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INTERVIEW / Matthieu Pavon<br />
bascule s’est passée à ce moment-là. Et<br />
le jour où je suis passé pro, je me suis<br />
dit : « On ne rigole plus ! ».<br />
Vous avez déclaré que dans<br />
le passé, vous n’étiez pas forcément<br />
ambitieux. C’est-à-dire ?<br />
J’ai forcément douté chez les amateurs,<br />
parce que je n’ai rien gagné. Quand je<br />
suis passé pro, à 20 ans, je me suis donné<br />
six saisons pour réussir. Je ne voulais pas<br />
vivoter. Si cela n’avait pas marché, j’aurais<br />
fait autre chose. Désormais, l’appétit<br />
vient en mangeant. Il y a quatre ans, je<br />
pensais que le Top 50 m’était inaccessible.<br />
Aujourd’hui, je suis fermement<br />
convaincu que je peux y arriver.<br />
Lors du Grand Prix<br />
Schweppes 2015, au golf du<br />
Médoc Resort, Matthieu avait<br />
été « caddeyé » par son père<br />
Michel, un ancien footballeur<br />
professionnel.<br />
Bio<br />
express<br />
MATTHIEU PAVON<br />
Français<br />
24 ans<br />
1,83 m, 85 kg<br />
Passé pro en 2013<br />
Palmarès<br />
Circuit européen :<br />
3 e Open d’Écosse <strong>2017</strong><br />
Challenge Tour<br />
2 e Open Foshan 2016,<br />
2 e Montecchia<br />
Open 2016, 2 e Turkish<br />
Airlines Challenge 2016<br />
Alps Tour<br />
1 er Servizitalia<br />
Open 2015,<br />
1 er Open International<br />
Rebetz 2014<br />
Classements<br />
(au 02/08/<strong>2017</strong>)<br />
Français : 2 e<br />
Européen : 39 e<br />
Mondial : 137 e<br />
Quel est votre modèle en termes<br />
de golf « champagne » ?<br />
Tiger Woods, évidemment. (Sourire)<br />
Combien de fois l’a-t-on vu sortir des<br />
coups somptueux depuis des lieux improbables<br />
? Depuis le fin fond des bois…<br />
Alors, oui, il y a des joueurs qui vont toujours<br />
driver tout droit, se mettre sur le<br />
green <strong>com</strong>me il faut et rentrer quelques<br />
putts à l’occasion pour faire des parties<br />
simples et sans bogey, mais ceux-là ne<br />
m’intéressent pas vraiment. Ce n’est pas<br />
mon style ! (Sourire)<br />
Quels ont été vos scores les plus bas<br />
chez les professionnels ?<br />
Je me souviens d’un tour à -8 l’an passé<br />
en Turquie. En Chine, toujours en 2016,<br />
j’ai eu aussi une journée à -7. Ce sont<br />
des moments où je me suis régalé, où<br />
j’ai été totalement moi-même.<br />
Benoît Ducoulombier,<br />
votre entraîneur, est-il en phase<br />
avec votre manière d’aborder le golf<br />
de cette façon ? Peut-il être tenté<br />
d’essayer de vous mettre la bride ?<br />
Il peut faire passer des messages, mais<br />
il a l’habitude de travailler avec des<br />
joueurs agressifs, que ce soit Victor<br />
Dubuisson, Romain Langasque ou<br />
moi-même. L’essentiel, avec Benoît,<br />
c’est la confiance qu’il vous accorde.<br />
Il m’a expliqué : « Je crois en toi, tu<br />
peux réussir de belles choses ». À partir<br />
de là, il m’a donné des ailes. C’est<br />
un grand technicien, mais il a surtout<br />
une approche mentale très souple. Il<br />
s’adapte aux uns et aux autres. Au<br />
départ du 1, le jeudi, il vous place toujours<br />
dans les meilleures conditions. À<br />
vous ensuite de jouer votre partition.<br />
Il insiste beaucoup sur les basiques.<br />
Est-ce le cas avec vous ?<br />
Toujours. Si vous tapez trop à gauche, il<br />
s’agit tout de suite de regarder ce qui se<br />
passe au niveau des pieds et du corps en<br />
général. Il n’y a pas d’autre secret.<br />
Techniquement, où estimez-vous<br />
avoir <strong>fr</strong>anchi un cap à ses côtés ?<br />
La consistance. J’ai toujours <strong>fr</strong>appé<br />
fort avec un assez bon contact. Mon<br />
problème était qu’il y avait trop d’irrégularité.<br />
Aujourd’hui, ma <strong>fr</strong>appe et<br />
ma hauteur de balle sont relativement<br />
constantes. Conséquence : mes distances<br />
sont meilleures et je me retrouve plus<br />
souvent près des drapeaux.<br />
Où travaillez-vous avec lui ?<br />
Chez moi, au golf du Médoc, parce<br />
qu’il entraîne Julien Quesne et Grégory<br />
Havret, qui sont eux aussi pensionnaires<br />
de ce club. Ou chez lui, au golf de Saint-<br />
Donat, sur la Côte d’Azur, où les conditions<br />
d’entraînement sont parfaites grâce<br />
à la zone de travail qu’il a inspirée.<br />
Quelles sont vos relations<br />
personnelles avec lui ?<br />
Je l’appelle souvent. Depuis quatre ans,<br />
il fait partie de « ma famille ». Je lui<br />
dois énormément. Souvent, les joueurs<br />
l’appellent « Papy ». Voilà, c’est mon autre<br />
grand-père. Ce qui le rend heureux ? Me<br />
voir bien jouer au golf. (Sourire)<br />
Quel regard portez-vous<br />
sur votre carrière amateur qui a été<br />
plutôt discrète ?<br />
En effet, il ne s’est pas passé grand-chose.<br />
(Sourire) J’ai longtemps hésité avant de me<br />
lancer dans l’aventure de ce sport. Mon<br />
père est un ancien professionnel de football<br />
[NDLR : Michel Pavon, champion de<br />
France avec les Girondins de Bordeaux<br />
en 1999], j’ai donc, évidemment, passé<br />
pas mal de temps avec un ballon. J’avais<br />
16 ans quand j’ai <strong>com</strong>pris que le golf<br />
était vraiment synonyme de plaisir. La<br />
Avez-vous été tenté de suivre<br />
les pas de votre père<br />
et d’embrasser la carrière<br />
de footballeur professionnel ?<br />
Je n’étais pas un footballeur médiocre,<br />
mais je n’avais pas le niveau. Je jouais<br />
en milieu de terrain <strong>com</strong>me mon père,<br />
sans être aussi bon que lui. (Sourire) Après<br />
mon bac S, j’ai eu la chance que mes<br />
parents me paient un séjour de six mois<br />
à West Palm Beach, en Floride, où je me<br />
suis entraîné avec Ken Martin, l’ancien<br />
caddy de Sandy Lyle. Il m’a appris à<br />
manier la balle, à m’amuser vraiment<br />
avec. C’était un moment déterminant.<br />
Une expérience géniale.<br />
Michel, votre père, est devenu<br />
champion de France en 1999<br />
avec les Girondins<br />
de Bordeaux. Vous aviez six ans.<br />
Vous souvenez-vous de ce moment ?<br />
Pas vraiment. (Sourire) Mais avec mes<br />
deux petits <strong>fr</strong>ères, nous avons ensuite<br />
regardé en boucle les cassettes des meilleures<br />
parties de cette saison-là. Ma mère<br />
m’a souvent dit que mon père était un<br />
bosseur qui remettait toujours l’ouvrage<br />
sur le métier. C’est un peu le code de<br />
conduite que je me suis fixé pour tracer<br />
ma propre route.<br />
Sa réussite sportive a-t-elle été<br />
une source d’inspiration pour vous ?<br />
Non. Il m’a simplement transmis des<br />
valeurs sur le mode : « En travaillant, on<br />
a peu de chances d’y arriver. En ne travaillant<br />
pas, on n’a aucune chance ». Travail<br />
et humilité, voilà les deux maîtres mots.<br />
Vous conseille-t-il en venant<br />
vous voir souvent, par exemple ?<br />
Il garde ses distances. Il sait que le golf<br />
est un sport aléatoire qui est à l’inverse<br />
du football. Il m’apporte son soutien et<br />
son amour, c’est déjà beaucoup. Il a été 8<br />
ou 9 de handicap. Mais il n’a plus trop le<br />
temps de jouer, d’autant qu’il est retourné<br />
74 - GOLF MAGAZINE ● N° 330