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plupart du temps.<br />
Au moment où nous passons devant eux, je perçois une p<strong>au</strong>se d une fraction de seconde :<br />
ils redressent la tête et la pivotent dans notre direction. Je suis trop gênée pour soutenir leur<br />
regard. Mon corps entier brûle, j'ai l'impression qu'on vient de me plonger dans un four, tête<br />
la première. Pourtant, un instant plus tard à peine, je sens leurs yeux glisser sur moi,<br />
harponnés par Hana. Le soleil qui joue dans ses cheveux d'or m'éblouit.<br />
La douleur s'insinue de nouve<strong>au</strong> dans mes jambes, elles me paraissent soudain très lourdes,<br />
mais je me for<strong>ce</strong> à continuer : nous nous engageons dans Commercial Street et laissons<br />
Saint-Vin<strong>ce</strong>nt dans notre dos. Hana doit accélérer pour me rattraper. Je me tourne vers elle<br />
et réussis à haleter :<br />
— On fait la course !<br />
Hana donne un coup de collier en s aidant des bras et manque de me rejoindre, mais je<br />
baisse la tête et bondis en avant, moulinant des jambes <strong>au</strong>ssi vite que possible, tout en<br />
remplissant d air mes poumons, qui me semblent avoir la taille d un petit pois, et en faisant<br />
la sourde oreille <strong>au</strong>x hurlements de mes muscles. Ma vision périphérique se trouble et je ne<br />
vois plus que le grillage qui barre la rue devant nous. Lorsque je m'affale dessus, il tremble<br />
sous mon poids.<br />
— J’ai gagné ! hurlé-je en me retournant.<br />
Hana arrive une seconde plus tard, hors d'haleine. Pour ralentir notre rythme cardiaque,<br />
nous nous mettons à marcher en <strong>ce</strong>rcle, hoquetant et avalant de grandes goulées d'air entre<br />
deux éclats de rire. Lorsque Hana retrouve enfin son souffle, elle se redresse en s'esclaffant :<br />
— Je t'ai laissée gagner !<br />
C'est une vieille blague entre nous. Je décoche un coup de pied dans les gravillons et elle<br />
évite les projectiles.<br />
— Si ça te fait plaisir de le penser !<br />
Des mèches se sont échappées de ma queue-de-cheval. Je me débats avec l'élastique pour<br />
libérer entièrement ma chevelure, puis je me penche en avant afin de sentir la caresse du<br />
vent sur ma nuque. La sueur qui ruisselle le long de mon visage me pique les yeux.<br />
— Jolie coiffure !<br />
Hana me bouscule légèrement et je me dépla<strong>ce</strong> de côté en redressant la tête pour lui<br />
rendre son coup avec mes cheveux. Elle esquive. Le grillage en travers de la rue marque<br />
l'entrée d'une allée de servi<strong>ce</strong>. Il est occupé, en son <strong>ce</strong>ntre, par un petit portillon métallique.<br />
Hana l'enjambe et me fait signe de la suivre. Je n'avais pas examiné les environs : l'allée de<br />
servi<strong>ce</strong> débouche sur un parking, occupé par une forêt d'immenses bennes et de hangars<br />
pour les chargements des cargos. Au-delà se trouve l'alignement familier des bâtiments<br />
blancs, semblables à d'énormes dents. Il doit s'agir de l'arrière des laboratoires. Je m'avise<br />
seulement que le grillage est coiffé de barbelés et parcouru de panne<strong>au</strong>x, par intervalles de<br />
cinq mètres, qui clament : PROPRIÉTÉ PRIVÉE. ENTRÉE INTERDITE. ACCÈS RÉSERVÉ AU<br />
PERSONNEL.<br />
— Je ne suis pas sûre que nous soyons <strong>ce</strong>nsées...