ans pour accéder<br />

à une forme d’étiquetage CEE des<br />

viandes transformées est-ce suffisant<br />

pour rassurer et éliminer les<br />

risques réels de trafics ? La frontière<br />

entre la tromperie sur la marchandise,<br />

ayant généré des bénéfices de<br />

l’ordre de 1 000 %, et un mode de<br />

production intensif qui fait appel à<br />

l’« autocontrôle », tant qu’il n’y a pas<br />

de drame sanitaire avéré, semble<br />

assez mince au vu de récidives<br />

récentes.<br />

“<br />

Qui sait que seul 0,01 % des produits<br />

sont vérifiés par les douanes à leur entrée sur<br />

le territoire européen, qui ne protège guère<br />

son agriculture ?<br />

“<br />

D’autres facteurs menacent les productions<br />

de qualité, lesquelles pourraient<br />

néanmoins faire la différence.<br />

Parmi ces facteurs, signalons surtout<br />

le dumping social et ses conséquences<br />

sur le prix et la qualité du<br />

bœuf et du porc : par application de<br />

la loi du pays d’origine, des salariés<br />

Dans toute la France, c’est avec<br />

beaucoup de fierté et de passion que<br />

des éleveurs protègent et développent<br />

les espèces bovines de notre pays.<br />

Ici : départ de blondes d’Aquitaine<br />

pour le Salon de l’agriculture de Paris.<br />

roumains, polonais ou autres travaillent<br />

dans les élevages industriels<br />

intensifs d’Allemagne pour 7 €<br />

l’heure. En même temps, les terres<br />

roumaines sont rachetées par des<br />

financiers collectant des subventions<br />

pour le « bio », spoliant les<br />

petites exploitations familiales.<br />

“<br />

La Commission<br />

européenne s’est émue du<br />

souhait des consommateurs<br />

d’une traçabilité, un peu plus<br />

chère, mais n’a rien dit quant<br />

au niveau des salaires et<br />

revenus qui expliquent les<br />

choix alimentaires d’un grand<br />

nombre, selon la logique<br />

du prix le plus bas.<br />

La dérégulation de la production de<br />

lait va aussi aggraver les risques pour<br />

notre filière bovine dans une flambée<br />

de concurrences déloyales, au<br />

détriment des veaux, dont le sort<br />

n’est guère enviable.<br />

La perspective d’un traité transatlantique<br />

[voir article « Les agriculteurs<br />

de montagnes dans l’étau libéral<br />

»] et de la subséquente arrivée<br />

massive de viandes provenant des<br />

États-Unis – de 300 000 à 600 000 t<br />

issues de bêtes nourries dans des<br />

stalles sans herbe, les feedlots (« parcs<br />

d’engraissement »), hormones et<br />

antibiotiques à la clef – est inquiétante.<br />

Les citoyens doivent se préoccuper<br />

du TAFTA [voir Progressistes n o 6]<br />

pour défendre leur souveraineté alimentaire…<br />

et leurs paysages. n<br />

*ANNE RIVIÈRE est juriste<br />

“<br />

AVRIL-MAI-JUIN 2015 Progressistes

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