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— N'importe lequel, alors.<br />
Il prend une pr<strong>of</strong>onde inspiration avant de commen<strong>ce</strong>r :<br />
— « Je porte en moi ton cœur (je le porte dans mon cœur). Il ne me quitte jamais... »<br />
Il continue, les mots me pénètrent, à la façon dont la soleil effleure la surfa<strong>ce</strong> de l'e<strong>au</strong> pour<br />
mieux atteindre les pr<strong>of</strong>ondeurs et éclairer les ténèbres. Je garde les yeux fermés.<br />
Étonnamment, je continue à voir les étoiles : des galaxies entières qui s'épanouissent à partir<br />
du néant, astres roses et violets, immenses océans argentés, millier de lunes blanches.<br />
J'ai l'impression de ne m'être assoupie que depuis cinq minutes lorsque Alex me réveille<br />
d'une secousse légère. Le ciel est toujours d'un noir pr<strong>of</strong>ond, la lune h<strong>au</strong>te et claire, mais, en<br />
découvrant combien les bougies ont diminué, je comprends que j'ai dû dormir pendant <strong>au</strong><br />
moins une heure.<br />
— Il est temps d'y aller, annon<strong>ce</strong>-t-il en chassant une mèche de mon front.<br />
— Quelle heure est-il ?<br />
Ma voix est lourde de sommeil.<br />
— Un peu moins de 3 heures, répond-il en se relevant avant de me tendre une main pour<br />
m'aider. Nous devons retraverser avant que la Belle <strong>au</strong> bois dormant se réveille.<br />
— La Belle <strong>au</strong> bois dormant ?<br />
Je secoue la tête de perplexité. Alex rit dou<strong>ce</strong>ment.<br />
— Après la poésie, dit-il en déposant un baiser sur mes lèvres, nous passons <strong>au</strong>x contes de<br />
fées.<br />
Puis nous revoilà dans la forêt ; sur la route éventrée qui longe les maisons en ruine ; de<br />
nouve<strong>au</strong> dans la forêt. Je chemine sans réussir à me tirer de ma torpeur. Je n'éprouve plus ni<br />
affolement ni nervosité quand nous escaladons la « clôture. Franchir les barbelés est<br />
infiniment plus facile la seconde fois, comme si les ombres étaient en tissu, comme si elles<br />
nous protégeaient des regards. Le garde de la guérite 21 est toujours dans la même position<br />
- tête rejetée en arrière, pieds en appui sur le bure<strong>au</strong>, bouche ouverte -, et bientôt nous<br />
rejoignons la baie. Puis nous nous f<strong>au</strong>filons discrètement dans les rues en direction de<br />
Deering Highlands, et alors, seulement, la plus étrange des idées surgit dans mon esprit, micrainte<br />
et mi-souhait : peut être que tout <strong>ce</strong>la est un rêve, peut-être que lorsque je me<br />
réveillerai je serai encore dans la Nature. Peut-être que je découvrirai que j'ai toujours vécu<br />
là-bas, que Portland, les labos, le couvre-feu et le Protocole n'étaient qu'un long c<strong>au</strong>chemar<br />
tordu.<br />
37, Brooks Street : à peine entrés par la fenêtre, la chaleur et l'odeur de renfermé nous<br />
frappent de plein fouet, c‘est comme de heurter un mur. Je n'y ai pourtant passé que<br />
quelques heures, et la Nature me manque déjà : le vent dans les arbres évoquant le chant de<br />
l'océan, les odeurs incroyables de végét<strong>au</strong>x en fleurs, la présen<strong>ce</strong> de bêtes invisibles, <strong>ce</strong>tte<br />
vie débordante, palpitant et se déployant dans toutes les directions, encore et encore...<br />
Aucun mur...