Le Faust <strong>de</strong> GoetheLe XVIII e siècle change le regard sur Faust : ses recherches et sa révolte enfont le représentant <strong>de</strong> la pensée humaine qui poursuit inlassablement sonbut, et qui trouve sa noblesse dans cette obstination. Le romantisme s’emparedu mythe. Le héros <strong>de</strong>vient un rêveur alchimiste. Faust-Méphistoexprime le conflit opposant le moi à la nature profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> ses aspirations,d’une pulsion <strong>de</strong> mort, ou un exemple d’hallucination ou <strong>de</strong> folie sensorielle.Lessing fut le premier à comprendre le parti que l’on pouvait tirer <strong>de</strong> lalégen<strong>de</strong> ainsi renouvelée : Faust était délivré, par les anges, <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong>Satan. C’est la conclusion à laquelle arrivera aussi un poète plus jeune queLessing, et qui déjà s’occupait du sujet en même temps que lui, puisanttous <strong>de</strong>ux à la même source, « la remarquable pièce <strong>de</strong> marionnettes » :Goethe (1749-1832) qui se reconnaît dans le personnage. « Comme Faust,j’avais parcouru tout le <strong>cercle</strong> du savoir humain, et j’en avais reconnu <strong>de</strong>bonne heure la vanité. J’avais pris la vie par tous les côtés, et j’étais toujoursrevenu <strong>de</strong> mes tentatives plus mécontent et plus tourmenté. » Plusd’un <strong>de</strong>mi-siècle s’écoula entre l’année 1774, où il écrivit les premièresscènes <strong>de</strong> Faust : Eine Tragödie, parues en 1808 et le mois <strong>de</strong> janvier 1831,où il scella le manuscrit du second Faust, achevé en 1831 et publié en1833. Ce fut l’œuvre <strong>de</strong> sa vie. Son œuvre effaça tous les Faust précé<strong>de</strong>ntset imposa sa conception <strong>de</strong> la légen<strong>de</strong>. Elle rénovait l’art idéaliste, remettaità leurs places logiques le Mon<strong>de</strong>, qui est l’apparence, et l’Idée, qui estl’être. Contrairement à Christophe Marlowe pour qui son héros, coupable<strong>de</strong> rechercher la puissance divine, allait directement en enfer, Goethe sauveFaust, « l’âme qui aspire toujours plus haut », et il réhabiliteMéphistophélès lui-même, « l’esprit qui nie sans cesse ». Les <strong>de</strong>ux personnagessont, pour lui, les <strong>de</strong>ux éléments indispensables à toute vie humaineet les <strong>de</strong>ux facteurs nécessaires à son accomplissement. Ce qui appartienten propre à Goethe, et ce qui humanise le plus son poème, c’est le drame<strong>de</strong> Marguerite, dans la première partie. Jeune fille sensible, tendre doncsusceptible <strong>de</strong> défaillances, notamment face à l’amour. Il ramène la discussionphilosophique aux réalités <strong>de</strong> la vie. Le Faust <strong>de</strong> Goethe, est centré surun héros qui aspire à une connaissance et une sagesse toujours plusgran<strong>de</strong>s, fût-ce au péril <strong>de</strong> son salut. Le récit <strong>de</strong> Goethe commence par lepacte entre Dieu et Méphistophélès : jusqu’à quel point Faust pourra-t-ilêtre tenté ? La séduction et l’abandon <strong>de</strong> Gretchen (Margot, qui <strong>de</strong>vientMarguerite chez Gounod) ont lieu dans la première partie. Dans l’imposantesecon<strong>de</strong> partie, surviennent <strong>de</strong> nombreuses aventures surnaturelles etl’ultime tentative <strong>de</strong> Faust <strong>de</strong> s’assurer la maîtrise <strong>de</strong> la nature en contrô-12
lant la mer. Plus étonnant, Faust ne vend pas immédiatement son âme.Il n’acceptera <strong>de</strong> la cé<strong>de</strong>r que s’il trouve ce qu’il cherche, -un objectifinaccessible. Aussi, est-il sauvé chez Goethe.À côté <strong>de</strong> Goethe ou après lui, quelques écrivains, romanciers ou dramaturges,se contentèrent <strong>de</strong> répéter la vieille légen<strong>de</strong>. Nicolas Lenau seul,dont le Faust parut en 1836, renouvela une <strong>de</strong>rnière fois le sujet : <strong>de</strong> mêmeque Lessing et Goethe reflétaient les idéaux d’une époque confiante dansla victoire <strong>de</strong> l’esprit, <strong>de</strong> même Lenau personnifia, dans son héros, lesdéfaillances du romantisme mourant, auxquelles s’ajoutait son propre désespoir.Philippe Fénelon, en 1952, en tira un opéra.On a pu dire qu’il y avait une sorte d’affinité secrète entre le sujet <strong>de</strong> Faustet le génie allemand, qui s’y serait incarné à toutes les phases <strong>de</strong> son développement.Les autres avatars <strong>de</strong> FaustLes artistes, peintres ou musiciens, se sont occupés <strong>de</strong> Faust presque autantque les poètes. Une belle eau-forte <strong>de</strong> Rembrandt montre le docteur dansson cabinet <strong>de</strong> travail, tenant un livre <strong>de</strong> magie ouvert <strong>de</strong>vant lui, et selevant pour regar<strong>de</strong>r le signe <strong>de</strong> l’Esprit qui lui apparaît dans une lumière.Après le succès universel du Faust <strong>de</strong> Goethe, il <strong>de</strong>vint la source d’inspirationessentielle pour toute autre expression artistique <strong>de</strong> la légen<strong>de</strong>,d’abord dans les pays germaniques. Pierre <strong>de</strong> Cornélius, le premier, luiemprunta le sujet <strong>de</strong> douze gravures (1810).Faust a captivé plusieurs compositeurs majeurs qui conçurent leur propreversion. Parmi les œuvres musicales, inspirées par le poème <strong>de</strong> Goethe, ilfaut citer Schubert avec Marguerite au rouet (1814), Schumann et sesScènes <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> Faust, écrites entre 1844 et 1848. Elles ouvrent la voieaux hardiesses harmoniques néoromantiques et sont remplies d’une tensiondramatique très gran<strong>de</strong>. Wagner, tenté par le sujet dès 1831, met enmusique quelques extraits du texte <strong>de</strong> Goethe mais il n’ira pas plus loin,après une ouverture <strong>de</strong> Faust <strong>de</strong> 1841, reprise en 1855 ; Liszt ajoutera à saMéphisto Valse, en fait quatre valses écrites entre 1859 et 1885, une paraphrasesur la valse du Faust <strong>de</strong> Gounod, en 1861. Spohr fut le premier, àécrire, un opéra en 1813, représenté en 1816. Il ne s’inspire pas <strong>de</strong> Goethemais du poète Klinger.La France n’échappe pas à l’engouement pour Faust. Le texte a été traduit<strong>de</strong>ux fois, en 1823, par Louis <strong>de</strong> Sainte-Aulaire et par Albert Stapfer. C’estpour une réédition <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière que Delacroix a réalisé, en 1828, unesérie <strong>de</strong> dix-sept lithographies. Le peintre Ary Scheffer, Hollandais <strong>de</strong>naissance mais travaillant en France, dès 1825, lui avait consacré onze13
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